HOMÉLIE DU 20 JANVIER 2008
2e dimanche du temps ordinaire

BASILIQUE CATHÉDRALE
Notre-Dame d'Ottawa

Président de l'assemblée :
Mgr Terrance Prendergast, S.J.

Isaïe (42, 1-4, 6-7)
Actes (10, 34-38)
Saint Matthieu (3, 13-17)

Dans le récit de Matthieu, un élément attire notre attention : la conversation qui précède le baptême, entre Jean le Baptiste et Jésus.

Pour l'évangéliste et ses lecteurs – donc pour nous – le point central est non pas le baptême lui-même, mais bien ce qui se produit au moment du baptême.

Dans l'église primitive, plusieurs furent préoccupés du fait que Jésus ait été baptisé par Jean. Comment Jésus aurait-il pu se soumettre à un rite qui laisse entendre qu'Il ait besoin de repentir? Que se passe-t-il?

Parmi les évangélistes, seul Matthieu aborde le problème.
Les premiers mots du récit de Matthieu indiquent la détermination de Jésus manifestée par son départ de la Galilée et sa venue au Jourdain. L'évangéliste remarque que Jésus s'est approché de Jean de façon délibérée afin
« de se faire baptiser par lui ».

En d'autres termes, Jésus avait déjà décidé de se faire baptiser alors qu'il était encore à Nazareth.

Jésus n'allait pas être dissuadé par les protestations de Jean : « C'est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c'est toi qui viens vers moi » Jean reconnaît que Jésus lui est supérieur et il tente de renverser les rôles. Lorsque Jésus parle pour la première fois dans l'Évangile, il assume la direction de Son baptême.

Lorsque Jésus répond au Baptiste qu'il désire se soumettre au baptême de Jean – « Pour le moment, laisse-moi faire; c'est de cette façon que nous devons accomplir parfaitement ce qui est juste » – nous entendons pour la première fois deux thèmes qui reviennent sans cesse dans l'histoire de Jésus selon Matthieu : « accomplissement » et « justice » ou « droiture ».

« Accomplir » signifie faire, exécuter, et se réfère habituellement à la volonté de Dieu. Ici, ça veut dire que Jésus et Jean coopèrent au baptême voulu de Dieu pour Son Fils. Et « justice » fait allusion aux bons rapports entre l'homme et Dieu, entre humains.

Fondamentalement, donc, « accomplir parfaitement ce qui est juste » signifie accomplir pleinement la volonté de Dieu. Telle est la tâche de Jésus tout au long de son ministère : il nous a montré, à nous ses disciples, comment nous sommes appelés à vivre. Une fois cette leçon de Jésus apprise, nous, ses disciples, nous aspirons à le faire de la façon la plus complète et la plus parfaite possible.

Mais revenons à la question : pourquoi Jésus devait-il être baptisé par Jean? Au long des siècles, saints et savants ont tenté de répondre à cette question de toutes sortes de manières.

Ce n'est pas parce qu'Il était pécheur, bien qu'aujourd'hui certains auteurs suggèrent cette réponse.

Ce n'est pas non plus dans le seul but de s'identifier au mouvement du Baptiste, même si Dieu avait lancé son appel à tout Israël par l'entremise de Jean et que Jésus voyait de son devoir religieux de répondre à cet appel.

Comme certains le pensent, il est plus exact de croire que par Son baptême, Jésus a fait montre de solidarité avec le peuple dans le besoin.

Voyez-vous, le Messie, tout comme le Serviteur de Dieu dont parle Isaïe, était vu comme la personnification d'Israël. De sorte qu'en s'identifiant pleinement au peuple de Dieu, Jésus vit son rôle dans l'obéissance et il reçoit l'onction de l'Esprit afin de mener à terme sa mission.

Cette mission met Jésus sur le chemin qui le conduira à la mort sur la croix. Telle sera l'expression la plus complète de son identification à l'humanité pécheresse.

En tant qu'agent de Dieu qui mènera le Royaume à sa pleine manifestation. Jésus symbolise la force et l'autorité dignes du Fils de Dieu et du Fils de David.

Cependant, l'évangile de Matthieu nous montre Jésus humble et obéissant, qui accomplit la description du serviteur (souffrant) de Dieu annoncé par Isaïe.

« Il ne criera pas, on n'entendra pas sa voix sur la place publique. Il n'écrasera pas le roseau froissé; il n'éteindra pas la mèche qui faiblit » (texte retrouvé au chapitre douze de Matthieu (12, 18-21).

Les autres acteurs divins du drame sont suggérés par les cieux qui sont déchirés – l'action de Dieu le Père – et la présence de « l'Esprit de Dieu (qui descend) comme une colombe et (vient) sur lui ».

Le symbole de la colombe a été interprété de maintes façons. Parmi les sens les plus plausibles, on trouve le début d'une nouvelle création en Jésus ou la fin du temps du jugement (proclamé par Jean).

Alors que les évangélistes. Marc et Saint Luc présentent la voix venant du ciel qui s'adresse à Jésus (la voix du ciel dit : « Tu es mon Fils ») (cf. Marc 1,11; Luc 3,22), dans la version de Matthieu entendue aujourd'hui, le témoignage du Père est objectif et s'adresse à nous : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en lui j'ai mis tout mon amour. »

La voix de Dieu qui descend directement du ciel avec autorité, enseigne à l'Église de tous les temps. Cette formule devient importante pour nous qui enseignons à nos enfants. Elle devient une formule que nous professons comme disciples croyants : Jésus est celui qui a reçu l'Onction de Dieu, le Fils du Dieu vivant.

Dans la même veine, la deuxième lecture tirée des Actes des Apôtres nous présente Pierre qui proclame notre conviction en tant que croyants et croyantes: lors de son baptême, « Dieu l'a consacré par l'Esprit Saint et rempli de sa force. Là où il passait, il faisait le bien, et il guérissait tous ceux qui étaient sous le pouvoir du démon. Car Dieu était avec lui. »

Nous aussi, nous qui sommes venus de plusieurs pays de tous les continents du monde, nous avons reçu le sacrement du baptême. Par lui, nous sommes devenus un en Jésus Christ. Demandons l'inspiration du Saint Esprit afin de toujours revêtir l'esprit du Christ et d'être unis les uns aux autres.

Au moment de recevoir l'Eucharistie, qui nous aide à devenir ce que nous sommes – le Corps du Christ -, prenons la résolution d'aller comme Jésus, faisant le bien, à la louange et la gloire de Dieu notre Père.

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