Émission 227

Le mardi 5 novembre 2002

 


Économies d'énergie :
une promesse irréalisable




Imaginez qu'on frappe à votre porte pour vous offrir un nouvel appareil qui va réduire de 80 pour cent vos coûts de chauffage. On vous garantit même, par écrit, dix ans d'économie d'énergie. Vous allez au moins prendre le temps d'écouter le vendeur.

Un couple de la région de Vaudreuil a fait plus qu'écouter : il a acheté ce nouvel appareil nommé UCE, pour ensuite découvrir qu'il s'agissait de…



Les faits

En juin 2000, un couple de travailleurs autonomes achète un duplex pour consolider leur avenir financier. Et pour diminuer leur frais de chauffage, ils se font installer un an et demi plus tard une «UCE», une unité de conservation énergétique.

«C'était alléchant à quelque part, parce que si on regarde la mensualité pour payer l'UCE et puis notre dépense d'huile, ça "s'autopayait" tout seul.»

Grâce à ce nouveau système, l'entreprise garantit une consommation hivernale maximale en mazout de 209,40 $ et ce, pour les dix prochaines années. Une garantie que le commerçant s'engage d'ailleurs à mettre par écrit. De plus, la compagnie promet de rembourser toute consommation excédentaire de mazout.

Or le jour de l'installation de l'appareil, le vendeur se présente chez le couple avec une lettre contractuelle incomplète : ni la durée de 10 ans ni l'excédent de consommation ne sont spécifiés. Vu l'absence de ces clauses, le couple refuse de signer le contrat.


Le commerçant accepte finalement d'ajouter les deux clauses au contrat. Le couple demeure tout de même perplexe :
«Je me suis dit, ça vaut quoi ça maintenant?»

Selon maître Michel Brisebois, les clients n'ont aucune raison de s'inquiéter en signant ce contrat, car ils sont doublement protégés : «L'article 42 de la Loi de la protection du consommateur est clair en ce sens que toute déclaration verbale ou écrite faite par un représentant d'un commerçant ou d'un fabricant lie ce commerçant ou ce fabricant». De plus, «L'article 17 de la Loi sur la protection du consommateur nous dit que dans le cas d'un doute ou d'une ambiguïté, les dispositions du contrat doivent être interprétées en faveur du consommateur», ajoute Me Brisebois.

 

L'unité de conservation énergétique est installée en novembre 2001 mais déjà au début de l'hiver, le couple doute des formidables économies de chauffage :

Tout compte fait, leur facture de chauffage de l'hiver dernier n'était pas de 209 $ comme promis, mais bien de 1385$!


L'avis d'un spécialiste

La consommation de mazout, évaluée à 209,40$ pour toute la période hivernale, «est impossible à réaliser» pour ce duplex, estime Éric Vezaine, spécialiste de thermopompes.

La Facture a demandé à celui-ci d'évaluer le fameux appareil qui est, selon le représentant de la compagnie, encore plus performant qu'une thermopompe. Le spécialiste, lui, n'en croit pas un mot : «Une UCE, unité de conservation énergétique, est en fait une thermopompe bien standard. UCE: j'appellerais ça plus un logo de vente, une forme de nouveau nom, un style marketing pour vendre le produit».

Une mauvaise surprise…

Le spécialiste estime que la capacité de la thermopompe (soit 2,5 tonnes) n'est pas suffisante pour ce type de bâtiment.
Résultat : le compte d'électricité du couple a doublé l'hiver dernier.


Deuxième surprise désagréable : il s'agirait d'un appareil de moindre qualité: «Le compresseur est enfermé dans un petit boîtier métallique (en raison du bruit qu'il génère). Généralement quand on voit ça, c'est qu'il s'agit d'un compresseur bas de gamme», explique le spécialiste.


Quels sont les prix du marché?

Le spécialiste estime que les clients auraient pu payer moins cher, en magasinant un peu leur thermopompe : «Environ 1500 à 2000 dollars de moins», estime M. Vezaine. Question d'avoir l'heure juste, l'équipe de La Facture a consulté trois marchands du Grand Montréal. Or, les prix nous démontrent bien que le couple aurait été agréablement surpris en magasinant :

* Par exemple, chez Industrie Métropole inc., un modèle de base équivalent se vend à 5 233 $, taxes incluses.

* Le couple a choisi de payer leur thermopompe en dix ans. Avec les intérêts, le coût de l'appareil totalise près de 12,800 $.


En calculant, le couple a constaté qu'il commencerait à faire des économies d'énergie au bout de 15 et 20 ans. Or, «La thermopompe a une durée de vie moyenne de 10 à 15 ans», indique M. Vezaine. «L'appareil sera donc hors d'état avant qu'ils ne réalisent les économies promises».

«On se sent dupés parce que c'était une économie d'énergie qu'on achetait. C'était une réduction beaucoup plus importante que ça, en économie d'huile.» - affirme madame.

En conclusion…

Lors du tournage de ce reportage en septembre, la compagnie avait coupé la communication avec le couple. La consommation excédentaire de mazout de l'hiver dernier n'avait pas encore été remboursée comme le stipule le contrat. La direction de l'entreprise a refusé de nous accorder une entrevue. Quant aux clients, ils tiennent fermement à ce que toutes les clauses de leur contrat soient respectées.

«On va aller jusqu'au bout, on a droit aux 10 ans. Ils vont nous rembourser chaque année. (…) On va se battre, ça va faire partie aussi de notre retraite. Quand on se bercera sur le perron, au moins, on aura la satisfaction d'avoir été jusqu'au bout.»

Depuis la fin de notre enquête, le dossier a évolué. La compagnie semble reconnaître la validité du contrat puisque le couple a paraphé un règlement à l'amiable avec celle-ci. Les clauses de ce règlement demeurent toutefois confidentielles.


Hyperliens pertinents :

Le chauffage et le refroidissement à l'aide d'une thermopompe
(Comment fonctionne-t-elle?; Bien comprendre les thermopompes; Comparaison des coûts de chauffage, etc.)
Ressources naturelles Canada

Office de la protection du consommateur


Option consommateurs





 


 

 

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