Pour
améliorer le traitement de la scoliose, une équipe
de chercheurs a mis au point un logiciel 3D qui permet
non seulement de reproduire parfaitement la colonne
vertébrale d'un patient mais également
de tester différents patrons d'intervention chirurgicale
avant de réaliser la véritable opération.
La médecine à l'heure de l'informatique
de pointe.
Jessika a 15 ans et souffre de scoliose,
une déviation de la colonne vertébrale
qui affecte surtout les adolescentes. La majorité
des cas de scolioses sont légers, mais celui
de Jessika est sérieux et il a fallu intervenir.
Heureusement, huit mois après l'opération,
son dos a repris une position presque normale.
Redresser une colonne vertébrale
aussi déformée que celle de Jessika est
un travail difficile même pour un chirurgien orthopédiste
expérimenté comme le Dr Hubert Labelle,
de l'hôpital Sainte-Justine. Des implants et des
tiges sont utilisés pour redonner une forme la
plus normale possible à la colonne. Dans un deuxième
temps, on procède à une greffe osseuse,
c'est-à-dire qu'on dépose de l'os à
l'endroit où on a placé des instruments
afin qu'il se fasse une fusion des vertèbres.
Tous les gestes que pose un chirurgien
peuvent avoir des conséquences à long
terme sur la mobilité du patient. C'est d'ailleurs
le principal défi des spécialistes de
la scoliose. Comment choisir parmi les nombreux scénarios
possibles celui qui servira le mieux l'intérêt
des patients?
EIl existe une solution; un puissant
logiciel 3D. À partir d'images extrêmement
précises de la colonne vertébrale d'un
patient, cet outil informatique permet au chirurgien
d'insérer virtuellement des implants dans toutes
les vertèbres et sur toutes les faces de la colonne.
Puis l'ordinateur évalue l'impact des interventions
et indique le résultat sur la posture du patient.
Ce
logiciel créé par l'équipe de Carl-Éric
Aubin, un chercheur de l'École Polytechnique
de Montréal, membre du Groupe de recherche sur
les déformations neurosquelettiques, est maintenant
en phase finale de développement. Il fonctionne
de la manière suivant; pour obtenir des images
précises à quelques millimètres
près, on assemble les données obtenues
à partir de trois radiographies auxquelles on
ajoute de l'information sur la flexibilité de
la colonne du patient. Avec le résultat, M. Aubin
croit que les chirurgiens seront en mesure d'améliorer
leurs stratégies d'interventions. Le logiciel
va également réduire les variabilités
dans les interventions de différents chirurgiens.
Une autre recherche menée par
l'équipe de Carl-Éric Aubin pourrait amener
les chirurgiens encore plus loin dans le traitement
de la scoliose. Le projet est encore jeune, mais il
est prometteur. Il s'agit d'une salle d'opération
virtuelle. Ce programme de simulation permettra de créer
un environnement visant à opérer un cas
de scoliose, que ce soit un cas connu ou créé.
À l'aide d'une commande manuelle
et de lunettes 3D, on peut manipuler et installer des
implants sur un patient virtuel. À mesure que
l'intervention progresse, l'ordinateur effectue les
corrections nécessaires à la colonne vertébrale.
Les concepteurs du programme de simulation croient qu'il
sera surtout utile aux jeunes médecins qui ont
peu ou pas d'expérience en salle d'opération.
Mais avant d'en arriver là, le Dr Labelle aide
les chercheurs à raffiner le modèle afin
de répondre aux exigences de l'enseignement.
Son prochain souhait : intégrer à la simulation
la sensation tactile qui lui fait défaut pour
le moment. Ensuite, il restera finaliser le logiciel
3D et le mettre à l'épreuve. Durant la
prochaine année, on l'offrira donc à une
cinquantaine de chirurgiens nord-américains.
Pour les jeunes filles comme Jessika, la recherche
de pointe sur la scoliose est une excellente nouvelle.
Elle va permettre d'améliorer considérablement
le traitement et, donc, de réduire les effets
secondaires. L'avenir est prometteur.
Dr Hubert Labelle : « Lorsque l'instrument
sera validé, que je serai convaincu qu'on peut
reproduire très adéquatement et précisément
le comportement d'un patient, ce sera une étape
nécessaire dont je ne me passerai pas. C'est
une étape beaucoup plus avancée (...),
un saut dans une autre époque. »