HOMÉLIE DU 13 AOÛT 2006
19e dimanche du temps ordinaire

PAROISSE SAINT-THOMAS
Memramcook (Nouveau-Brunswick)

Président de l'assemblée:
Mgr André Richard, c.s.c.

Apocalypse (11, 19a; 12, 1-6a. 10ab)
Corinthiens (15, 20-27a)
Saint Luc (1, 39-56)

Frères et soeurs dans le Christ,

Il est beau, ce chant de la Vierge Marie; il est plein de joie et d'émerveillement. C'est clair qu'il vient d'une personne comblée. Marie prévoit même que toutes les générations la diront bienheureuse. De fait, depuis les premiers siècles de l'Église, les chrétiens, avec joie, disent du bien de Marie, parce qu'elle a cru à l'annonce de Dieu et parce qu'elle y a répondu, comme elle le pouvait, déjà bénie de Dieu. Saint Luc raconte comment la cousine Élizabeth, elle aussi, a été comblée de joie par la visite de Marie. C'était assez pour faire réagir le bébé qu'elle portait en elle. C'est la fête, pour les personnes de ces familles. Dans la joie aussi, nous fêtons la Vierge Marie élevée au ciel, par un don spécial de Dieu. Il l'a exaltée à cause de la mission qu'elle a reçue, celle de donner au monde un Sauveur, le Christ Jésus, Fils de Dieu et Fils de l'Homme. Encore aujourd'hui, les croyants disent que Marie est bienheureuse d'avoir cru à la promesse de Dieu et d'avoir accepté de donner naissance au Fils de Dieu.

Marie est proclamée bienheureuse à d'autres titres. Elle est l'étoile, la «star» du peuple acadien, sa patronne. Il y a 125 ans, le peuple acadien tenait sa première convention nationale. C'était du jamais vu pour eux, à ce moment-là. Voici qu'un peuple dispersé se rassemble pour affirmer qu'il existe, qu'il se souvient de ses origines et qu'il entend prendre sa place parmi les nations. En 1881, des représentants acadiens viennent ici, à Memramcook, pour se donner des leaders et des signes distinctifs de leur identité. C'est seulement trois ans plus tard que seront choisis le drapeau distinctif, le tricolore français avec l'étoile dorée et l'hymne marial comme chant national. À la première convention, les délégués choisissent leur patronne, la Vierge de l'Assomption. C'est une figure féminine, un symbole de foi, un modèle glorifié après avoir connu la bassesse d'une servante. On peut trouver dans ce choix bien des motifs et bien des valeurs. Il paraît tout naturel de penser que les autres versets du chant de Marie parlaient aussi au coeur des délégués acadiens. «L'amour du Seigneur s'étend d'âge en âge sur ceux qui le craignent. Il élève les humbles. Il comble de biens les affamés... Il relève son serviteur, il se souvient de sa promesse.» La sensibilité religieuse du 19e siècle était différente de celle d'aujourd'hui, mais les symboles ne mentent pas. Ils évoquent une communauté de vie et d'aspiration qui n'a pas dû échapper à Mgr Richard et aux délégués à cette convention historique.

Au 21e siècle, qu'est-ce que les symboles religieux disent sur notre identité? Cela fait un peu vieillot. Quand tous ne partagent pas la foi catholique et ressentent un certain malaise alors que foi et patriotisme sont intimement liés, on recherche d'autres expressions de notre identité, comme peuple. Cela n'a pas encore été découvert, me semble-t-il. Mais nous cheminons dans un monde en pleine évolution, avec d'autres expressions de notre culture qui ne manque pas de richesse. Nous n'avons pas fini de découvrir le mystérieux projet de Dieu sur nous, individuellement et collectivement. Il se déploie pourtant, à l'heure actuelle, de plusieurs façons. Le plan de Dieu apparaît dans la vigueur de notre jeunesse telle que vécue lors des Jeux d'Acadie, dans nos manifestations culturelles comme les festivals, dans les témoignages de foi et de solidarité des chrétiens comme les pèlerinages et l'action concertée pour la justice sociale et l'assistance aux nécessiteux. Celle qui a dit «oui» à Dieu et qui est proclamée bienheureuse par toutes les générations, Marie, n'a pas fini de veiller sur son peuple et de nous montrer les chemins du coeur. Elle qui a donné naissance au Fils de Dieu, Marie, verra bien à ce que, selon les mots de saint Paul, «le Christ remette son pouvoir royal à Dieu le Père, après avoir détruit toutes les puissances du mal.» Et selon la parole de l'Apocalypse: «Voici maintenant le salut, la puissance et la royauté de notre Dieu et le pouvoir de son Christ.»


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