Sarkozy adoucit le ton
Nicolas Sarkozy et Jean Charest
Photo : AFP / Pool/Philippe Wojazer
Prenez note que cet article publié en 2009 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Le président français répond à la lettre des chefs souverainistes, qui déploraient ses déclarations sur les indépendantistes. Il affirme que tous les Québécois ont une place particulière dans le coeur des Français.
Le président français, Nicolas Sarkozy, a répondu à la lettre de protestation que lui avaient adressée Pauline Marois et Gilles Duceppe à la suite de sa déclaration sur la souveraineté du Québec, lors de la remise de la Légion d'honneur au premier ministre, Jean Charest.
Dans leur lettre de protestation envoyée le 5 février dernier, les deux chefs souverainistes reprochaient au président français d'avoir dénigré les souverainistes québécois et d'avoir une mauvaise perception du mouvement indépendantiste québécois, à qui il reprochait d'être sectaire et refermé sur lui-même.
Tout en rappelant au président Sarkozy qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait dans le passé qualifié de la sorte le projet souverainiste québécois, Mme Marois et M. Duceppe lui ont souligné que plus de deux millions de Québécois ont voté pour cette option lors du dernier référendum.
Changement de ton
Le président de la République française change de ton dans la lettre de réponse qu'il a adressée aux deux chefs de parti le 9 février, et qui vient d'être rendue publique. Il affirme que, depuis son élection, il a entrepris de refonder la relation franco-québécoise en lui donnant un nouvel élan et en élargissant le champ de la coopération. Il voudrait que cette nouvelle relation se développe « en harmonie avec la relation que la France entretient avec le Canada dans son ensemble ».
Il insiste aussi sur l'importance de la « communauté d'action » pour faire avancer les projets communs au Québec et à la France, tout en spécifiant que les filiations politiques importaient peu dans le coeur des Français. Une vraie lettre de Saint-Valentin, pourrait-on dire.
Tous les Québécois, dans la diversité de leurs engagements et de leurs opinions, tiennent une place particulière dans le coeur des Français. Ce lien si profond qui nous unit, fondé sur le respect, la fraternité et la francophonie, constitue notre trésor commun... C'est ce trésor que je voudrais, avec tous les Québécois, promouvoir et valoriser davantage encore.
Réactions partagées
La porte-parole de l'opposition en matière de Relations internationales et de la Francophonie, la députée péquiste Louise Beaudoin, est très satisfaite de la réponse de M. Sarkozy, surtout que les souverainistes, dit-elle, n'attendaient pas de réponse à leur lettre.
« Et voilà qu'arrive une réponse qui n'était pas demandée. Elle est bienvenue parce qu'elle tranche radicalement avec le ton et les propos et les mots qui avaient été utilisés par le même président Sarkozy. [...] Donc c'est un grand changement de ton. J'ai été agréablement surprise », dit-elle.
Il y a de l'apaisement dans ce ton nouveau employé. Visiblement M. Sarkozy ne veut pas couper les ponts avec quelque Québécois que ce soit, fût-il indépendantiste.
À la sortie de la Chambre des communes, à Ottawa, le leader parlementaire du Bloc québécois, Pierre Paquette, a dit que le ton de la lettre de M. Sarkozy était « fraternel ». Mais dans un communiqé émis par le parti, il apporte des bémols à « la communauté d'action englobant la France, le Québec et le Canada », dont parle le président français.
« [...] Une telle communauté d'action est tout à fait possible dans certains dossiers, comme la diversité culturelle ou le libre-échange. Cependant, sur bien des questions, les intérêts du Québec et du Canada ne coïncident pas, ce dont le Canada fait trop souvent fi sur la scène internationale. Au Bloc Québécois, nous sommes persuadés que le président français, qui vante la relation unique France-Québec, sera sensible à cette réalité », a écrit Pierre Paquette.
Pour Benoît Pelletier, ancien ministre des relations-fédérales de Jean Charest, rien dans cette lettre ne permet de penser que le président a changé d'opinion sur la souveraineté du Québec, qu'il rejette, dit-il.
Le président tente vraisemblablement de calmer le jeu, mais il ne rectifie pas ses propos. Il ne corrige pas ses propos.
Le constitutionnaliste, qui enseigne maintenant à l'Université d'Ottawa, n'a toutefois pas apprécié que le président qualifie les souverainistes de sectaires, il y a deux semaines.
« Non, moi je n'étais pas à l'aise. Je trouvais que ça ne décrivais pas bien le mouvement souverainiste québécois, ni dans le fond, ni dans l'ensemble, le mouvement nationaliste québécois ».
Au bureau du premier ministre, on ne fait pas de commentaire.
Bien qu'ils aient pris connaissance de la réponse du président Sarkozy en début de semaine, les chefs du Parti québécois et du Bloc, Pauline Marois et Gilles Duceppe, n'ont pas réagi publiquement à la lettre.
Avec les informations de La Presse canadienne