Louise Richer : oui, l’humour et la télévision font bon ménage
Fondatrice et directrice générale de l’École nationale de l’humour (ENH) en 1988, Louise Richer livre ses pensées sur les liens tissés serrés entre l’humour et la télévision. Les deux cohabitent depuis longtemps, mais de mieux en mieux, surtout ces dernières années.
Le documentaire Louise Richer, fidèle en humour, qui retrace son parcours, sera diffusé sur ICI Télé le jeudi 4 janvier 2024 à 20 h, et sur ICI Tou.tv.
Des humoristes de toutes les générations y témoignent de son importance pour le milieu. Louise Richer sait donc de quoi il retourne quand on parle d’humour. Outre le fait de travailler avec les cohortes d’humoristes qui sortent de l’ENH, elle a aussi été la directrice artistique dans neuf galas (Olivier et Gémeaux) et productrice au contenu pour quatre Bye bye.
Celle qui est aussi comédienne pense que l’humour d'ici a une place particulière dans le cœur des Québécoises et des Québécois en raison de la langue. C’est aussi très culturel. Pour cette raison, l’arrivée de Netflix et compagnie a eu moins de conséquences sur ce milieu que sur celui de la télévision. L’effet a été plus notable sur l’humour anglophone canadien ou américain.
Une cohabitation harmonieuse
Louise Richer soutient que l’humour et la télévision cohabitent très bien et le font depuis un bon bout de temps, surtout dans les séries. Elle ajoute que l’humour se distille un peu partout à la télévision, et pas seulement dans les séries. On le trouve dans des émissions de variétés, comme celles de Marc Labrèche, et aussi dans des jeux télévisés.
La déclinaison est assez longue, l’humour peut être l’ingrédient principal, le cœur de l’émission, ou peut-être l’un des ingrédients.
Toutefois, elle souligne que l’argent n’a pas toujours été au rendez-vous. Dans les séries et les sitcoms, avant, les budgets étaient assez pauvres. On avait des murs en carton et des décors rudimentaires.
Finalement, c’est assez récent, il y a 12 ans environ, il y a eu plus de soins apportés à la fiction en comédie. On a vu évoluer le cadre des comédies dramatiques
, dit-elle en citant plusieurs exemples, notamment les séries Rumeurs, Mauvais karma et Lâcher prise, écrites par la scénariste Isabelle Langlois.
Le nombre de scénaristes qui font de la télévision, combiné avec des moyens de production plus substantiels, a relevé le niveau de ce qu’on peut maintenant voir.
Des humoristes qui écrivent pour la télévision
Un autre changement s’est opéré ces dernières années avec des humoristes qui écrivent pour la télévision. Louise Richer cite notamment Martin Petit avec Les pêcheurs, Martin Matte avec Les beaux malaises, Marc Brunet avec Like-moi et Les bobos, et plus récemment, François Bellefeuille avec Temps de chien.
Des humoristes qui sont des auteurs pour la scène, c’est une belle évolution.
L’importance du Bye bye
Évidemment, quand on parle d’humour et de télévision, on ne peut passer sous silence la grand-messe télévisuelle du 31 décembre qu’est le Bye bye. Cette revue de l’année humoristique est un classique dont la popularité ne se dément pas depuis plus de 50 ans (avec quelques années de pause).
C’est la messe annuelle qui rassemble beaucoup de monde devant le petit écran.
Pour avoir produit quatre Bye bye, Louise Richer souligne que c’est un gros défi qui entraîne automatiquement des critiques, et parfois des controverses, comme celle de 2008 qui, soutient-elle, a été entretenue par une guerre des médias.
L’effet Netflix négligeable
Louise Richer soutient que Netflix n’a pas le même effet sur le monde de l’humour que la plateforme américaine en a eu sur les séries, le cinéma et la chanson. Netflix a changé la donne pour les séries dramatiques, les conséquences sont énormes. L’humour n’a pas subi le même tort.
Elle soutient qu’au Québec, on s’identifie à l’humour québécois. Les gens qui veulent voir de l’humour québécois ne vont pas le voir sur Netflix, même si certains humoristes, comme Martin Matte, y ont eu de la visibilité. La compétition ne vient pas de Netflix.
Elle ajoute que les chaînes généralistes présentent des spectacles entiers appréciés de l’auditoire.
Par ailleurs, les humoristes peuvent offrir plus de représentations d’un spectacle. C’est moins lourd de se promener avec un show d’humour qu’avec un spectacle de musique
, explique Louise Richer.
Mais Louise Richer s’inquiète quand même pour l’avenir. D’abord en raison des baisses de budget, des manques de moyens pour produire des séries, puis de la fin des galas Juste pour rire, en 2023, qui étaient souvent présentés à la télévision. On va peut-être retrouver de moins en moins de spectacles et de galas télévisés. Ce déclin est à suivre
, dit-elle.
Elle termine en soulignant qu’un autre élément désespérant, selon elle, c’est l’écoute des plus jeunes qui est en chute spectaculaire. Heureusement, plusieurs humoristes utilisent les réseaux sociaux pour les atteindre avec succès.
Compléments :
- Le site du Bye bye 2023
- Regardez La revue culturelle 2023
- Que regarder à la télé cet hiver?
- La programmation du 31 décembre pour terminer l’année en beauté
- Regardez le spectacle Mille mauvais choix
- François Bellefeuille redevient vétérinaire, le temps d’une série
- Louise Richer, la marraine de l’humour au Québec