Le jour se lève à peine, un matin frisquet d’octobre 2018. Maria – un nom fictif – se présente à l’urgence d’un hôpital montréalais pour accoucher de son septième enfant.
La femme de 44 ans, d’origine haïtienne, ne se doute pas qu’elle en ressortira transformée à jamais, et stérile.
En plein accouchement, au moment où on lui apprend qu’elle devra subir une césarienne d’urgence, Maria se fait proposer par l’obstétricienne de garde une ligature des trompes de Fallope, une option qu’elle n’a jamais envisagée auparavant. Une ligature des trompes, c'est quoi?, se rappelle avoir demandé Maria dans un français parfois hésitant. Elle a dit : "Tu sais pas c'est quoi la ligature des trompes?" J'ai dit : "Mais non Madame, je sais pas." Elle a dit oui, les choses tu fais les bébés.
Maria affirme avoir refusé l’intervention stérilisante. Aucun formulaire de consentement n'apparaît d’ailleurs à son dossier.
C’est seulement deux mois plus tard, lors d’un suivi avec son médecin de famille, qu’elle aurait appris avoir été stérilisée.
Problème de langue, manque de communication, malentendu? Ariane Métellus, consultante et accompagnante périnatale qui soutient Maria dans sa quête de justice, ne le croit pas. Je pense que ça va un petit plus loin que ça. Je pense qu’il y a beaucoup de paternalisme, d’infantilisation.
Elle estime que la médecin aurait dû offrir à Maria un délai de réflexion, comme le prévoient les bonnes pratiques en la matière, et la possibilité d’aller chercher un deuxième avis médical, puisque l’intervention n’était pas requise de manière urgente.
Le médecin qui a examiné la plainte déposée par Maria auprès de l’hôpital lui donne en partie raison.
Bien qu’il retienne la version du médecin selon laquelle Maria aurait consenti, il met en doute la validité de ce consentement accordé alors qu’elle était souffrante, épuisée après plusieurs heures d’un travail difficile
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Extraits de la lettre du CIUSSS :
Par ailleurs, je questionne la qualité de ce consentement selon les bonnes pratiques en cette matière.
Je suis d’avis qu’il est possible de conclure que l’état dans lequel vous étiez dans ces minutes qui ont précédé votre césarienne ait pu altérer votre compréhension de la chirurgie stérilisante proposée.
- Réponse du médecin examinateur du CIUSSS à la plainte déposée par Maria