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REPORTAGE
— 2004-03-30

ADO PORNO.COM: SOS SOLUTIONS

«C'est ce que je dis très souvent aux parents: "Vous mettez vos enfants au monde, vous voulez leur inculquer de belles valeurs, mais Internet est en train de leur inculquer d'autres valeurs, et c'est à vous d'intervenir pour que vos valeurs priment sur celles qu'on essaie de leur inculquer sur le Net".»
- Louiselle Roy, Réseau éducation média


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Que font nos jeunes exactement sur Internet? Très difficile d'aborder la question avec eux. D'ailleurs, 80 % des enfants avouent mentir à leurs parents sur la véritable utilisation qu'ils font d'Internet. Consommation massive de pornographie dégradante à faire rougir leurs parents, séances de webcam sexuelles plus qu'explicites où ils se permettent à peu près tout.

Peut-on arrêter la dérive? Comment intervenir? Quelles solutions existent? Un reportage pour adulte, à regarder en compagnie de vos jeunes, avant qu'il ne soit trop tard.

En octobre dernier, Enjeux diffusait un reportage sur les adolescents et la pornographie qu'on trouve sur Internet, reportage qui a suscité de nombreuses réactions de parents scandalisés par les pratiques clandestines de nos adolescents. La sexologue Jocelyne Robert dit avoir rencontré des parents bouleversés par ce qu'ils ont vu dans le reportage:

«La question qu'ils se posaient était: "Est-ce que vraiment, nos adolescents, le mien chez-moi, est en contact avec cette pornographie épouvantable?" Les gens avaient besoin d'être rassurés. "Qu'est-ce qu'on fait avec ça? Comment on intervient? Est-ce que ça se passe chez nous sans que je ne le sache?"»
- Jocelyne Robert, sexologue

 

Les parents avaient d'abord été scandalisés par le témoignage de ce jeune garçon, Félix, qui nous avait démontré avec quelle facilité les jeunes acceptaient de se livrer, avec de parfaits inconnus, à des jeux sexuels sur le web. En se faisant passer pour une jeune fille prête à tout, Félix réussissait, en quelques minutes seulement, à convaincre des garçons de se déshabiller devant leur webcam. Des adolescents, dans le plus grand secret, se livrent tout bonnement aux caprices d'internautes rencontrés au hasard.

Kazaa est certes un des logiciels de prédilection des adolescents. Il sert, en principe, uniquement à télécharger de la musique ou des jeux vidéo, aux dires de nos jeunes. Mais selon Bruno Guglielminetti, expert en nouvelles technologies de l'information et des communications, le problème avec ce logiciel est qu'il permet de trouver de tout, pas seulement de la musique.

Alexandre, 20 ans, a passé son adolescence, comme bien des jeunes, à surfer sur Internet. C'est un monde qu'il connaît beaucoup mieux que nous, adultes.

«Il peut y avoir de la pédophilie, de la zoophilie, des femmes enceintes, n'importe quoi. Vraiment, il n'y a aucun contrôle, il y a de tout. Tu peux penser à n'importe quoi, c'est sur Kazaa ou sur le Net.»
- Alexandre

Selon lui, Kazaa est présentement le programme le plus utilisé pour télécharger de la musique, mais on peut aussi, grâce à lui, se procurer des images, des fichiers audio, des films et des programmes quelconques. Une simple vérification sur l'ordinateur vous permettrait de constater rapidement la véritable utilisation que font vos enfants de ce logiciel.

 

 

«Quelqu'un qui dit n'avoir jamais vu de porno en surfant sur le Net, c'est un menteur.»
- Alexandre

Gervais Ouellette dirige l'unité de cybersurveillance de la Sûreté du Québec, chargée d'enquêter sur les crimes commis sur Internet. Il affirme que les parents ont une part de responsabilité dans ce que font leurs enfants sur Internet:

«Les parents, malheureusement, ne s'impliquent pas dans ce dossier, en se disant que c'est un peu compliqué, Internet. Ils devraient s'impliquer davantage.»
- Gervais Ouellette, Sûreté du Québec

Selon lui, il y aurait beaucoup de barvardoirs où les enfants se retrouvent et discutent de thèmes sexuels. Quant aux jeunes qui s'exhibent devant une webcam, il rappelle qu'ils ne sont pas toujours conscients que le film sera toujours disponible. Dans 30 ans, il risque d'être encore disponible sur les moteurs de recherche ou les systèmes d'échange qu'on trouve sur le web.

D'ailleurs, ces vidéos, desquelles on tire des milliers et des milliers de photos et qui transitent ensuite vers d'autres serveurs du type de Kazaa, viennent alimenter chaque mois des sites pornographiques.

Cette réalité a amené Félix à nous contacter et à dénoncer ces pratiques sexuelles, devenues banales pour plusieurs adolescents qui ne réalisent souvent pas les risques auxquels ils s'exposent.

«L'adulte qui se fait passer pour un autre, il a sa responsabilité, mais l'adolescent, il est pleinement, du moins il est en partie conscient que ça pourrait être une autre personne.»
- Félix

Nombreux sont les ados dont l'ordinateur est muni d'une webcam. Quelle est l'utilité de celle-ci et pourquoi l'a-t-on installée? Selon Gervais Ouellette, «dans plusieurs cas, pour ne pas dire dans la majorité des cas, ça tourne autour du mot sexe».

Ce qui peut être encore plus troublant, c'est que plusieurs adolescents qui clavardent sur des forums finissent par se déplacer pour aller rencontrer l'individu avec lequel ils ont discuté via Internet. Gervais Ouellette rappelle qu'il y a des règles de sécurité qui s'appliquent, autant sur Internet que dans la vie réelle.

«Si l'enfant se déplace à l'extérieur, il devrait, en tout temps, aviser son parent et se présenter avec lui lors de sa première rencontre.»
- Gervais Ouellette, Sûreté du Québec

Il raconte qu'un père, tout en demeurant à distance, s'est présenté avec sa fille lors d'une de ces rencontres planifiées via le web. Sa fille devait rencontrer dans un parc un dénommé Jean-François, âgé de 17 ans. Finalement, il en avait 47. Lorsque le père est intervenu, l'homme en question s'est sauvé en courant.

Les parents s'intéressent généralement à ce que font leurs enfants dans la vie de tous les jours. Il devrait en être de même en ce qui a trait à leurs activités sur Internet. Les parents ne doivent pas hésiter à poser des questions sur leurs pratiques:

«Il faut que le parent s'assoie avec le jeune et lui demande: "Montre-moi ce que tu fais", parce que dans la vie, les parents savent en général où vont leurs enfants, et avec qui ils y vont. C'est le même principe sur Internet: "Montre-moi ce que tu fais sur Internet, avec qui tu parles", parce qu'il y a quand même toutes ces salles de clavardages, les messageries, où ils rencontrent plein de gens. Et puis "Montre-moi les sites que tu trouves intéressants".»
- Louiselle Roy, Réseau éducation média

Toutefois, la réalité est toute autre. Laissés à eux-mêmes, sans encadrement, les jeunes adoptent des comportements qui choqueraient n'importe quel parent. Les habitudes de nos jeunes sur les sites de clavardage ont de quoi troubler. N'importe qui peut consulter leur vie personnelle dans les moindres détails. Si, par exemple, on enseigne aux enfants dès leur jeune âge à se méfier des inconnus dans la rue, il nous a suffi, sur Internet, de quelques minutes pour découvrir la véritable identité de jeunes filles qui clavardent dans les bavardoirs. Des adolescentes qui, en plus de confier les détails de leur vie personnelle, parlent ouvertement de leur sexualité avec n'importe qui.

«C'est ce que je dis très souvent aux parents: "Vous mettez vos enfants au monde, vous voulez leur inculquer de belles valeurs, mais Internet est en train de leur inculquer d'autres valeurs, et c'est à vous d'intervenir pour que vos valeurs priment sur celles qu'on essaie de leur inculquer sur le Net".»
- Louiselle Roy, Réseau éducation média

Certaines adolescentes vont même jusqu'à pratiquer une forme virtuelle de prostitution où, en échange d'argent et de cadeaux, elles acceptent de s'afficher nues, seules ou en groupe. Dans ces mêmes bavardoirs, d'autres jeunes à peine plus âgés disent sans aucune culpabilité abuser de filles complètement ivres, des pratiques ressemblant à celles qu'on retrouve sur certains sites pornos, avec des scènes tournées dans des universités aux États-Unis, et même à Montréal.

La porno sur le Net a explosé au cours des dernières années: 260 millions de pages ont été répertoriées, une augmentation fulgurante de 1800 % depuis 5 ans. Une industrie qui, par toutes sortes de moyens, fournit à nos ados de la porno tout à fait gratuitement afin de les amener à devenir de futurs consommateurs payants. Pas moins de 9 adolescents sur 10 avouent fréquenter les sites pornographiques. Une porno présente partout sur la toile, au point de perturber la vie de nos enfants plus jeunes qui, dans leurs recherches scolaires, tombent par accident sur ces sites. Une situation à laquelle on peut partiellement remédier en installant un filtre, comme l'explique Louiselle Roy: «un filtre bloquera certains sites qui offrent des contenus inappropriés, mais tout filtre peut être désactivé. Combiné avec la surveillance des parents, le filtre, surtout pour les enfants de moins de 11-12 ans, peut offrir une certaine sécurité.»

Il existe aussi des moyens de vérifier ce que les jeunes font à l'ordinateur, repérer les films téléchargés et les sites web visités. Des moyens qui ont toutefois leurs limites, car l'adolescent qui s'y connaît le moindrement peut effacer ces preuves de l'ordinateur. Les parents dépourvus peuvent aussi consulter le site WebAverti pour tenter de trouver des solutions et contrer le problème:

«Sur WebAverti, on retrouve deux éléments particuliers. Le premier étant les bonnes choses qu'Internet peut offrir aux jeunes. On suggère par exemple de bons sites, de bons sites pour les enfants, des logiciels de filtrage que les parents peuvent utiliser. Et le 2e aspect, c'est un peu les enjeux que les jeunes peuvent rencontrer lorsqu'ils se promènent sur Internet. On parle de publicité, de dépendance à Internet, de pornographie, des prédateurs sexuels sur Internet, entre autres.»
- Louiselle Roy, Réseau éducation média

S'il n'existe aucun outil vraiment efficace pour suivre son adolescent à la trace et observer son usage réel d'Internet, certains outils sont plus intéressants que d'autres, comme par exemple celui de MSN 8, qui permet de voir à qui l'ado a envoyé des courriels, avec qui il a clavardé, quels sites il a visités, bref, d'avoir une idée de ces activités sur Internet.

Mais filtre ou pas, il n'en demeure pas moins que les jeunes qui naviguent sur Internet sont constamment incités à consommer, ou pire, à participer au tournage de scènes pornographiques. Une porno gratuite distribuée largement sur les sites fréquentés par de nombreux adolescents en quête d'images et de clips à sensation. Des vidéos autrefois disponibles uniquement sur le marché noir et qui ne peuvent toujours pas être trouvées dans un club vidéo, encore moins être diffusées à la télévision, mais qui peuvent être visionnées dans le confort du foyer par notre ado.

Quelles que soient nos inquiétudes, Internet est là pour rester, et prendra plus de place dans la vie de nos enfants. Les solutions ne peuvent venir uniquement des fournisseurs de service ou de la technologie, des policiers débordés ou des écoles. Pour l'instant, la plus simple des solutions serait d'éviter d'installer l'ordinateur dans la chambre de notre enfant et de le superviser lorsqu'il navigue sur le Net.

«La pornographie sur Internet cause des blessures irréparables à notre plus grande ressource, nos enfants.»
- Theodore B. Olson, Procureur général des États-Unis


Journaliste: Michel Vincent
Réalisateur: Jean-Claude Le Floch

 

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