Le
séquençage du génome humain
est terminé. Il y a deux ans, les scientifiques
avaient annoncé en grande pompe le brouillon
du génome. Maintenant, ils possèdent
la copie complète, la copie au propre des
trois milliards de lettres responsables de notre
hérédité. La molécule
de l'ADN a beau avoir livré toutes ses lettres,
elle garde encore bien des mystères.
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Cela fait quinze ans
que les scientifiques travaillent au projet génome
humain. Son but : séquencer une à
une les trois milliards de lettres qui se cachent
dans notre ADN et qui forment le patrimoine génétique
de l'humanité. Le projet génome humain
est terminé. Nous possédons maintenant
la copie complète, la copie au propre de
notre génome. Et au cours des dernières
années, l'ADN nous a réservé
bien des surprises.
L'une
d'elles, c'est le nombre de gènes. On a cru
longtemps qu'on avait 100 000 gènes.
On s'est rendu compte qu'on n'en possédait
environ que 30 000. À peine deux fois
plus que la mouche. Et ces 30 000 gènes
n'occupent que un pour cent du génome. C'est
bien peu.
Une autre surprise vient de la comparaison
avec les autres espèces. Surtout avec la
souris. La souris est une proche parente de l'humain.
Comme nous, c'est un mammifère. Les deux
génomes se comparent : à peu
près la même taille et environ le même
nombre de gènes. Selon les critères
de l'évolution, c'est une proche parente.
Les scientifiques ont découvert
qu'au cours de l'évolution de la souris à
l'humain, quatre pour cent du génome avait
peu changé. Et ce que l'évolution
conserve a toutes les chances d'être très
important. Les chercheurs sont friands de ces bouts
d'ADN que l'évolution protège. Ce
n'est pas sans raison. Ces morceaux ont un rôle
crucial à jouer pour que la vie continue.
De ces quatre pour cent que se partagent les souris
et les hommes, un pour cent concerne les gènes.
À quoi servent les autres trois pour cent?
De quoi intriguer les chercheurs!
« Maintenant,
on est capable d'identifier un autre trois pour
cent de notre génome qui semble être
très important. Il semble avoir un rôle
pour le contrôle. C'est comme un interrupteur.
Dans telles circonstances, [l'interrupteur] est
allumé, alors on va faire des protéines.
Dans d'autres circonstances, il va être fermé.
Mais il n'y a pas [qu'un seul interrupteur], il
y en a des centaines », explique
Tom Hudson. Ces interrupteurs moduleraient l'activité
des gènes. Et comme un gène peut fabriquer
plus qu'un type de protéine, ce sont ces
interrupteurs qui indiqueraient au gène la
version de la protéine à produire,
selon les besoins de la cellule. Ces nouveaux éléments
sont très précieux.
Quant aux 96 % qui restent,
on pense que 30 % auraient un rôle de
structure pour former les chromosomes, ou encore
un rôle à jouer lors de la division
cellulaire. Le reste, les deux tiers, seraient composés
de séquences qui ne servent à rien.
Dans les trois milliards de lettres de l'ADN, on
retrouve des bouts de gènes qui ont déjà
eu un rôle à jouer au cours de l'évolution
de notre espèce, mais plus maintenant. Ce
sont les vestiges d'anciens gènes.
On y retrouve aussi la trace de virus
aujourd'hui inactifs. Ces virus auraient contaminé
notre ADN il y a des millions d'années et
s'y seraient multipliés. Ils occupent beaucoup
d'espace, mais n'ont aucune utilité.
Même si le génome a
livré toutes ses lettres, il garde encore
bien des mystères. Ainsi, l'un des défis
est de comprendre l'action des gènes dans
les maladies. La technologie permet de voir l'activité
simultanée de milliers de gènes dans
une cellule. On peut faire ainsi le profil génomique
de chaque maladie et pointer du doigt les gènes
coupables. Toutes les grandes maladies sont en train
d'être revues à la lumière de
la génomique : cancer, asthme, parkinson,
alzheimer, diabète, leucémie.
Après
le projet génome humain, c'est au tour du
projet protéome humain de se mettre en branle.
Le projet génome humain nous a donné
un catalogue des gènes, le projet protéome
humain nous donnera le catalogue des protéines
que produisent les gènes.
De quoi occuper les chercheurs!
D'autant
plus qu'après l'ADN, d'autres molécules
des chromosomes suscitent l'intérêt
des scientifiques : les histones. Les chromosomes
sont formés d'un chapelet de petites billes.
Lorsqu'on s'approche, on s'aperçoit que chaque
bille est constituée d'un amas de minuscules
bobines, sur lesquelles s'enroule le fil de l'ADN.
Ces bobines, ce sont les histones. Elles sont constituées
de protéines dont les extrémités
varient énormément. On soupçonne
ces bouts de protéines d'avoir un mot à
dire dans l'expression des gènes. De quoi
révolutionner la génomique!
Le scientifique qui percera
le code des histones pourrait mériter un
prix Nobel. Même si le projet génome
humain est terminé, les chercheurs ne manqueront
pas de boulot.
Journaliste : Claude
D'Astous
Réalisateur : Pierre Tonietto
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