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« Confusion » dans la mise en œuvre du régime canadien de soins dentaires

Outils de dentiste sur une table avec une chaise en arrière-plan.

Le régime canadien de soins dentaires doit couvrir notamment les services de prévention, de diagnostic et de chirurgie, y compris les radiographies, les plombages, les traitements de canal et les prothèses. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Jean-François Deschênes

Les premiers Canadiens pourront commencer à réclamer des services dentaires en vertu du nouveau régime d’assurance fédéral en mai seulement, mais déjà des aînés et des professionnels en soins dentaires sont inquiets et dénoncent un manque de cohérence dans le déploiement de celui-ci.

La mise en place du régime canadien de soins dentaires est une condition imposée par le Nouveau Parti démocratique (NPD) du Canada pour son appui au gouvernement libéral minoritaire lors de votes importants à la Chambre des communes.

Le gouvernement fédéral a dévoilé le fonctionnement du régime en décembre dernier et prévoit le rendre disponible à tous les Canadiens admissibles d’ici 2025.

Le déploiement du régime se fait par tranches d’âge. Les personnes âgées de plus de 87 ans – la première tranche d’âge admissible – devraient avoir reçu en décembre des lettres du gouvernement les invitant à faire une demande d’inscription.

Demandes d’adhésion au régime d’assurance fédéral de soins dentaires

Demandes d’adhésion au régime d’assurance en décembre 202349 726
Demandeurs jugés admissibles48 858
Demandes d’adhésion au régime d’assurance en janvier 2024505 884
Demandeurs jugés admissibles498 154

Source : ministère d’Emploi et développement social Canada

Le régime doit couvrir notamment les services de prévention, de diagnostic et de chirurgie, y compris les radiographies, les plombages, les traitements de canal et les prothèses.

Les personnes admissibles au régime doivent avoir un revenu familial inférieur à 90 000 $ et ne pas avoir accès à une assurance privée. Elles pourront commencer à faire des demandes de remboursement à la Sun Life en mai. Tous les rendez-vous ayant lieu avant ne seront pas couverts.

Une chaise de dentiste vide dans un bureau.

Des aînés et des professionnels en soins dentaires sont inquiets et dénoncent un manque de cohérence dans le déploiement du nouveau régime d’assurance fédéral de soins dentaires. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Marc-Antoine Lavoie

Il est important de coordonner avec les fournisseurs pour que les rendez-vous coïncident avec le début de la couverture, assurant ainsi l'éligibilité au remboursement, explique Lina Brault, du bureau des relations avec les médias d’Emploi et Développement social Canada.

La Sun Life a signé un contrat d’un peu plus de 746 millions $ avec le gouvernement fédéral pour l'administration du régime d’assurance dentaire jusqu’en 2029.

Confusion et rendez-vous annulés

L’Association des denturologistes du Québec (ADQ) s'indigne du fait que de nombreux clients ont annulé ou reporté leur rendez-vous depuis décembre pour pouvoir profiter de la couverture qui entrera en vigueur au printemps.

Il y a un engouement certain pour le régime, [...] des gens ont déjà retardé ou déplacé leur rendez-vous chez le dentiste, confirme Micheline Germain, présidente de l’AREQ. Ce regroupement de retraités anciennement syndiqués auprès de la Centrale syndicale du Québec (CSQ) compte plus de 60 000 membres.

Pour sa part, le député du Bloc québécois et porte-parole en matière de santé, Luc Thériault, observe qu’il y a pas mal de confusion. Il affirme que certains élus de la formation politique reçoivent chaque jour de 5 à 10 appels de citoyens à la recherche de réponses.

Les gens prennent des rendez-vous pensant qu’ils vont être couverts, des dentistes sont obligés de leur dire non.

Une citation de Luc Thériault, député du Bloc québécois et porte-parole en matière de santé

Ils ont manqué leur coup

Le président de l’Association des denturologistes du Québec estime que le programme d’assurance dentaire a été déployé à l’envers. Benoit Talbot croit que la Sun Life aurait dû permettre aux entreprises de confirmer leur participation avant de permettre à la population d’entreprendre son inscription.

Ne pouvant pas encore s’inscrire auprès de la Sun Life pour participer au programme, le denturologiste ne peut même pas accepter de rendez-vous de patients voulant bénéficier de l’assurance fédérale. On nous a donné ce programme-là comme ça, puis arrangez-vous avec, dit-il.

Ça a été fait en vitesse, ça a été fait un petit peu à l'envers.

Une citation de Benoit Talbot, président de l’Association des denturologistes du Québec

Même si on n'a pas de clients dans nos bureaux, on passe des heures au téléphone à expliquer à chaque individu comment fonctionne l’assurance fédérale, ajoute M. Talbot. Celui-ci aurait aimé que la population soit mieux informée par le gouvernement.

Des instruments utilisés par les dentistes.

Le déploiement du régime se fait par tranches d’âge. Les personnes âgées de plus de 87 ans – la première tranche d’âge admissible – devraient avoir reçu en décembre des lettres du gouvernement les invitant à faire une demande d’inscription. (Photo d'archives)

Photo : iStock

Des denturologistes risquent de cesser leurs activités

Le président de l’ADQ, Benoit Talbot, ajoute que de nombreux denturologistes voient leurs revenus nettement diminuer.

Les bureaux sont vides présentement. C'est ça le gros fléau.

Une citation de Benoit Talbot, président de l’Association des denturologistes du Québec

Il y a des bureaux qui vont probablement fermer, lance-t-il sans hésitation. T'as le téléphone à payer, l'Internet, le loyer, si t'as des employés – secrétaires, techniciennes – et il n’y a pas de clients, [il n’y] a pas grand monde qui peut survivre à quatre mois [comme ça], relate celui qui dirige une clinique à Gatineau.

Benoit Talbot est d’avis que la situation pourrait s’avérer particulièrement grave dans des régions situées à l’écart des grands centres urbains, comme la Côte-Nord ou la Gaspésie, où il y a déjà une pénurie de denturologistes.

Comment le programme fonctionnera-t-il au Québec?

L’arrimage du programme fédéral avec la couverture dentaire déjà offert au Québec – et administré par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) – soulève également des interrogations chez les aînés.

La présidente de l’AREQ, Micheline Germain, craint que les aînés soient coincés au milieu d’une bisbille entre les gouvernements fédéral et provincial, s’ils n’arrivent pas à s’entendre sur l’administration du régime ou les compensations financières. Elle souhaite que les besoins de la personne [passent] avant des divergences de politique provinciale fédérale.

Au Québec, bon, on est très frileux là-dessus sur les compétences provinciales [...] ça nous inquiète.

Une citation de Micheline Germain, présidente de l’AREQ

Le Bloc québécois estime qu’une partie de la confusion aurait pu être évitée si le gouvernement fédéral s’était entendu avec Québec avant de déployer le programme d’assurance.

Pourquoi donner ça à la Sun Life, un régime public d'assurance dentaire, alors que c'est la RAMQ qui gère ça au Québec? Plusieurs paliers qui gèrent un même programme, ça donne de la confusion, questionne Luc Thériault.

L’élu avance qu'il est essentiel d’éviter des dédoublements administratifs. Selon lui, la RAMQ a tout ce qu’il faut pour pouvoir gérer ce programme-là.

Le Bloc québécois presse d’ailleurs Ottawa de transférer l’argent pour que Québec puisse bonifier lui-même et administrer lui-même son programme.

Je ne vois pas comment on va pouvoir l'implanter correctement là, autrement que dans la confusion, s'il n'y a pas d'entente entre Québec et Ottawa.

Une citation de Luc Thériault, député du Bloc québécois et porte-parole en matière de santé

Pour sa part, le cabinet du ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, entend continuer à défendre les champs de compétence du Québec. Il répète que Québec a déjà un régime de soins dentaires qui fonctionne bien et qu’il est prêt à l’améliorer. La meilleure façon de le faire, c’est que le fédéral nous laisse gérer nous-mêmes notre programme, ajoute le cabinet.

On s’attend à une compensation financière, sans condition. Ça devra être une somme importante, à la hauteur des coûts du programme que compte instaurer le fédéral.

Une citation de cabinet du ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé

De son côté, le cabinet du ministre fédéral de la Santé, Mark Holland, défend sa démarche en affirmant qu’il s’agit du plus grand déploiement de prestations de l’histoire de notre pays. Le cabinet ajoute qu’afin de répondre à la demande prévue et d'assurer une expérience sans heurts, le [régime] est mis en œuvre grâce à une approche progressive qui s'étend sur plusieurs mois.

Avec la collaboration de Louka Jacques

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