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Mon enfant reste sur le banc : que faire comme parent?

Trois jeunes joueurs de soccer de dos, assis sur un banc.

Voir son enfant au banc peut être difficile à accepter ou à gérer comme parent.

Photo : Getty Images / IStock/Matimix

Le sport, c’est la santé, dit l’adage. Tous les parents veulent voir leurs jeunes bouger. Malgré les bonnes intentions du début, l’expérience sportive des enfants peut parfois tourner au vinaigre.

Nous ne parlons pas ici d’abus, mais bien de situations délicates auxquelles plusieurs parents peuvent être confrontés. Nous avons exposé trois cas à six experts afin qu’ils nous proposent leurs pistes de solutions.

  • Sylvie Béliveau, directrice égalité des genres en sport à Égale Action
  • Sylvain Croteau, directeur général de Sport’Aide
  • Bruno Gervais, directeur des relations partenaires au Groupe Respect
  • André Lachance, conférencier et coauteur de Chimie d’équipe
  • Daphné Laurin-Landry, psychologue spécialisée en sport
  • Geneviève Leduc, conseillère principale aux programmes à Fillactive

Première situation : Mon enfant ou mon ado reste la plupart du temps sur le banc. Je le sens perdre confiance. Qu’est-ce que je peux faire?

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Il faut d’abord assurer une présence et une écoute auprès de l’enfant, nous dit Sylvain Croteau, au-delà de jouer au conducteur et au spectateur fanatique dans les estrades. Et ça commence tôt, bien avant qu’une telle situation survienne. Ouvrir la conversation pour mettre le jeune en confiance, quand vient le temps pour lui de se livrer.

Pour Geneviève Leduc, une chose demeure : un enfant sur le banc, c'est mauvais pour sa pratique d'activités physiques parce qu'il n'est pas en train de jouer. Il n'est pas en train de développer ses habiletés ni sa confiance en lui. Ça peut, souligne-t-elle, être une autoroute vers l’abandon.

Avant tout, nos experts le disent à l’unisson : l’important, c’est de poser des questions à l’enfant, et sans suggérer les réponses. En fait, éviter de faire de la projection, ne présumer de rien. Si nous sommes ennuyés par la situation de notre enfant, qui dit que lui n'est pas heureux ainsi?

Je ne veux pas transférer ma frustration à celle de mon enfant. Tous les enfants ne sont pas nécessairement prêts. Peut-être qu'au départ, être sur les lignes de côté, regarder, c'est suffisant pour un enfant en bas âge. On pourrait être surpris d'entendre l'enfant dire : "Ah oui, moi, j'ai aimé".

Une citation de Sylvie Béliveau, directrice égalité des genres en sport à Égale Action

Les adolescents non plus n’ont pas toutes les mêmes ambitions, indique André Lachance. L’idée, c’est de voir ce qui les motive à pratiquer leur sport ou leur activité.

Pour certains, c'est la performance, d'autres, c'est le social, d'autres, c'est le voyagement dans un tournoi, d'autres, c'est de travailler fort, peu importe ce que c'est. Peut-être que ça ne dérange pas l’enfant? C'est ça qu'il faudrait peut-être vérifier avant d'aller trop loin, insiste-t-il.

Si toutefois le jeune n’est pas à l’aise de nous en parler, c’est aussi de lui demander de quoi il a peur, suggère Daphné Laurin-Landry.

On peut lui demander : "Est-ce que tu as peur de la réaction de maman? Est-ce que tu as peur de ce que papa dise? Nous, on va t’accueillir, peu importe ce que tu as à nous dire. On veut que tu sois épanoui dans ton sport." C'est vraiment aller voir à l'intérieur.

Une citation de Daphné Laurin-Landry, psychologue spécialisée en sport

Ça m’est arrivé

L’ancien joueur de la Ligue nationale de hockey (LNH) Bruno Gervais a réchauffé le banc à toutes sortes de moments dans sa carrière, à la fois très jeune et plus vieux.

Habituellement, dans la grande majorité des cas, il y a des raisons derrière ça, lance-t-il. Il y a des moments où j'ai trouvé ça très difficile. Il y a des moments où je comprenais mieux.

Si le jeune fait part de sa déception, de sa tristesse ou de sa frustration et reconnaît qu’il en veut plus, le parent sera parfois tenté sous le coup de l’émotion d’intervenir rapidement auprès de l'entraîneur pour défendre la cause de son enfant. Ce serait une erreur, dit Bruno Gervais.

Ce n'est pas comme ça que le jeune va sortir grandi. C'est de conseiller aux jeunes d'aller voir lui-même l'entraîneur. Pour la grande majorité des entraîneurs, la porte va être ouverte, puis ils vont être prêts à écouter.

Une citation de Bruno Gervais, directeur des relations partenaires au Groupe Respect

Aller parler à son entraîneur dépend bien sûr de l’âge de l’enfant. Sylvain Croteau suggère de faire valoir aux jeunes que dans le sport, comme dans la vie, il y aura des défis. Et celui-ci en est un. L’ado ne souhaite probablement pas, ajoute le DG de Sport'Aide, que son parent intervienne auprès de son entraîneur par peur de représailles. Voici le genre de conversation qu’il tiendrait avec elle ou lui :

C'est décevant, oui, mais es-tu capable d'aller en discuter avec ton entraîneur, de lui exposer ton inconfort, et de lui demander : "Tu sais, j'aimerais comprendre qu'est-ce que je dois faire? Qu'est-ce que je pourrais faire pour regagner ta confiance? Pour pouvoir davantage prendre ma place, être contributif? Parce que je pense que je peux apporter quelque chose."

Une citation de Sylvain Croteau, directeur général de Sport’Aide
Un entraîneur explique une consigne à ses joueurs avec un tableau.

Un entraîneur donne des consignes.

Photo : Getty Images / IStock/Tempura

De plus en plus, les entraîneurs sont invités à expliquer leur philosophie aux jeunes en début de saison, mentionne André Lachance, qui forme aussi des entraîneurs. C'est-à-dire sa façon de fonctionner au chapitre de l'équité de jeu.

Quand le jeune a un certain âge (15-16 ans), on priorise la responsabilisation comme première étape.

On a trop de jeunes aujourd'hui qui ne sont pas capables de fonctionner tout seul sans avoir la béquille, toujours du parent, sans avoir la béquille du coach à côté, du préparateur physique. L'autonomie dans la vie, c'est important. Puis le sport est un véhicule pour développer cette autonomie.

Une citation de André Lachance, conférencier et co-auteur de Chimie d’équipe

Plus j'avançais dans ma carrière, plus je savais comment réagir [au fait d’être moins utilisé], ajoute Bruno Gervais. Mais ce qui m'a vraiment aidé, c’est que je l'avais vécu plus jeune. J'avais eu ces conversations-là [avec l’entraîneur].

Quand le parent intervient

Pour les plus jeunes enfants qui se disent malheureux sur le banc, il y a lieu de s’adresser soi-même à l’entraîneur en tant que parent, nous disent la plupart des experts consultés. Mais pas n’importe quand. Surtout pas quand le fer est chaud.

Il n’y a pas un parent qui se présente à l'aréna et qui dit : "Aujourd'hui, je vais engueuler quelqu'un." Il n’y a personne qui arrive avec cette intention-là. Les intentions sont bonnes, mais dans l'émotion parfois, c'est là qu'il y a débordements.

Une citation de Bruno Gervais

Il est donc préférable, recommande l'ancien joueur de la LNH, d’éviter l’intervention immédiatement après un match. On veut enlever le facteur émotion pour favoriser la conversation constructive. Alors, pourquoi ne pas faire ça avant le prochain match, après un entraînement, etc.? Quand la poussière est retombée.

Parce que l'objectif de l'entraîneur d'entrée de jeu est le même que celui du parent, rappelle-t-il. Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour remédier à la situation? Puis d'impliquer le jeune dans cette situation-là, si vous sentez qu'il serait prêt à avoir ces conversations-là.

Dans tout bon système, cette sécurité psychologique là, comme parent, de pouvoir aller voir le coach n'importe quand, puis lui dire comment on se sent, ça devrait exister. Ça devient justement une éducation des entraîneurs d'accepter ça, parce qu'on fait tous partie de la même équipe, ajoute le conférencier André Lachance.

Souvent, on dit : "Ah, les maudits parents! Ah, les maudits arbitres, etc." Puis, au bout du compte, on est tous dans la même gang, on travaille tous ensemble.

Encore là, tout dépend de l’ouverture de l'entraîneur devant soi, croit Sylvain Croteau, et de la relation qu'entretient le parent avec l’entraîneur. Et là-dessus, il encourage le parent à développer cette relation avec l’entraîneur.

Si tu as déjà installé un climat d'ouverture, de discussion où tu t'intéresses à l'individu, un moment donné, s'il arrive quelque chose, ça va être plus facile d'initier une discussion. Ça repose sur l'intérêt, la présence, le rôle qu'on a comme parent.

Une citation de Sylvain Croteau

Sylvie Béliveau suggère quant à elle de vérifier auprès de l’organisation ou du club, et non de l'entraîneur, quelle est la philosophie quant à la participation des jeunes.

Je leur dirais : "Quand vous engagez des gens dans ces fonctions d'entraîneur, est-ce que vous les accompagnez dans votre ligne directrice?" Et s'il y a une ligne directrice claire à ce moment-là, il y aurait plus de chances que ça soit applicable.

Une citation de Sylvie Béliveau

Les options

L’idée, notre Daphné Laurin-Landry, c’est de comprendre pourquoi l'enfant est sur le banc. De là, les solutions surgissent.

Ça pourrait être parce que l'enfant ne suit pas les consignes. À ce moment-là, ça risque de compromettre le déroulement de la partie. Si ce sont ses habiletés, est-ce qu'il y a des choses qu'on peut travailler? Des fois, on en oublie qu'on peut aussi changer d'équipe.

Une citation de Daphné Laurin-Landry

C'est important que tes joueurs sachent pourquoi [ils jouent moins], ajoute Bruno Gervais. Puis, dans la grande majorité des cas, le joueur le sait, mais le message ne se rend pas jusqu'aux parents. Puis parfois, le joueur n'en parlera pas.

On peut justement choisir de faire jouer son jeune à un niveau inférieur. Car rester sur le banc, ça peut miner la confiance et l'estime de soi.

Souvent, on se fait prendre à vouloir jouer dans les grosses catégories, souligne Bruno Gervais. Parfois même, ce désir-là vient des adultes plus que des enfants. L'enfant veut être avec des amis, veut s'amuser. Compter un but dans l'atome B ou compter un but dans l'atome AA, c'est aussi important, puis c'est aussi plaisant.

Se retrouver à un niveau inférieur permettrait probablement à l’enfant de jouer davantage et d’y prendre plaisir. Ça devient payant, croit Geneviève Leduc.

C'est d'apprendre à utiliser le sport et l'activité physique pour ce que c’est. Peu vont se rendre aux plus hauts niveaux. L'objectif, c'est de s'amuser, c'est d'avoir du plaisir dans notre activité et d'avoir le goût d'y retourner de semaine en semaine.

Une citation de Geneviève Leduc, conseillère principale aux programmes à Fillactive
Les patins et les bâtons de jeunes joueurs de hockey sur une patinoire.

Des joueurs de hockey

Photo : Getty Images / joci03

L’objectif, ajoute-t-elle, c’est de s'assurer de retirer les barrières à la pratique de l'activité physique ou les raisons d'abandon.

Ce n'est pas vrai que de tout le temps être en train de survivre et avoir de l'eau jusqu'en dessous des narines, c'est la meilleure façon de se développer, dit Bruno Gervais de façon imagée.

Chose certaine, si l’enfant se désintéresse et le plaisir n’y est plus, nos experts sont unanimes, il ne sert à rien d’insister au nom de la persévérance. La persévérance à tout prix, très peu pour Geneviève Leduc.

Les gyms sont remplis d'adultes qui ne sont pas persévérants et qui ne se rendent pas au bout de leur session après s'être inscrits au mois de janvier. Plein de parents imposent cela à leurs jeunes, alors qu'ils ne sont pas capables de l'appliquer pour leur propre personne.

Une citation de Geneviève Leduc

Il est donc souhaitable d’explorer un autre sport, et c’est tant mieux, affirment les spécialistes. Essayer en fait plusieurs sports quand on est jeune nous donne un bagage d’habiletés pour la vie. Les trois mots-clés dans l'activité physique, selon André Lachance, sont : motivation, confiance et compétence.

Lorsqu'on quitte un sport à l'âge de 15-16 ans, puis que c'est le seul sport qu'on a fait toute notre vie, on est dans le pétrin. Les amis vont nous demander plus tard d’aller faire du ski. Je n'aurai pas confiance, je n’aurai pas la compétence, ce qui fait que je n'aurai pas la motivation, ce qui fait que je n'irai même pas.

Une citation de André Lachance

Dans tout ça, il faut aller chercher le plaisir pour l'enfant pour éviter la pire des conséquences, le décrochage sportif.

Pour aider les parents à s’y retrouver, plusieurs formations existent en ligne. Le Groupe Respect (Nouvelle fenêtre) en offre gratuitement jusqu’à la fin avril.

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