HOMÉLIE DU 22 MARS 2009
4e dimanche du Carême B

BASILIQUE-CATHÉDRALE MARIE-REINE-DU-MONDE
Montréal, Québec

Président de l'assemblée :
M. le Cardinal Jean-Claude Turcotte

Chroniques (36, 14-16.19-23)
Ephésiens (2, 4-10)
Saint Jean (3, 14-21)

Chers amis,

La célébration des 40 ans d'existence de La Maison du Père nous invite à nous rappeler d'où vient cette Maison et dans quel esprit elle a été fondée. En 1969, Mgr Paul Grégoire était archevêque de Montréal depuis un an. Conscient que le nombre des itinérants augmentait sensiblement d'année en année dans la ville, il se mit à rêver d'une maison qui saurait les accueillir et les aider à « retrouver leur dignité ». Alors qu'il se demandait encore comment réaliser son projet, un prêtre de son diocèse – Guy Laforte – vint frapper à sa porte pour lui demander d'aller travailler comme missionnaire dans un bidonville d'Argentine. Mgr Grégoire lui proposa de devenir aumônier des itinérants de Montréal. L'abbé Laforte réfléchit quelque temps et accepta.

Après avoir pris le temps de s'approcher des itinérants et d'examiner concrètement quelle était leur situation à Montréal, il présenta son projet à son archevêque : J'aimerais former un petit groupe de clochards qui auraient comme travail de s'occuper de leurs frères clochards... Chez moi, je veux qu'ils retrouvent une raison de vivre en prenant conscience qu'ils peuvent être encore utiles. Je ne veux surtout pas mettre sur pied une oeuvre charitable qui ne ferait qu'entretenir leur misère... Je veux aider ces hommes à devenir responsables. L'Abbé Laforte trouva dans le sud de la rue Saint-André, une maison de quatre étages qui répondait à ses attentes. En 1970, la rénovation de cette maison était terminée. Les itinérants qui venaient s'y réfugier l'appelaient « La Maison du Père », en pensant non pas à Dieu le Père mais au Père Laforte qui s'y trouvait pour les accueillir.

Au cours de ses quarante ans d'existence, l'oeuvre de La Maison du Père – qui est une oeuvre du diocèse de Montréal – a évolué pour répondre à de nouveaux besoins. L'objectif poursuivi est cependant demeuré le même : aider l'itinérant « à retrouver sa dignité », « l'aider à devenir responsable ». Orienté vers cet objectif, La Maison du Père offre aujourd'hui quatre types de séjour : un refuge pour une nuit, des séjours en chambre et pension, une résidence pour itinérants âgés et des studios de réinsertion d'hébergement. Il met aussi à la disposition des itinérants plusieurs autres services : service de fiducie, suivi psychosocial, informations et références diverses, aide au logement, communications avec la famille, accompagnement à l'hôpital et à la cour, aide pour l'obtention de divers papiers, fourniture de vêtements propres... et cette liste n'est pas exhaustive.

Le 40e anniversaire que nous célébrons présentement est pour moi l'occasion de remercier très sincèrement tous ceux et celles qui rendent possible le maintien d'une oeuvre dont la nécessité est reconnue par tous dans la ville et dans le diocèse de Montréal. Je remercie les employés, les divers conseillers et intervenants psychosociaux, les nombreux bénévoles, les religieux trinitaires liés à La Maison depuis longtemps. Je remercie également les membres de l'administration et à tous les donateurs du secteur public ou privé. Sans eux, sans ses nombreux amis, La Maison du Père, qui a une mission sociale et chrétienne, ne pourrait survivre. Le fait que nous célébrions aujourd'hui une messe pour fêter les 40 ans de La Maison du Père n'est pas sans signification particulière. Ce fait témoigne en effet que la foi chrétienne a été à l'origine de la fondation de La Maison du Père et qu'elle continue de l'inspirer.

Nous venons d'entendre une page de l'évangile de Saint Jean qui proclame l'amour de Dieu pour l'humanité entière : « Dieu a tant aimé le monde, qu'il (lui) a donné son Fils unique ». Et ce Fils, tout au long de sa vie, a été le témoin d'un amour divin qui n'exclut personne, qui va à la recherche de ceux qui sont mis à l'écart, qui est sensible à toute souffrance, à toute blessure, à toute honte. Il a été le témoin d'un amour qui console, encourage, éclaire, pardonne, relève et ouvre des chemins d'espérance. Le témoignage de l'amour du Fils unique de Dieu a été si radical et si profond qu'il s'est exprimé jusque sur la croix qui est le signe du plus grand amour. Jésus l'a affirmé : « Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis ». Ce n'était pas qu'une belle formule. Il a effectivement été élevé sur la croix, de même qu'autrefois « le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert ».

J'établis volontiers un lien entre ce que le Christ a accompli en venant sur terre et ce que s'efforce de réaliser La Maison du Père dans notre milieu. La Maison du Père est un témoin de l'amour. Un témoin de l'amour que tout être humain doit avoir à l'égard d'un autre être humain, mais aussi un témoin de cet amour qui prend sa source en Dieu, qui s'est manifesté en Jésus et dont l'Église doit être le signe. Merci à tous ceux et celles qui permettent à La Maison du Père d'exister. Et que Dieu soit loué pour ce qui s'accomplit ici de beau, de grand et de généreux.

Que La Maison du Père demeure encore longtemps ce qu'elle a toujours voulu être et a toujours été « une lueur d'espoir pour les plus démunis ».

Amen.

<<  | index des homélies |  >>