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REPORTAGE  —  2 mars 2003

 
Les déchets de l'espace

L'espace entourant la planète Terre est aujourd'hui recouvert de millions de déchets. Cette nouvelle forme de pollution est le fruit de 45 années d'exploration spatiale. Il y a d'abord les gros débris : à chaque lancement, une fusée laisse en orbite ses différents étages. Les petits débris se forment lorsque les étages se séparent, libérant de petits fragments de peinture, d'acier et des résidus de carburant.

Déchets inusités, déchets domestiques

D'autres déchets sont plus inusités. Malgré les nombreuses précautions, même les astronautes ont déjà laissé partir de volumineux objets : caméras, outils, etc. Les Soviétiques ont aussi vidangé leurs déchets domestiques par le « sas » arrière de la station MIR, directement dans l'espace. À chaque fois que la navette américaine s'approchait de MIR, elle devait naviguer entre ces déchets !

Quels sont les chances que tout ces débris nous tombent sur la tête ?


Un danger pour les terriens ?

Le 27 janvier 1997, un fermier du Texas a eu la surprise de sa vie, alors qu'un très large fragment est tombé sur son terrain, à quelques mètres de sa maison. Mais rassurez-vous : ce genre d'incident est très rare. Preuve à l'appui : une impressionnante désintégration du réservoir de carburant d'une navette a démontré que seulement 10 % des larges fragments survivent à la descente. Les trois quarts tombent à l'eau, et le reste dans des zones non habitées.



Le vrai danger se trouve dans l'espace

Le vrai danger est d'abord et avant tout dans l'espace, car ces déchets sont une menace pour la navette, les satellites, la station spatiale internationale et les astronautes. En 1996, à Fylingdales en Grande-Bretagne, un puissant radar de l'armée britannique a permis de démontrer comment un satellite a été frappé de plein fouet par un déchet de l'espace. Le mat de stabilisation du satellite militaire français Cerise a été coupé par un fragment, ce qui l'a rendu inopérant. Même si l'on croit qu'une vingtaine de satellites on subit le même sort, c'est la première fois qu'on a pu en faire la preuve. Ironiquement, le déchet était d'origine française, un débris de la fusée Ariane !


Collision : vitesse et énergie

Ces déchets sont de véritables bombes. Ils voyagent à des vitesses vertigineuses, à plus de 7 km par seconde. C'est en fait 250 fois plus rapide qu'une voiture qui circule à 100 km/h sur l'autoroute. L'énergie emmagasinée dans un petit fragment pourrait même faire exploser un satellite.

Une expérience de la Nasa le démontre bien : « Nous avons lancé une particule de cette taille, soit environ 6 millimètres, qui est allée se loger dans cette plaque d'aluminium. Nous pouvons voir le cratère qui s'est formé devant la plaque. En la tournant de l'autre côté, nous pouvons voir que beaucoup de matériel a été retiré de la surface de la plaque ».
- Justin Kerr, ingénieur, NASA


Fragmentation

Chaque collision engendre de nombreux fragments, créant un effet de cascade. Résultat : certaines orbites autour de la Terre voient leur quantité de déchets croître à une vitesse exponentielle. Il se crée plus de fragments que ce qui retombe par l'effet de la gravité. À la NASA, on mesure l'effet de dispersion des déchets lors d'une collision. On a découvert que les débris forment une bande étroite immédiatement après la collision. Avec le temps, les orbites de ces débris sont perturbées et finissent par former une coquille autour de la terre.


Surveillance de la NASA

La NASA et les autorités militaires n'ont pas d'autre solution que de suivre leur trajectoire à l'aide de puissants radars. Résultat : on a trouvé 100 000 objets dont la taille varie entre 1 et 10 centimètres, et 10 000 autres qui ont plus de 10 centimètres.

« Tout objet, peu importe son origine, est une menace pour un engin spatial si son diamètre est de un centimètre ou plus. » - Nicholas Johnson, scientifique en chef et gestionnaire de programme, Orbital Debris program Office, NASA


Explosion de Columbia : est-ce la cause ?

C'est une des hypothèses présentement à l'étude pour expliquer l'explosion de la navette Columbia le premier février 2003. Après chaque mission, les navettes reviennent toujours avec des impacts de tout petits déchets sur la surface des carlingues et sur les fenêtres. Les sorties des astronautes dans l'espace posent aussi un risque pour leur vie. La navette leur sert maintenant de bouclier, car on la déplace dans la direction des principaux déchets !


La station en péril

Mais l'engin le plus à risque demeure la station spatiale internationale. Des petits déchets ont déjà heurté sa carlingue, sans jusqu'à maintenant causer de dommages. Dans le but de résoudre le problème, les chercheurs de la NASA ont mis au point des plaques d'aluminium qui pulvérisent les débris, ainsi qu'un système de protection composé de fines couches de céramiques. Les parties les plus vulnérables de la station orbitale ont été recouvertes de ces différents types de protection.

Mais un débris de plus de 10 centimètres pourrait pénétrer et dépressuriser les compartiments habités de la station. Les astronautes devraient alors sortir de la station et boucher le trou à l'aide d'une plaque métallique.


Des solutions ?

Les solutions ne sont pas simples, car ramasser ou détruire ces déchets est impossible ! Certains satellites qui ont terminé leur vie utile ont été envoyés dans une orbite cimetière, là où la gravité terrestre ne risque pas de les faire retomber. Alors, doit-on réduire le nombre de nouveaux lancements ? Non, estime Ram Jamku, directeur de l'Institut de droit aérien spatial de l'Université McGill : « Ce qu'il faut faire, c'est modifier le design des lanceurs et des engins spatiaux de telle sorte qu'ils ne créent pas de débris inutilement. De plus, dès qu'un satellite est hors fonction ou qu'un lanceur a livré sa charge utile, il doit être conçu pour redescendre rapidement sur terre ».

L'avenir

Dans un siècle, on prévoit qu'il y aura cinq fois plus de gros débris, soit 50 000. Plusieurs projets de satellites de télécommunication tels que Irridium et Teledesic ajouteront à eux seuls des centaines de nouveaux déchets dans l'espace. Mais d'autres projets sont plus inquiétants : la sonde Cassini, lancée en direction de Saturne le 17 août 1999, avait à son bord 140 kilos de plutonium ! D'autres sondes à propulsion nucléaire sont prévues. Mais la source la plus inutile de pollution demeure celle de la compagnie américaine Celestis : elle envoie dans l'espace des urnes funéraires qui resteront en orbite des années, voire des décennies.

 

Pour en savoir plus :

NASA
Site officiel

Journaliste : Michel Rochon
Réalisatrices : Chantal Théorêt et Hélène Naud

 


 


 

 

 

 



Les astronautes ont déjà laissé partir de volumineux objets : des caméras, des outils...

Les Soviétiques ont aussi vidangé leurs déchets domestiques par le sas arrière de la station MIR, directement dans l'espace. À chaque fois que la navette américaine s'approchait de MIR, elle devait naviguer entre ces déchets.



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



« Nous n'avons pas créé ce problème seulement pour nous, mais également pour les générations futures : ces déchets ne sont pas là seulement pour des siècles, mais pour des milliers, et même des millions d'années. »

- Ram Jacku, professeur, Institut de droit aérien
et spatial,
Université McGill


 

 


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