ACCUEIL
REPORTAGES RÉCENTS
CLAVARDAGES
COORDONNÉES
ÉQUIPE
Logo Enjeux

REPORTAGE
— 2003-12-09

GARDERIES FAMILIALES:
VOS ENFANTS
ENTRE BONNES MAINS?

« Est-ce que le tribunal administratif remplit son rôle de protection de l'enfant? Ma réponse, c'est non. Le tribunal n'est pas là pour protéger l'enfant, il est là pour juger une situation entre adultes. »
- André Marcotte, directeur, CPE Carcajou.



 

 

 

 

 

 

 

 

Malgré les failles du système, la garderie familiale demeure le mode de garde le plus populaire au Québec.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 




 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Avec le développement des centres de la petite enfance, il y avait une vision du développement social, il y avait une vision du développement et de la préparation des enfants.

Or, on parle de ça, actuellement, en ne favorisant plus le développement des centres de la petite enfance au Québec ».

 

 

 

 

 

 

Blocs 1 - 2

À travers le débat sur les centres de la petite enfance et les places de garderie à 5 $, on oublie souvent de parler des garderies en milieu familial, le service de garde le plus fréquenté par les petits Québécois d'âge préscolaire. Depuis six ans, la plupart de ces garderies familiales à 5 $ dépendent des centres de la petite enfance (CPE). Une intégration qui pose parfois des problèmes sérieux.

Les centres de la petite enfance (CPE), ou les fameuses garderies publiques à 5 $, ont 77 mille petits clients satisfaits. Pour d'autres enfants toutefois, rien ne remplace la chaleur d'une maison. À leur intention, il y a la garderie familiale subventionnée, que le centre de la petite enfance développe et supervise.

Un gros contrat, car ils sont plus de 80 mille enfants à entrer chaque jour chez des femmes comme Isabelle Bertrand. Pour 5 dollars par jour, elle offre un milieu sécuritaire et stimulant à six enfants de Blainville. Le rêve de bien des parents!


Pour Cindy et Sylvain, l'aventure de la garderie familiale s'est terminée avant même d'avoir commencé. En février, leur fils Émile avait pourtant sa place réservée dans un milieu familial près de chez eux. Mais en juillet, juste avant leur retour au travail, un message sur le répondeur leur annonce que leur fils a perdu sa place. La raison? Émile est un garçon...



Ce que les parents d'Émile ne savaient pas, c'est qu'une garderie familiale a parfaitement le droit de choisir un enfant ou de renvoyer un autre. Ici, contrairement à un centre de la petite enfance, aucune liste d'attente ne doit être respectée. Car les propriétaires sont des travailleuses autonomes.



Enjeux mène son enquête

Enjeux a décidé d'enquêter sur des aspects troublants de la garderie qui a refusé d'accepter le petit Émile. Une visite de quelques minutes nous a permis de relever deux violations de la loi.

Tout d'abord, sa propriétaire n'habite pas sa garderie familiale, ce qui dans son cas est illégal. Elle y loue plutôt des chambres à deux étudiants. Les chambres étant situées à l'étage, et la garderie, au rez-de-chaussée, rien n'empêche le contact entre les chambreurs et les enfants. Par ailleurs, même si elle a le droit de louer à des chambreurs, la propriétaire n'a pas signalé leur présence comme l'exigeait la loi. Et malgré plusieurs inspections, le centre de la petite enfance, qui supervise la garderie familiale, n'a rien remarqué.

Le CPE n'a donc pas rencontré les chambreurs comme l'exige la loi. Mais surtout, il n'a pas réalisé les enquêtes policières sur leurs antécédents judiciaires. Chose qui est pourtant obligatoire pour
tous les adultes qui habitent la garderie.

Tout en confirmant les faits, le CPE n'a pas souhaité commenter. Quant à la propriétaire, elle affirme n'avoir jamais reçu de plaintes de parents. De plus, elle ajoute que : « Confrontés à une succession de changements, nous avons omis l'application de l'article 30. Soit, mais de là à déduire que dans notre milieu les facteurs à risque se conjuguent, il y a un pas à ne pas franchir. »

Serait-il possible qu'on exige trop de la garderie familiale? Qu'à cause du 5 $, les parents s'attendent au même service que dans un CPE?




Les CPE : des surveillants aux mains liées

La plupart des CPE n'ont pas choisi de développer le milieu familial dans leur quartier; c'est la loi qui les y oblige. André Marcotte par exemple, dirige le CPE Carcajou et supervise 14 garderies familiales. Mais avec des pouvoirs limités : le règlement ne lui permettant que quatre visites de contrôle par an. Parfois, M. Marcotte n'a d'autre choix que de tolérer certaines garderies. Une en particulier l'a beaucoup inquiété.



«
On n'osait pas agir, c'est la DPJ qui nous a obligés.
Il avait des marques dans le visage, on voyait
des traces de doigts».


Armé du signalement à la DPJ, André Marcotte retire finalement le permis de la responsable du service de garde. Il fait la même chose pour une deuxième garderie, cette fois-ci pour un cas de fraude. Dans les deux cas, les responsables ont contesté la décision devant le Tribunal administratif. Mais le CPE allait payer le prix fort en frais d'avocat : « 180 000$ pour les deux causes. Assez pour pratiquement remettre la survie du centre de la petite enfance en jeu », affirme M. Marcotte.

Les démarches d'André Marcotte n'auront d'ailleurs pas servi à grand-chose . Après avoir imposé des suspensions, le tribunal ordonne au CPE de réintégrer les deux garderies.


« Est-ce que le tribunal remplit son rôle de protection de l'enfant? Ma réponse, c'est non. Le tribunal administratif n'est pas là pour protéger l'enfant, il est là pour juger une situation entre adultes. »



Devant plusieurs décisions troublantes du Tribunal administratif , on peut en effet se poser des questions. Par exemple, dans un document obtenu grâce à la Loi d'accès à l'information, le tribunal ordonne la remise du permis à une responsable dont le fils de 14 ans avait commis des attouchements sexuels à deux reprises. Une décision qualifiée d'aberrante, par une avocate au dossier.




Devenir une responsable de service de garde

Comment choisit-on les 12 mille femmes qui exercent le métier de responsable de service de garde? Enjeux a assisté à une partie du processus. D'abord, les représentant(e)s du CPE effectuent une longue entrevue sur les compétences, la vision et les motivations de la candidate. Après l'entrevue, c'est la visite de l'appartement. Le CPE inspecte, vérifie le respect des normes et demande des changements.

* Si la candidate est choisie, elle ne doit pas s'attendre à faire une fortune : 15 mille dollars net en moyenne, pour six enfants. Et son service de garde doit être ouvert 10 heures par jour.

* Pour obtenir son permis, elle doit s'engager à suivre 45 heures de cours et un cours de secourisme. Mais étrangement, elle a le droit d'ouvrir son service avant d'avoir commencé ses cours. En comparaison, une éducatrice dans un centre de la petite enfance doit compléter un Diplôme d'Études Collégiales (DEC) de trois ans.



Le développement des CPE :
une histoire de gros sous?

Aujourd'hui au Québec, l'heure est aux garderies familiales : pas de nouveau projet de CPE en vue.

Pourquoi?
Le ministère, lui, se défend de fonder ses décisions sur le coût des places. Reste que la différence est importante : une place en milieu familial coûte 26,83$ par jour au gouvernement, alors qu'une place en CPE, plus de 42$.

Des garderies familiales, il y en a toujours eu au Québec et il y en aura toujours. Mais le système actuel crée un malaise. Les propriétaires de garderies familiales se sentent souvent harcelées et exploitées : « Si elles coûtent moins cher, qu'on leur laisse les droits. Elles paient de leurs poches tous les frais fixes, tous les frais de développement, toute leur formation bref, tout ce que le gouvernement ou un CPE n'assume pas, elles le paient de leurs poches. Mais ont-elles des droits en retour? », souligne Nathalie D'Amours, directrice générale, Association des éducatrices familiales.

Mais chez les parents et dans les CPE, on exige plus de pouvoirs, plus de surveillance, plus de contrôle. Pour éviter, dit-on, l'irréparable.


« Est-ce qu'un jour, on va se retrouver en première page du journal, et qu'à un moment donné, le volet familial va battre de l'aile? Est-ce que c'est ça qu'on veut? Ça pourrait donner ça. C'est ça qui me fait peur.»
- André Marcotte, directeur, CPE Carcajou





Journaliste : Pascale Turbide
Réalisateur : Yves Bernard


 



Hyperliens

:: Association des éducatrices et éducateurs en milieu familial du Québec
Pour consulter le rôle et les buts de l'association

:: Association québécoise des centres de la petite enfance
Mission, politique familiale, comment devenir éducateur-éducatrice ou responsable de services de garde en milieu familial, politiques et procédures de règlement des plaintes, processus d'évaluation de la qualité, etc.

:: Pour trouver un service de garde près de chez vous
Ministère de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille

:: Pour consulter les aides du ministère dans le choix d'un service de garde
Ministère de l'Emploi, de la Solidarité sociale et de la Famille.

:: Éducatrices et éducateurs en milieu familial : leurs revendications
Communiqué, 8 septembre 2003. Association des éducatrices et éducateurs en milieu familial du Québec.

:: Éducatrices et éducateurs en milieu familial : pour connaître où en est leur syndicalisation
Communiqué, 8 septembre 2003. Site de la Confédération des syndicats nationaux (CSN).

:: Pour connaître les barèmes de financement des services de garde en milieu familial
Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

:: Pour consulter la politique familiale du gouvernement
Pour participer ou consulter le forum des éducatrices et responsables de service de garde en milieu familial

:: Les politiques familiales
Dossier, Enjeux, avril 2003.

:: Petit Monde : le portail de la famille et de l'enfance

 

 
 

 

 
 
© RADIO-CANADA.CA  2003
Haut de page