Ruée vers les urnes
Prenez note que cet article publié en 2008 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Les électeurs démocrates votent en nombre record dans les 34 États qui permettent de le faire par anticipation. Selon des analystes, 30 % des électeurs pourraient voter avant le 4 novembre.
Les électeurs démocrates se pressent aux urnes en nombre record dans plusieurs des 34 États qui permettent le vote par anticipation, indiquent les plus récentes données officielles.
Il s'agit là d'un revirement de tendance clair: le vote par anticipation favorise traditionnellement les républicains, notamment parce que les personnes âgées, plus susceptibles de voter pour le Grand Old Party, en étaient les principaux bénéficiaires. En 2000 et en 2004, par exemple, les gens qui ont voté par anticipation ont appuyé le président Bush dans une proportion d'environ 60 %.

Des électeurs attendent pour voter à Savannah, en Georgie.
Photo : AFP / Stephen Morton/Getty Images
Cette année, il semble que l'enthousiasme des électeurs enregistrés comme démocrates est tel que cet État de fait ne tient plus. Barack Obama a contribué à cette situation: il invite depuis longtemps ses partisans à profiter du vote par anticipation pour éviter qu'ils ne se découragent devant de longues files d'attente le jour du vote.
Son organisation a d'ailleurs été bâtie en conséquence, indique le New York Times. Les bases de données mises sur pied par son équipe recensent les électeurs les plus susceptibles de rebrousser chemin devant de longues files d'attente le 4 novembre, dont ceux qui doivent faire de longs trajets pour aller voter et ceux qui ont des enfants. Ces électeurs sont encouragés à voter par anticipation.
Des données qui favorisent Obama
Tous les États qui ont recours au vote par anticipation ne compilent pas les données sur l'affiliation politique des électeurs. Mais la plupart des États-clés dans le cadre de cette élection le font d'une manière ou d'une autre, et les données favorisent M. Obama.
La situation est particulièrement frappante en Caroline du Nord, un État traditionnellement républicain. Plus de 480 000 électeurs ont déjà voté: 56 % d'entre eux se déclarent démocrates, 27 % républicains et 16 % sont non affiliés.
En Iowa, les chiffres sont similaires. Quelque 200 000 bulletins de vote ont déjà été déposés dans les urnes, dont 52 % par des électeurs démocrates, contre 20 % pour les républicains.
Les chiffres favorisent aussi les démocrates au Nouveau-Mexique (55 % - 35 %) et en Ohio (46 % - 24 %), un État sans l'appui duquel aucun candidat républicain n'a pu accéder à la présidence dans l'histoire du pays.
En Floride, 785 000 ont voté depuis lundi: 47 % d'entre eux sont républicains, 39 % sont démocrates et 11 % sont indépendants. Au Colorado, les républicains sont plus présents dans les bureaux de vote (40 % contre 38 % pour les démocrates).
La popularité du vote par anticipation ne se dément pas en Georgie non plus. Environ 800 000 personnes y ont voté par anticipation jusqu'ici, soit davantage qu'en 2004, et les électeurs ont encore une semaine pour se présenter aux bureaux de vote.
La tendance est telle que des analystes prévoient maintenant que 30 % des électeurs pourraient avoir déjà voté lorsque les bureaux de scrutin ouvriront leurs portes le jour de l'élection, le 4 novembre.
En 2004, 22 % des Américains avaient voté par anticipation, une proportion qui représentait déjà une forte augmentation par rapport aux 16 % des électeurs qui s'étaient prévalus de cette option quatre ans plus tôt.
Les responsables locaux de l'organisation électorale ont contribué à ce phénomène. Plusieurs voient dans le vote par anticipation une manière d'éviter des maux de tête le jour du vote. La majorité des États qui permettent le vote par anticipation ne demandent d'ailleurs aucune justification aux électeurs.
Qui plus est, les endroits où les Américains peuvent aller voter se sont multipliés au fil des années. Des électeurs peuvent maintenant voter dans des centres d'achats, des campus universitaires, voire voter depuis leur auto, comme on achète de la nourriture dans les chaînes de restauration rapide.
Selon Andrew Kohut, du centre Pew, la popularité accrue du vote par anticipation pose un sérieux problème à John McCain, qui tire de l'arrière dans les sondages. « S'il y a un sursaut de dernière minute en raison d'un événement, eh bien, le train a déjà quitté la gare pour beaucoup d'électeurs », note-t-il en entrevue au Times.
Gare aux conclusions hâtives
Les électeurs enregistrés comme démocrates ou républicains ne sont pas obligés de voter pour le candidat de leur parti, mais il semble évident qu'une majorité le font bel et bien. Un sondage d'ABC/Washington Post publié cette semaine a révélé que les électeurs voulant voter par anticipation favorisaient le sénateur Obama par 26 %. Cette proportion baissait à 7 % chez ceux qui comptaient attendre le 4 novembre pour voter.
« Les choses sont différentes cette année », a expliqué Paul Gronke, du Early Voting Information Center, sur les ondes de Voice of America. « Les Afro-Américains de la Georgie votent à un rythme qui dépasse celui des prochaines élections par 10 %. Les démocrates de la Caroline du Nord le font à un rythme deux fois plus élevé qu'il y a quatre ans. »
Selon Michael MacDonald, un expert en élection de l'Université George Mason, en Virginie, la surreprésentation d'électeurs démocrates et d'Afro-Américains favorise bel et bien M. Obama, mais cela ne veut pas dire qu'une déroute est à prévoir pour John McCain. « Ces gens sont excités, ils savent déjà pour qui ils vont voter », a-t-il déclaré à Politico. « On ne sait toutefois pas clairement s'il s'agit d'une poussée initiale ou si c'est une base sur laquelle ils pourront construire ».
Un analyste de l'American Enterprise Institute, John Fortier, abonde dans le même sens. Il faut se garder, a-t-il déclaré à Voice of America, de sauter aux conclusions. « Je crois que c'est dû à l'organisation du clan Obama et c'est peut-être un indicateur de l'enthousiasme qui règne côté démocrate. Je suis néanmoins prudent. Si tous vos électeurs votent par anticipation et qu'il n'en reste plus pour le jour de l'élection, ça revient au même. »
MM. MacDonald et Gronke croient néanmoins que les chiffres actuels pourraient faire en sorte que le taux de participation atteigne un niveau record le 4 novembre. M. MacDonald s'attend à ce que ce taux dépasse celui de 64 % atteint en 1960. Le cas échéant, dit-il, ce pourrait être l'élection la plus courue depuis 1908, alors qu'environ 66 % des Américains ont voté.
Avec les informations de Bloomberg, New York Times, Politico, Voice of America et BBC