HOMÉLIE DU 25 NOVEMBRE 2007
Christ, Roi de l'Univers

BASILIQUE NOTRE-DAME
Montréal, Québec

Président de l'assemblée :
Jacques D'Arcy, p.s.s.

Samuel (5, 1-3)
Colossiens (1, 12-20)
Saint Luc (23, 35-43)

Ce que vous contemplez, des jours viendront où il n'en restera pas pierre sur pierre. Tout sera détruit.

Frères et soeurs dans le Christ,

Les premiers Sulpiciens ont quitté le confort de leur France natale pour venir dans ce pays neuf, afin que le règne du Christ s'étende. Le vaste mouvement missionnaire du dix-septième siècle trouverait ici une application particulière, avec cette ville-centre. Ville-Marie, point de départ des envois en pays autochtone et lieu d'accueil des autochtones convertis.

Les circonstances historiques ont donné beaucoup de pouvoir à nos devanciers : pouvoir spirituel, intellectuel, et même administratif. Nous ne pouvons oublier le sous-titre du livre récemment publié à notre sujet : Une histoire de pouvoir et de discrétion. Cette discrétion, parfois imposée par les circonstances, ne serait-elle pas aussi en lien avec l'intuition de départ?

Ce pouvoir se voulait comme un service. Qu'il ait grisé l'un ou l'autre au passage, c'est bien possible. La nature humaine demeure la nature humaine... Mais, c'est l'extension du Règne du Christ qui demeurait le but ultime de ces hommes, dans toutes leurs entreprises.

Le monde actuel a bien réduit ce pouvoir: celui des Prêtres de Saint-Sulpice et celui de toutes les institutions d'Église. Et si c'était pour nous l'occasion de découvrir où réside le vrai pouvoir?

La liturgie d'aujourd'hui nous présente un bien étrange trône royal: la Croix. N'ayons pas peur d'entrer dans ce paradoxe, pour y découvrir ce que le Seigneur veut nous faire comprendre.

Qui sera le premier sujet de ce Royaume? Qui sera le premier à reconnaître Jésus comme Roi? Un dissident, un marginal, un bandit! Les experts en religion ricanent, les représentants du pouvoir civil, les soldats romains se moquent de lui. Mais un homme a de grandes intuitions.

Celui qu'on appellera ensuite le "bon larron" est fini, comme son compagnon de crucifixion mais, en plus, il est lucide. Il a mérité ce qui lui arrive. Mais ce troisième, crucifié au milieu d'eux comme par accident, il ne peut pas être un libérateur quelconque, qui leur permettrait d'échapper au châtiment mérité. S'il est sauveur, c'est d'une tout autre façon. Laquelle, notre ami ne le sait pas trop, mais il est capable de formuler une prière ouverte, qui laisse au Seigneur le choix de son action libératrice: "Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne." En d'autres termes: "Jésus, il me semble que tu nous as donné tant d'exemples de ta bonté. Ça ne peut pas finir bêtement comme ça, sur la croix. Tu es sûrement en chemin pour autre chose, pour ce monde meilleur que tu nous as laissé entrevoir par tout ton enseignement et ton action. Tu es tellement bon, que je pense qu'il peut même y avoir une place pour moi dans ce monde meilleur que je ne mérite pas, mais où il me semble que tu m'aspires par ta bonté. Je te fais totalement confiance." Et nous connaissons la réponse de Jésus: "Aujourd'hui, avec moi, tu seras dans le paradis."

C'est Jésus Serviteur qui triomphe du haut de la croix et qui nous montre le chemin un chemin plein d'imprévus, mais pas de mauvais tours. De l'imprévu de son amour, qui trouve des solutions à des situations apparemment sans issue.

Si nous entrions dans le détail des 350 années d'histoire de Saint-Sulpice au Canada, nous trouverions des hauts et des bas, des succès, des erreurs…. Ce fut surtout pour nous l'occasion de nous émerveiller devant la foi audacieuse de nos devanciers.

Nous sommes prêts à nous mettre au service du Royaume de Jésus aujourd'hui, assurés que son Esprit nous donnera la même audace, la même espérance, pour choisir les humbles chemins du service. Il nous les a montrés, et il continue à nous les montrer.

Amen.


<<  | index des homélies | >>