HOMÉLIE DU 3 FÉVRIER 2008
4e dimanche du temps ordinaire

PAROISSE SAINTE-ANNE
Sainte-Anne-de-Prescott (Ontario)

Président de l'assemblée :
Doris Laplante, C.Ss.R.

Sophonie (2, 3;3, 12-13)
Corinthiens (1, 26-31)
Saint Matthieu (5, 1-12a)

En cette fin de semaine précédant l'ouverture du Carême, la liturgie nous invite à méditer les béatitudes. Ce ne sont pas les commentaires qui manquent sur ce texte tant aimé. La biographie est immense; on a presque tout écrit et même son contraire.

Pour nous livrer les béatitudes, Jésus monte sur la montagne. On peut penser ici à Moïse qui est monté sur la montagne pour recevoir la loi de Dieu. Ici, Jésus monte avec ses disciples, il nous invite tous et toutes, il nous invite à toutes les semaines à gravir la montagne, à venir à l'église, pour recevoir la loi de la nouvelle Alliance. Et cette loi est comme une musique, la musique des béatitudes.

Heureux! La béatitude se distingue de la bénédiction. La bénédiction est une formule efficace qui produit ce qu'elle exprime. Regardons l'exemple de la bénédiction d'Isaac à son Jacob : « Que Dieu te donne la rosée du ciel et les gras terroirs, froment et vin en abondance! Que les peuples te servent, que des nations se prosternent devant toi! (...) Béni soit qui te bénira! » (Gn 27, 27-29)

Tandis que la béatitude est plutôt le constat d'une situation. En ce sens, elle est différente du souhait : déclarer heureux les pauvres de coeur est beaucoup plus fort que dire : « je souhaite que les pauvres puissent être heureux ». Bref la béatitude se rapproche des félicitations.
Félix = félicitations vous les pauvres
Beatus = bienheureux vous les pauvres

En prononçant les béatitudes, Jésus aidait et aide toujours ses disciples à nommer des réalités profondes de la vie. Jésus parle de bonheur à réaliser dès maintenant et à espérer dans l'avenir. Qui de nous n'aspire pas au bonheur? Être le plus heureux possible sur la terre? Ce que Jésus énonce, ce sont des réalités qu'on apprécie lorsqu'on les vit dans le quotidien: pauvreté du coeur; douceur, justice, miséricorde, pureté, paix. Ce sont des valeurs que nous désirons retrouver dans nos milieux de tous les jours, et pour lesquelles nous voulons nous engager à promouvoir.

Mais en même temps Jésus se trouve à dénoncer des situations qui interrogent notre responsabilité personnelle et collective. Il promet en effet le bonheur à ceux et à celles qui pleurent, aux personnes qui ont faim et soif de justice, à celles qui sont persécutées. Ne sommes-nous pas tous les jours témoins de cas où des gens sont accablés par l'aridité de la vie, par la maladie, par la mort, par l'échec d'un projet de vie? Nous engageons-nous réellement et concrètement envers ces gens?

Le bonheur premier de Jésus est sa présence en chacun de nous : « Heureux les pauvres de coeur ». Cette expression désigne ceux et celles qui ont découvert en leur vie la présence du Seigneur qui les aime sans condition, malgré leurs fausses notes. Et cette prise de conscience de notre pauvreté, loin de diminuer nos capacités et nos qualités personnelles, nous amène à trouver en Dieu la richesse la plus importante de l'existence : son amour inconditionnelle.

Entendre encore et encore que la joie réside dans la miséricorde plutôt que dans la rancune, dans la douceur plutôt que dans la violence, dans la pureté du coeur plutôt que dans l'escroquerie, dans la recherche de la paix plutôt que dans la division, dans le respect plutôt que dans l'intolérance, nous motive à agir, à nous engager dans notre bonheur, mais aussi dans le bonheur de notre monde, dans le bonheur de nos frères et soeurs.

En ce dimanche, nous sommes invités à reconnaître une autre béatitude, la béatitude de la musique. Même si Jésus a déjà prononcé neuf fois le mot « heureux », je voudrais le prononcer une dixième fois en faveur de personnes que l'on oublie bien des fois dans nos célébrations, ceux et celles qui portent le ministère de la musique et du chant. Car Dieu se laisse rejoindre dans une belle pièce de musique, dans un beau chant bien rendu, dans un bel accompagnement qui soutient... Dieu se retrouve dans tous ces petits bonheurs que sont ces petites notes qui meublent nos célébrations et nous savons très bien le trouver... Tellement, que nous aimons nous procurer de ces « cd » de ces musiques et de ces chants qui nous ont fait trouver Dieu, ce Dieu qui nous comble de son bonheur. Nous nous les procurons pour que notre bonheur hebdomadaire se poursuive quotidiennement tout au long de la semaine.

Alors je profite de cette occasion pour remercier tous ces musiciens et chantres, solistes et chorales, de nos célébrations. J'ose même leur dire : « Heureux vous qui donnez de votre temps, de votre talent, pour nous aider à nous approcher de Dieu, pour nous aider à ouvrir notre coeur pour qu'il puisse y déposer son bonheur et que nous puissions le savourer davantage ».

Par vous, toute eucharistie devient source de bonheur pour beaucoup d'entre nous. Elle devient une note que nous entendons le dimanche et qui se prolonge en point d'orgue pour notre semaine. Car toute eucharistie est la note du pain de la Parole proclamée, la note du Pain eucharistique partagé, la Note chantée en Église militante d'ici bas qui s'unit à l'Église triomphante du ciel; Église formée de tous les anges et de tous les saints qui proclament sans fin le bonheur éternel à lequel nous aspirons tous.
Merci.

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