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Toute la vie explore le thème de la transparentalité

<em>Toute la vie</em> explore le thème de la transparentalité

Texte : Geneviève Cardin Illustrations : Jimmy Beaulieu

Publié le 14 décembre 2021

Ce récit numérique est inspiré de l'émission Toute la vie et produit par Aetios productions en collaboration avec Radio-Canada.

La transparentalité, ou parentalité transgenre, nous expose à un univers où des hommes sont enceints et mettent leurs enfants au monde et où des femmes conçoivent des bébés avec leur sperme. Il s’agit d’une nouvelle réalité dans laquelle une personne devient tout simplement un parent et où les mots papa et maman ont une connotation plus émotionnelle que genrée. Ces diverses figures parentales peuvent choquer, voire scandaliser certaines personnes. 

L’ouvrage Familles LGBT : le guide définit la famille transparentale comme une famille dans laquelle au moins un des parents est une personne transgenre. Cette personne peut être devenue parent avant ou après avoir amorcé son processus de transition. 

Selon la Coallition des familles LGBT+, la communauté trans a gagné de la visibilité en luttant contre les inégalités sociales dont elle est victime. Avec cette reconnaissance, de plus en plus de familles transparentales s’affichent en société. Le Québec est reconnu mondialement comme étant un endroit où les familles trans peuvent évoluer dans un climat d’ouverture, sain et inclusif. Malgré de réels progrès en matière de reconnaissance des droits et des acquis sociaux pour les personnes trans, les familles transparentales doivent encore faire face à de nombreux préjugés dus à des mythes qui persistent et au manque de compréhension à leur égard.

Une manière de contrer ces préjugés et ce manque de compréhension est de montrer et de raconter des histoires heureuses de transparentalité. Danielle Trottier, auteure de la série Toute la vie, a fait le choix de créer un personnage trans fort. Lucas Arditti est devenu une voix et un visage pour une forme de parentalité peu connue, et peu reconnue. Le personnage de Lucas a été bien reçu par les fans de la série. Pour une des premières fois à la télévision québécoise, on voyait un homme enceint à heure de grande écoute. La production a reçu plusieurs messages de téléspectateurs et téléspectatrices qui se demandaient, avec une saine curiosité, s’il existe ici, chez nous, des hommes qui ont accouché.

Nous avons rencontré Maxim, Roxanne, Alexandre et Logan, qui se sont reconnus – à différents degrés – dans l’histoire du personnage de Lucas Arditti. Chaque témoignage présente un des visages de la transparentalité ou un regard sur cette réalité qui prend maintenant avec assurance la place qui lui revient dans le portrait global de la famille au Québec.

Le dessin d'une carte d'assurance maladie avec un homme qui porte une casquette.
Une carte d'assurance maladie Photo : Aetios Productions / Jimmy Beaulieu

Maxim, 23 ans, a accouché de ses deux filles

Selon certaines études, les personnes trans qui entreprennent aujourd’hui un processus de transition le font à un âge plus précoce que la génération qui les a précédées. De ce fait, on peut penser que plus de personnes trans ayant déjà fait leur transition auront le projet de devenir parents dans les prochaines années.

C’est le cas de Maxim-Anthony, qui, à 23 ans, est déjà père de deux jeunes filles, Charlie et Samuelle. Après un projet de couple qui n’a pas fonctionné, car sa copine ne sentait pas l’urgence de fonder une famille, il a fait le choix de mettre en veilleuse sa transition pour porter lui-même ses enfants. Cette urgence de ne pas vouloir attendre après quelqu’un d’autre pour réaliser son rêve d’être parent vient du fait que Maxim-Anthony a été atteint de deux cancers en très bas âge. Maxim est en rémission depuis plus de 20 ans, et ces cancers auraient normalement dû le rendre infertile. La naissance de ses deux filles est donc un véritable miracle pour lui et sa famille.

Maxim et sa fille Photo : Aetios Productions

Maxim, comme plusieurs parents transgenres, souhaite à ses enfants de ne pas vivre de problème d’identité de genre, comme lui l’a vécu. Même si selon lui les gens sont compréhensifs, un tel bouleversement n'est pas souhaitable. C’est pourquoi il a volontairement nommé ses filles Charlie et Samuelle, des prénoms neutres, afin de leur faciliter la tâche si elles vivaient un inconfort avec le genre qui leur a été assigné à la naissance. Maxim avait un prénom très genré qui ne laissait place à aucune modification possible autre que le changement complet, une difficulté supplémentaire dans le parcours déjà parsemé d’embûches pour une personne en questionnement d’identité de genre, et éventuellement en processus de transition.

Le dessin d'une femme et d'un homme qui tient un bébé dans ses bras.
Une famille Photo : Aetios Productions / Jimmy Beaulieu

Avant l'arrivée d'Albert : l'histoire de Roxanne et Alexandre

« Quand j’ai rencontré Alexandre, c’était une femme. C’est une drag queen qui nous a matchées pendant une soirée de rencontre organisée dans le seul bar gai de Québec », nous raconte Roxanne, sous le regard amusé d’Alexandre. Roxanne se définit comme une personne pansexuelle. Elle se sent attirée sentimentalement, sexuellement ou spirituellement par une personne, sans égard à son sexe ou son genre. 

L’option d’avoir des enfants et de fonder une famille est arrivée très tôt dans leur relation, dès leurs premiers échanges en tant que couple. Par contre, Alexandre avait une démarche vitale à entreprendre : assumer son identité de genre, même si devenir l’homme qu’il avait toujours été signifiait possiblement la fin de sa relation avec sa conjointe.       

« La transition d’Alexandre a fait en sorte que la blonde timide et réservée avec laquelle j’étais en couple a graduellement cédé sa place à un amoureux qui a gagné en confiance dans ses relations avec ma famille, mes amis et dans ses interactions sociales. Même mes amies me disaient : on aimait bien ta blonde, mais on apprécie encore plus ton nouveau chum », se rappelle Roxanne. Le projet bébé pouvait finalement suivre son cours.

Roxanne et Alexandre Photo : Aetios Productions

Comme le rapporte l’organisme en droit familial Inform’elle dans la publication de 2017 Dossier nouvelles familles, le nombre de familles transgenres est en croissance. Cette augmentation s’explique entre autres par les allégements administratifs qui ont été opérés au Québec en 2015 pour réduire les délais et simplifier la demande de modification du prénom et du sexe sur divers documents du registre de l’état civil. Enfin, de nombreuses personnes transgenres pouvaient procéder à leur changement de nom et exister en accord avec leur identité de genre sur le plan administratif. Mais statistiquement, les personnes transgenres n’existent pas encore.

Grâce à l'ajout d'une question portant sur le genre dans le Recensement de 2021, Statistique Canada sera en mesure de recenser pour la première fois les couples transgenres ou de genre non binaire, ce qui permettra de brosser un portrait plus complet de la diversité grandissante des familles canadiennes.

Roxanne nous a écrit après la naissance d’Albert :  « Il est né dans la nuit du 15 au 16 novembre. Il pèse 8,9 lb et est déjà grand du haut de ses 50 cm. La première nuit n’a pas été de tout repos, mais mon Alexandre est un papa formidable pour Albert. »

Un homme qui subit une échographie.
Une échographie Photo : Aetios Productions / Jimmy Beaulieu

La nécessité d'avoir une voix et de se voir à l'écran

Comme pour tout groupe minoritaire ou marginalisé, la représentation à l’écran est une avenue permettant de démystifier auprès d’un plus grand nombre une réalité que plusieurs connaissent mal, à peu près pas, ou pas du tout. C’est donner accès à une représentation de la famille transgenre à des gens qui n’ont pas la chance d’en côtoyer et qui ignorent donc la réalité de tout un pan de la société associé à cette communauté.  

On peut faire une représentation sensible si on est à l’écoute de la diversité à inclure, dans un objectif de déstigmatiser un groupe pour éviter de le représenter de manière grossière ou stéréotypée.

Le personnage de Lucas, un jeune transgenre dont le prénom administratif est encore Lisa, tombe enceint alors qu’il est en pleine démarche d’affirmation de genre. Avec Lucas, Danielle Trottier souhaitait porter à l’écran l’histoire d’un membre issu de la pluralité des genres, en l’intégrant dans l’univers sensible et réfléchi des défis de parentalité adolescente qui prévalent à Marie-Labrecque, l’établissement scolaire de la série télévisée.

Pour ce faire, l’auteure avait besoin de se coller à quelqu’un de la communauté, à une personne qui pourrait la guider dans sa quête de réalisme et d’authenticité. 

Logan Dante Di Giovanni est intervenant de proximité et travailleur de milieu pour l’organisme ASTTeQ (Action santé travesti(e)s et transexuel(le)s du Québec). Par son travail, il vient en aide aux personnes les plus marginalisées de la communauté trans, comme les travailleurs et travailleuses du sexe et les personnes migrantes, séropositives ou toxico-itinérantes. Il donne des conférences et formations pour aider notamment les corps policiers à démystifier la réalité des personnes transgenres. Étant lui-même un homme trans, issu de la communauté italienne, il était un consultant de choix pour faire en sorte que le personnage de Lucas soit authentique dans sa quête et dans sa manière d’être.

Danielle Trottier, Lé Aubin et Logan Dante Di Giovanni Photo : Aetios Productions

Une série de fiction qui rejoint près de 1,2 million de téléspectateurs et téléspectatrices chaque semaine est un outil puissant pour représenter la réalité plurielle de la transparentalité au grand public et favoriser son inclusion. Se voir à l’écran permet aux gens de se sentir reconnus et acceptés dans la société. Voir l’autre est une porte d’entrée vers la compréhension. La production de la série Toute la vie a tenu à confier le rôle de Lucas à un jeune acteur transgenre, Lé Aubin, afin de porter à l’écran cette histoire et lui donner une charge émotive crédible. 

Comme nous l’avons vu précédemment, les familles transparentales ne sont pas encore pleinement reconnues sur le plan statistique, même si, comme nous vous l’avons présenté à travers les témoignages de Maxim, de Roxanne et d’Alexandre, elles ont bel et bien une présence grandissante dans notre société. Mettre en lumière par la fiction leur présence, transmettre leur histoire et leur vécu est un premier pas qui permettra possiblement de combler ce vide.

Le dessin d'une silhouette bleue sur fond jaune.
Une silhouette Photo : Aetios Productions / Jimmy Beaulieu

Des ressources adaptées aux besoins d'une communauté grandissante

Comme le spectre des modèles familiaux a évolué, les ressources offertes en soutien aux familles issues de la diversité sexuelle et de la pluralité des genres sont de plus en plus présentes. Sans s’être multipliés, des organismes qui œuvraient par exemple au soutien des familles gaies et lesbiennes ont élargi leur offre de service au fil des ans pour inclure l’ensemble des besoins de la communauté LGBTQ+, un sigle qui lui aussi s’élargit pour devenir encore plus inclusif : LGBTQIA2S+.  

C’est le cas de la Coallition Familles LGBT+ (Nouvelle fenêtre), un organisme communautaire qui se veut une voix et un outil de représentation et de défense pour les familles, notamment les familles transparentales. La Coallition, par ses actions, ses interventions et ses publications, vise à changer les attitudes en accompagnant les écoles, les services sociaux et le personnel des établissements de santé dans leur démarche d’inclusion envers la diversité familiale.

Le paysage de la famille change; la société aussi. Des groupes d’entraide se sont créés, des actions bénévoles se mettent en place, pour que, finalement, au même titre que n’importe quel individu qui désire avoir du soutien dans son projet de fonder une famille, ou que n’importe quel parent qui a besoin de soutien pour élever ses enfants ou avoir des réponses à une question de droit, puisse se sentir écouté, accepté, compris et éventuellement pris en charge, sans tenir compte de son sexe ou de son genre.

C’est d’ailleurs par le biais d’un de ces organismes, le GRIS (Nouvelle fenêtre), que nous avons rencontré Roxanne et Alexandre. Le GRIS est un organisme communautaire dont le but est de promouvoir une vision positive des personnes jeunes et moins jeunes de la diversité sexuelle et de la pluralité des genres par l'éducation, la formation, la sensibilisation et le soutien à travers différents services. 

Roxanne et Alexandre font d’ailleurs du bénévolat pour ce même organisme, dans le but de faire connaître leur réalité à la population générale, mais aussi pour répondre aux questions de couples trans qui, eux aussi, ont le projet de fonder une famille.

Équipe

Illustrateur : Jimmy Beaulieu
Rédactrice : Geneviève Cardin
Réalisateurs : Fred Rioux et Fred Perron
Captation des entrevues : SPKR studio et Les productions PushUp
Productrice et producteur : Fabienne Larouche et Michel Trudeau
Productrice déléguée : Danielle Trottier
Directrice médias numériques : Geneviève Cardin

Équipe de Radio-Canada

Directrice principale, contenu et programmation, ICI Tou.tv, webtélé et jeunesse :
Christiane Asselin

Directrice, Produits numériques TVG et Jeunesse :
Isabelle Picard

Cheffe de contenu numérique TVG et Jeunesse :
Josianne Pelletier

Édimestre TVG et Jeunesse :
Carmen Bourque

avec la participation financiere du fonds des medias du canada

© Production TLV III Inc. 2021 – Tous droits réservés
Une filiale de Aetios Productions, membre de l’AQPM

Un document réalisé par Radio-Canada Télé

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