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La sommelière Marie-Andrée Thériault élabore des cuvées en collaborations avec des artisans vignerons de la France et du Québec dans le but de souligner leurs savoirs. | Photo : Radio-Canada / Allison Van Rassel

« Bienvenue dans la réalité d’une sommelière », me souhaite Marie-Andrée Thériault, alors que nous nous installons au comptoir-bar du restaurant Laurie Raphaël dans le Vieux-Port de Québec. Celle qui sert le vin des autres depuis plus de 20 ans, propose ces jours-ci son propre assemblage, Je me SouVIeNs, un Morgon Grand Cras 2019 élaboré en collaboration avec le Domaine Gaget du Beaujolais en France.

 Le matin, c’est là qu’on goûte le mieux. C’est le moment où l’on est plus apte à goûter les arômes. On a aussi le nez plus ouvert.

Il est 10 h du matin et Marie-Andrée verse une lampée de vin rouge dans un Riedel, une marque privilégiée dans l’univers de la sommellerie. Elle fait tournoyer le liquide dans sa coupe, la porte à son nez et prend une gorgée. Elle inspire, puis recrache le précieux nectar qu’elle a mis plusieurs mois à élaborer.

 Il est un peu frais, c’est température cave, mais il va se tempérer. 

Très curieuse de ce que je m’apprête à découvrir, je plonge le nez dans mon verre. Ça sent la cerise mature et énergique à la fois. La couleur est séduisante, un beau rouge grenat violacé.

 La robe est moyennement profonde, mais je n’aime pas entrer dans le côté trop technique du vin. Je suis plus ou moins à l’aise avec ça , avoue-t-elle candidement.

Cette transparence et malaise devant l’intellectualisation de ce jus de raisin fermenté est ce que j’apprécie le plus chez cette sommelière. Celle qui a fait ses études à l’École hôtelière de la capitale travaille depuis plus de 20 ans dans les plus prestigieux établissements de la Capitale-Nationale, dont le défunt restaurant l’Initiale, un pilier de la scène gastronomique haut de gamme au Canada. Sa plus grande force, au-delà de sa passion débordante pour le vin, est la facilité avec laquelle elle s’adapte à son client.

« C’est super important pour moi de rendre les gens à l’aise, de rendre ça accessible. C’est régulier que les gens se sentent intimidés par le vin, surtout dans les grands établissements. L’important c’est d’aimer ce que l’on boit, c’est tout. »

— Une citation de  Marie-Andrée Thériault, sommelière
L’étiquette de l’artiste Mirov attire l’attention avec l’ours, un animal emblématique de la forêt québécoise.
L’étiquette de l’artiste Mirov attire l’attention avec l’ours, un animal emblématique de la forêt québécoise. | Photo : Radio-Canada / Allison Van Rassel

Élaborer un vin à distance

Marie-Andrée tient sa coupe dans la paume de sa main, de façon à réchauffer son vin qui, selon mon palais matinal, est vraiment facile à boire avec une belle longueur en bouche. J’aime à la fois la finesse et la délicatesse de sa création, que je qualifie de vin de soif, avec des notes juste assez épicées et juste assez poivrées.

« Décrire un vin que tu ne goûtes pas, c’est comme décrire un plat que tu n’as pas mangé. Il faut que tu l’imagines, donc c’est toujours un peu plus difficile. Je me suis fiée sur une impression et sur des mots d’une autre personne. Je m’en remettais alors beaucoup à son expérience à lui. »

— Une citation de  Marie-Andrée Thériault, sommelière

Le vin est élaboré en étroite collaboration avec l’artisan vigneron Mikaël Gaget du Domaine Gaget situé sur la Côte du Py, le terroir le plus réputé du cru Morgon en plein cœur du Beaujolais. Marie-Andrée a rencontré Mickaël lors d’un voyage de viticulture en compagnie de son mari Alexandre Mahut, un artisan caviste à Levallois-Perret en France et importateur de microcuvées de vin au Québec avec son agence Art et Vin. Autour d’un repas, l’idée fut soulevée, embrassée, puis concrétisée, et ce, malgré une pandémie mondiale.

 C’est une collaboration que j’aurais aimé faire sur place avec le vigneron comme prévu, mais considérant la distance et la pandémie mondiale, je suis vraiment fière du résultat.

Marie-Andrée a composé son assemblage par vidéoconférence. M. Gaget a partagé avec la sommelière ses notes de dégustation — du jus brut avant fermentation jusqu’à l’embouteillage — afin qu’elle puisse faire un choix éclairé.

C’est un processus qui m’a permis de bien comprendre l’impact de chaque geste et de chaque décision dans le résultat final d’un vin, soulève-t-elle. Les méthodes de vinifications, c’était tout nouveau pour moi, alors j’ai suivi mon instinct et fait confiance à mon palais.

Son Morgon Grand Cras 2019 est plein de charme, une fierté pour celle qui gagne sa vie à servir le vin des autres.  Ce qui me plaît le plus, c’est le retour des clients à qui je le sers en restaurant , dit-elle.  J’en parle, je le sers et j’ai le retour direct du client, c’est du jamais vu pour moi.

Le vin est disponible à Québec dans les restaurants Laurie Raphaël, Légende par la Tanière et Petits Creux, ainsi qu'à Montréal au Joe Beef, le Café Dax et Nevski. La deuxième cuvée du millésime 2020 arrivera à l’automne. Pendant ce temps, en plus de gérer la cave du Laurie Raphaël, Marie-Andrée Thériault développe d’autres cuvées collaboratives Je Me SouVIeNs, notamment avec des vignobles québécois.


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La sommelière Marie-Andrée Thériault élabore des cuvées en collaborations avec des artisans vignerons de la France et du Québec dans le but de souligner leurs savoirs. | Photo : Radio-Canada / Allison Van Rassel