Conflit étudiant : rentrée avortée dans plusieurs cégeps

Des policiers et des étudiants du Cégep de Rosemont se sont affrontés en matinée.
Prenez note que cet article publié en 2012 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Plusieurs collèges ont tenté en vain lundi de respecter les injonctions leur enjoignant de donner des cours aux étudiants.
C'est ainsi que les cours qui devaient reprendre au Collège de Rosemont après 10 semaines de grève ont finalement été annulés dans un climat de tension.
La direction de l'établissement, plutôt que de traiter individuellement chaque demande injonction, avait décidé d'imposer le retour en classe pour tous, malgré le vote majoritaire des étudiants pour la grève illimitée.
« Grève générale illimitée! » ont scandé les étudiants rassemblés devant l'établissement lorsqu'ils se sont fait expliquer la teneur des injonction, dont une ordonnait le libre accès au cégep.
Les policiers sont intervenus en matinée alors que des étudiants étaient massés devant une des portes de l'établissement. Selon des témoins, les policiers ont établi un couloir pour permettre aux étudiants de rentrer. La confrontation entre étudiants et policiers auraient débuté à ce moment-là.
D'après la police, un étudiant a été légèrement blessé dans l'échauffourée et conduit à l'hôpital par mesure de sécurité.
Richard Landry, président du Syndicat des professeurs du Collège de Rosemont, a été témoin des événements. « Il y avait un attroupement d'étudiants devant la porte, très calmes, immobiles, sans aucune agressivité, et tout à coup, sans aucune raison apparente, les policiers ont chargé, matraques en l'air. Plusieurs ont reçu des coups au visage, un est parti en ambulance avec la tête bandée, j'ai vu des gens qui saignaient de la bouche : c'était très très violent », a-t-il déclaré.
Des étudiants opposés à la grève ont déploré le contexte dans lequel le retour en classe avait été ordonné et la confrontation de la matinée. « Je ne veux pas rentrer dans ces conditions-là. Pour moi, c'est impensable de voir que mes camarades de classe se font matraquer dans des conditions où il n'y a aucune confrontation », a déclaré l'une d'elles. « On va battre la grève dans la démocratie, en vote dans une assemblée générale », a dit un autre.
À ce jour, sept injonctions pèsent sur le Collège Rosemont. Les trois plus récentes lui demandent d'offrir la prestation de services pour les étudiants.
Le syndicat des professeurs dit avoir prévenu la direction que, à la lumière de ce qui se passait dans d'autres collèges, un retour forcé risquait d'entraîner des accrochages.
La directrice générale de l'établissement, Patricia Hanigan, a dit regretter ce qui s'était produit. Elle a expliqué la décision de l'établissement en parlant d'une « main tendue aux étudiants qui voulaient terminer leur session ».
Différents cégeps, différents scénarios
Au Collège Lionel-Groulx, à Sainte-Thérèse, aussi sous le coup d'une injonction, la direction a demandé à la police d'ouvrir un chemin pour permettre aux étudiants d'entrer, après 12 semaines de grève. Les étudiants qui voulaient reprendre les cours se sont heurtés aux opposants, et les cours ont dû être annulés.
« C'est le temps que la session recommence et qu'on aille à l'université à la prochaine session », a déploré l'un des élèves en faveur de la reprise des cours. « Ce n'est pas un conflit qui doit être judiciarisé, ça, c'est unanime », a dit un autre élève.
« L'éducation doit être une transmission de savoir dans des conditions propices, mais en ce moment, on n'a pas les conditions propices », a soutenu Sébastien Gendron, qui enseigne la chimie dans l'établissement. « Et le conflit, jamais ne se réglera par des injonctions », a-t-il ajouté.
Le Collège Édouard-Montpetit a aussi décidé de lever les cours « en raison de l'impossibilité d'assurer la sécurité des personnes et la protection des biens matériels ». Une cinquantaine de personnes s'étaient présentées en matinée dans l'espoir de retourner en classe, après 10 semaines de grève.
À Gatineau, toutefois, les 4500 étudiants du Cégep de l'Outaouais sont retournés en classe, à l'issue d'un vote serré tenu la semaine dernière. « C'est bon de savoir qu'on n'aura pas perdu toute notre session », se réjouissait un étudiant. D'autres ne partageaient pas cet avis. « Je suis très déçu parce qu'on a donné raison au gouvernement », disait un autre.
Des étudiants en faveur de la grève contestent d'ailleurs le résultat du vote, évoquant des fraudes électorales. Ils font circuler une pétition pour réclamer la tenue d'un nouveau vote, qui nécessite 100 signatures. Ils en auraient déjà recueilli 800.
Le ministre Fournier se prononce sur les injonctions
Interrogé sur l'inefficacité des injonctions, le ministre de la Justice, Jean-Marc Fournier, a indiqué que « le droit qui existe est celui d'aller aux cours et non pas celui de bloquer les portes »
« Ce sont l'Assemblée nationale et ses lois, ce sont la justice et ses ordonnances qui ne sont pas respectées par ceux qui bloquent les portes, qui prétendent à une légitimité basée sur la déresponsabilisation. », a-t-il déclaré lors d'un point de presse lundi.
Il a affirmé que le gouvernement mettait tout en oeuvre pour faire comprendre que « ceux qui veulent suivre leur cours ont le droit de le faire et que ceux qui s'y opposent ne doivent pas entraîner la perte du droit des autres. »
Quand une journaliste a évoqué une crise sociale, M. Fournier a expliqué qu'il y a « des élections qui amènent des membres de l'Assemblée nationale à adopter des lois. Et c'est le politique qui fait le juridique, et la société, on s'attend généralement qu'elle suive ce juridique et ce politique. Il n'y a pas un autre politique qui serait la démocratie de la rue. Ça n'existe pas dans notre société. », a conclu M. Fournier.
Manifestation devant un immeuble gouvernemental

L'immeuble Montval baricadé
Photo : BAHADOR ZABIHIYAN
Par ailleurs , la police a chargé une centaine de manifestants qui étaient massés devant un immeuble de Longueuil où se trouvent des bureaux du gouvernement provincial.
Selon notre journaliste Bahador Zabihiyan, plusieurs personnes ont été aspergées de poivre de Cayenne.
Après cette intervention, les manifestants se sont dispersés.
La manifestants étaient présents depuis tôt dans la matinée devant l'édifice gouvernemental pour en bloquer l'accès.