•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Vous naviguez sur le site Radio-Canada

Début du contenu principal

Des itinérants s’organisent en microsociété à Vancouver

Des itinérants s’organisent en microsociété à Vancouver

Texte : Dominique Lévesque Photographies : Alexandre Lamic

Publié le 1 novembre 2023

Qu’ils soient cuisiniers, jardiniers ou gardiens de sécurité, les occupants du village de tentes du parc Crab, à Vancouver, se sont dotés d’une structure sociale dans laquelle chaque membre contribue activement au bon fonctionnement de la communauté de fortune. Incursion au cœur du village de tentes du parc Crab, le premier campement pour personnes itinérantes à être autorisé à Vancouver.

Weston, le leader du camp

Weston Shupe accueille les nouveaux venus. Il leur explique le fonctionnement et les règles de la petite communauté qui compte environ 60 personnes.

Nous avons tous un rôle à jouer, dit l’homme de 34 ans. Ma femme s’occupe des dons, d’autres s’occupent de la sécurité, moi, j’aide les gens à s’installer, à être à l’aise. Je sculpte même des meubles en bois.

Comme ma tente est grande, lorsque les tentes d’autres personnes s’effondrent en raison de la pluie ou que des personnes n’ont nulle part où dormir, elles sont les bienvenues dans la mienne.

Ma tente sert aussi de centre médical. Les gens viennent soigner des coupures ou des blessures.

Les règles d’or de la communauté : Ne pas voler et s’entraider.

« Lorsque des gens arrivent ici et se comportent de façon dysfonctionnelle et impolie, je leur dis que, s’ils veulent être comme ça, il y a la rue Hastings, là-bas. Mais s’ils veulent être des toxicomanes fonctionnels dans une communauté où tout le monde s’entraide, il y a le parc Crab. »

— Une citation de   Weston Shupe, leader du village de tentes du parc Crab

Sheena, la responsable des dons

La conjointe de Weston, Sheena Derdak, organise les dons qui permettent aux occupants du village de tentes de se vêtir et d’être au chaud.

Elle explique que des particuliers et des organismes de charité apportent de la nourriture, des vêtements, des matelas, des draps et des couvertures.

Mon amie et moi, nous avons bâti une cabane où nous entreposons les dons et les organisons. Tout le monde peut apporter quelque chose ou prendre quelque chose.

Avec le froid qui s’en vient, nous avons besoin de vêtements d’hiver, de vêtements confortables, de tuques, de gants, de foulards et de tout ce qui peut nous permettre de rester au chaud, explique Sheena, qui est âgée de 34 ans.

« Lorsqu’il fait -30 °C à l’extérieur, il faut trouver une façon de se réchauffer. Ce serait génial qu’on ait tous des couvertures chauffantes. »

— Une citation de   Sheena Derdak, responsable des dons au village de tentes du parc Crab

David, le cuisinier

David Bradbury, 61 ans, nourrit les corps et les âmes du campement. C’est sa façon de faire sa part pour cette communauté qui l’a beaucoup aidé dans les moments difficiles qui ont suivi la mort de sa conjointe.

Sa cuisine est bien équipée : on y trouve des réfrigérateurs, un congélateur, des poêles au propane et une génératrice qui fait fonctionner le tout.

Tous les jours, il rend des gens heureux. Je regarde ce qu’on a comme nourriture, combien de personnes je dois nourrir et je fais ce que je peux. J’adore cuisiner et aider les gens.

« Les gens viennent me voir lorsqu’ils ont faim et ne se sentent pas bien. Je leur donne quelque chose et, tout de suite, ils se sentent mieux et sont très reconnaissants. Cela me fait chaud au coeur! »

— Une citation de   David Bradbury, cuisinier du village de tentes du parc Crab

Son expérience culinaire? Il a cuisiné pour ses trois filles, qu’il a élevées seul, a observé sa mère dans la cuisine et regardé des émissions culinaires.

Je fais le meilleur pain perdu. Je mets de la cannelle et du sucre brun, et quand les gens sentent le sucre et le sirop d’érable, ils accourent et en redemandent, raconte-t-il fièrement.

David cuisine régulièrement pour 30 à 40 personnes et a même déjà préparé un souper de poulet barbecue pour 80 personnes, un travail imposant, mais gratifiant, dit-il.

Jake, le gardien de sécurité

Jake Bannon a traversé le pays à 11 reprises et a fréquenté plusieurs refuges au fil du temps. C’est au parc Crab qu’il se sent chez lui.

Pour s’assurer que tout se déroule sans anicroches, Jake et quelques autres résidents patrouillent tour à tour le campement, surtout la nuit, pour prévenir les vols.

Si quelqu’un vient causer des problèmes ou s’il y a des disputes, on essaie d'intervenir, mais gentiment, humainement.

En plus de la sécurité, Jake est responsable de la prévention des surdoses. L’homme âgé de 30 ans s'assure qu’il y a toujours des accessoires de consommation de drogue stériles et des trousses de naloxone à portée de main.

« Les gens qui viennent ici ont des dépendances. Il y en a qui ont fait des surdoses. Alors on s’installe dans la tente de réchauffement et on s’assure que tout le monde va bien. »

— Une citation de   Jake Bannon, gardien de sécurité au village de tentes du parc Crab

Ben, le réparateur de vélos

Ben Hughes, 46 ans, est un fervent amateur de vélo. Sa passion et ses connaissances sont très appréciées au village de tentes.

J’ai commencé à réparer des vélos il y a huit ans. Je les répare, je les assemble. Il y a un grand besoin de réparations, explique-t-il.

Nous sommes comme des mésadaptés sociaux qui essaient de s’entendre du mieux qu’ils peuvent avec les habiletés et les expertises qu’ils ont acquises au cours des années, affirme Ben Hughes.

« Je peux être un médiateur si nécessaire. Mon passé dans la vente m’a appris à comprendre ce que chaque partie veut et à essayer de trouver le juste milieu. »

— Une citation de   Ben Hughes, réparateur de vélos au village de tentes

Clint, le mécanicien

Clint Randen, 48 ans, fait partie des occupants qui se sont battus devant les tribunaux pour obtenir le droit d’avoir un village de tentes sur la péninsule du parc Crab. Il y est depuis le début.

« Maintenant que c’est légal, on veut qu’on nous laisse en paix. On veut montrer au monde qu’on peut s’occuper de nous-mêmes et qu’on n’a besoin de rien de la part du gouvernement. »

— Une citation de   Clint Randen, mécanicien au village de tentes du parc Crab

Je suis le mécanicien du camp. J’aide tous ceux qui ont des besoins mécaniques.

Si quelques génératrices fournissent de l’électricité pour répondre aux besoins des occupants, Clint a aussi installé des panneaux solaires.

Son objectif? J’aimerais qu’on puisse se tourner vers l’énergie solaire, renouvelable, et être autonomes.

Crystal, la jardinière

Crystal Prasad dit qu’elle est sans-abri depuis 11 ans et qu’elle habite au parc Crab depuis presque 2 ans avec son conjoint, Joel, et son chien, Daisy.

La femme de 45 ans ne passe pas inaperçue partout où elle va et facilite des rencontres communautaires. Son franc-parler fait d’elle une véritable leader au camp.




Photo fournie par Michelle Gagnon-Creeley

Pour enjoliver son village et mettre en valeur ses traditions autochtones, elle a participé, l’été dernier, à la création d’un jardin autochtone de plantes médicinales, dont elle est très fière.

Pour Crystal, le village de tentes et ses occupants sont une famille. Nous sommes une communauté et je me sens chez moi ici, plus que n’importe où ailleurs.

« Nous avons des règles simples : respect de ses voisins, pas d’injures, pas de vol, pas de policiers. On maintient la paix et on prend soin du parc. »

— Une citation de   Crystal Prasad, jardinière du village de tentes du parc Crab

Partager la page