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Hélène Prévost
JEAN-MARC VIVENZA

 

Hélène Prévost : J'aime bien le rituel du travail, j'enregistre aussi les répétions. J'aime bien ça.

 

 

JEAN-MARC VIVENZA

: Ah. D'accord.

Hé : Ça rend compte de tellement de choses.

Viv : C'est vrai. C'est vrai. C'est un moment particulier.

 
  HP : Le spectacle est un moment placé, privilégié mais il se passe beaucoup de choses dans ces moments.  
Viv : Oui, d'ailleurs l'espace de montage est certainement un moment fort en intensité parce qu'on est là en préparation du concert. Il y a toujours quelque chose qui ne marche pas comme on le voudrait.  
 

HP : Est-ce que vous saisissez le lieu à ce moment-ci, au moment où tout s'installe?

Viv : C'est le moment de prendre la mesure de la salle et de comprendre comment elle va réagir ensuite pendant le spectacle. Et en fait c'est un peu un moment de perception, de "prise de température" de l'environnement. voir un peu comment les choses vont se mettre en place, comment elles vont fonctionner aussi. Parce lorsque le concert est parti, on ne peut plus rien faire. Moi personnellement je ne vois plus rien parce que tout ce qui se passe autour me dépasse complètement. J'en laisse la responsabilité à ceux qui sont à la technique derrière et là pour moi, ça me permet de mieux comprendre d'abord comment les choses vont fonctionner et puis ensuite de prendre le poult de la salle, du lieu, de m'acclimater d'une certaine manière, de me familiariser avec l'environnement, avec le lieu.  
  HP : Concernant le concert de ce soir, s'agit-il d'une séquence qui a déjà sa durée ou est-ce vous travaillez dans le temps en injectant des moments différents? Autrement dit, est-ce qu'il y a une trame que vous modulez?

Viv : Oui c'est tout a fait ca. Il y a des trames dans le sens où il nous faut un plan de concert autrement on serait complètement perdu. Donc il y a un plan de concert qui consiste en trames...

HP : Qui sont enregistrées sur quel type de support?
 
 

Viv : Oui, qui sont déjà sur des supports... Mais ce sont des trames minimales qui peuvent subir une transformation totale en direct. Mais ce sont quand même des trames qui nous servent de repères. Ce qui nous permet de séquencer des "morceaux" ou des "phases" à l'intérieur du concert. Donc cette trame initiale ensuite se voit soit modifiée, soit enrichie par des sources diverses, des sources qui sont soit celles de la salle, qui sont reprises et retravaillées, soit des sources elles-mêmes préenregistrées et retravaillées en direct. Donc là on est dans quelque chose qui est un processus en oeuvre au moment où il se fait, sur le présent. Et toute la difficulté est d'arriver à générer les sons les plus intéressants à partir de cette trame pour permettre un peu, comme dans le musique improvisée, qu'elle soit jazz au autre, tout d'un coup à l'expression de donner vraiment toute sa liberté, toute son intégrité si on peut dire.

HP : Il y a une question que j'aurais aimé vous poser hier. J'y ai pensé seulement ce matin. C'était la part du silence dans l'art des bruits ou, du moins Russelo, ce qu'il en a dit, ce que vous en pensez, ou comment vous envisagez cela.  
   
 

Viv : La part du silence, c'est le silence de la personne, c'est le silence de l'individu par rapport au bruit. Le silence se situe là lorsque on se rend dans les environnements sonores, bruyants dans lesquels je vais capter les sons, il est important que moi je sois dans un état de réceptivité totale. Et cet état de réceptivité totale, en réalité, c'est celui du silence. Être le plus transparent possible à l'environnement sonore dans lequel on se trouve, être le plus apte à percevoir les sons, c'est en réalité se faire totalement silencieux. Donc, on pourrait dire que dans l'art des bruits le préalable c'est d'abord de savoir être silencieux. C'est d'avoir une pratique de silence. C'est un peu paradoxal mais en réalité c'est un peu la discipline initiale et incontournable. Je dirais qu'un bon compositeur bruitiste est d'abord quelqu'un qui sait énormément écouter les choses. Entendre les phénomènes acoustiques de l'environnement, et donc créer en lui cet espace de silence qui permet l'accueil, la réception, l'écoute attentive. C'est toute une discipline en réalité. C'est une véritable règle ou méthode d'être vis-à-vis de l'environnement. Respecter l'environnement en réalité c'est faire soi-même le moins de bruit possible. Être le moins "parasite" dans le lieu ou l'espace dans lequel on se trouve. Donc le silence est très très important. Mais il est très important en amont. Ensuite cet espace de silence, si il a été suffisamment ample et de qualité, permet la réalisation de l'art des bruits, et du travail sur le son, cette fois-ci d'une manière libérée ample et large si on veut.

 

HP : On associe beaucoup actuellement, et je le dis peut-être grossièrement, bruit et intensité sonore. On est dans le "méga-son", dans le "macro-son".

Viv : Oui...
HP : Est-ce que ca fait partie de l'ordre des choses.? Parce que nous sommes en train de passer à travers la technologie et la société industrielle, et qu'on s'en va vers le silence - très très relatif - des machines. Parce qu'elles sont très bruyantes en fait.... l'électricité fait du bruit.  
Viv : Effectivement. Les forces productives qui permettent l'utilisation de toute cette industrie de quatrième génération sur le plan technologique, de l'intelligence artificielle, de la création par micro-processeur, en réalité est dépendante d'une infrastructure industrielle qui, elle est extrêmement bruyante : les barrages, les centrales hydroliques ou électriques qui produisent de l'énergie, elles, sont extrêmement bruyantes. Donc on est dans un monde qui sur le plan de l'environnement immédiat du quotidien, en tout cas pour ceux qui sont dans ce que l'on appelle le tertiaire c'est-à-dire les bureaux, les offices, etc., évoluent dans un environnement sonore beaucoup moins bruyant que les ouvriers qui sont sur leurs places de travail au contrôle des barrages, des turbines, des centrales hydroliques ou des raffineries pétrochimiques ou la sidérurgie - parce qu'on a toujours besoin d'acier aussi. Donc, c'est vrai qu'on va vers une société qui semblerait être de plus en plus silencieuse mais qui, en réalité ,"masque" son bruit, qui arrive à donner une couche superficielle de "vernis" de silence. On se protège énormément du bruit incrée des immeubles, des ensembles d'habitation avec des isolations suffisantes pour se protéger du bruit. On recherche le silence. L'expérience de l'art des bruits, en réalité, c'est redonner au son toute sa puissance, toute son énergie première sur un instant donné, précis, de façon à mettre en présence du spectateur une forme de démonstration de l'énergie tellurique finalement voilée, secrète, cachée. "Mettre en lumière" : c'est ce que je disait hier dans la conférence. Mettre en lumière ce monde secret, ce monde qui est dans la nuit finalement, qui est celui de la production de l'énergie, de l'utilisation de la maîtrise des forces naturelles qu'on ne voit pas mais qui, en réalité, est là au fondement, à l'origine du système et du développement technologique dans lequel on vit tous les jours. Donc là, il y a une mise en lumière, brutale évidemment, de tout ce qui reste voilé, caché et un peu mis à distance dans la société contemporaine. Et qu'on a tendance à oublier d'ailleurs... Beaucoup de gens disent - c'est une question qui est venue hier soir - "finalement on va vers une société de silence, qu'est qui reste véritablement pour l'art des bruits?" On est pas une société de silence. On est une société qui crée du silence et qui ,en réalité, est dépendante d'une infrastructure productive d'énergie qui, elle, produit énormément de bruit. Donc moi je révèle le bruit caché. En fait c'est un travail de révélation, de révélateur.  
HP : Dans une soirée comme celle qui va être vécue ce soir par les gens qui seront ici... Ils vont vivre une sorte de métaphore du bruit. Parce qu'ils vont vivre hors-contexte une réalité bien concrète et je me demande - le mot vient d'être lâché - si il n'y a pas un certain rapport avec le travail de musique concrète auquel vous faisiez allusion hier et le fait qu'on cache les sources. Parce que, ce soir, on cache la source du bruit.  
Viv : Oui. C'est vrai. Le problème de l'argument dans la musique concrète, c'est que la source, dans la mesure ou elle est fixée sur un support, n'a plus aucun intérêt, et c'est le support de fixation qui devient à lui-même son propre fondement. Ce que moi je récuse théoriquement, radicalement. À mon avis, respecter la source et considérer que son objectivité, son être, en tant que tel, son "être en soit", pour employer un langage philosophique, en réalité, n'est pas niée ou modifiée par le support de fixation. Le support de fixation ne vient pas comme une nature étrangère sur la source. Il vient au contraire en tant que bande vierge ou disponibilité d'accueil vis à vis de la source pour se mettre au service de cette source. Mais il faut toujours respecter l'objectivité de l'être du bruit et , d'une certaine manière, je dirais que le malheur de la musique concrète (électroacoustique ou acousmatique), c'est en réalité de vouloir cacher la source ou du moins, de ne pas lui donner sa valeur, sa richesse propre. Elle tombe finalement dans une sorte de méthode schizophrénique qui fonctionne dans une sorte d'autarcie de légitimité. "Je légitime mon travail par la fixation du son dont je deviens le maître et je suis moi-même le seul être donneur de sens de ce son. Donc le bruit qui est révélé c'est en réalité ma lecture subjective de ce bruit. C'est moi qui donne son information, c'est moi qui donne sons sens c'est moi qui est le donateur de la vérité ou la véracité de ce bruit et finalement je reste le seul en tant que subjectivité ou ..."  
HP :... gardien du sens?
Viv : Oui, "gardien du sens"... le "maître" de cette source. Quand à moi, je renverse complètement la proposition, revenant à l'idée première des futuristes italiens. Il faut laisser au bruit la capacité et le loisir de son expression totale. C'est le bruit qui nous informe, c'est le bruit qui nous dicte en réalité notre mode de travail sur lui. Il faut se rendre comme le disait Heidegger "disponible" vis-à-vis de l'étant. En réalité cette disposition, cette ouverture, cet accueil du bruit on parlait tout à l'heure, de ce préalable silencieux, cette méthode de mise en accueil est directement liée à la façon dont, ensuite, le travail va être mis au service de cette restitution, mais avec le bruit comme première et unique base de légimité référentielle. Ce qui ne veut pas dire que le créateur ne joue pas un rôle important, bien évidemment. Mais il doit savoir que sa subjectivité, sa propre personnalité est là pour permettre cette libération, cette transmission de l' "être du bruit". Et on est dans un art que j'ai qualifié hier d'art objectif, faisant référence d'ailleurs aux arts orientaux ou à d'autres techniques. Je crois que c'est très important - d'autant plus dans le siècle de la subjectivité, de l'individu-roi, du moi triomphant, de l'égo surdéterminé - c'est très très important de revenir à une approche de transparence, de communion et d'union même avec l' "être" en tant que tel. De l'être en tant qu'être, comme on le dit dans la philosophie grecque. À mon sens c'est une approche philosophique qui est fondamentale pour éviter le piège du subjectivisme créateur. Le sujet en réalité est devenu le plus grand piège que la création peut se tendre à elle-même aujourd'hui. Et d'ailleurs on est saturé de sujets, on est saturé de sensibilités personnelles ou individuelles. Ce qui ne veut pas dire que je n'ai pas la mienne, que je n'ai pas mon jugement sur les choses, que je n'ai pas mes propres manières de voir et de sentir l'environnement dans le quel je vis. Mais c'est en le sachant et en acceptant cette première subjectivité que je peux faire une travail sur moi-même pour me rendre ouvert et disponible à la réalité telle qu'elle est. * Donc, là, à mon avis il faut revenir à une vraie discipline de l'accueil, une vraie discipline de transparence, une vraie discipline de mise en transparence par rapport à l'objectivité du monde. Mon idée ne doit certainement pas être la créatrice du sens. Si on renverse la proposition, le sens m'est donné, le concret, le réel est lui, le premier déterminant. Il existe avant que je n'apparaisse et il existera après ma disparition et je dirais qu'il faut respecter cette identité propre de la réalité. Donc mon travail c'est un travail de respect de l'identité propre de la réalité objective du monde. Ce qui me place sur le plan philosophique, comme je le disais hier finalement, plus proche de l'idéologie fondamentale heideggerrienne que du jeu transcendatal Ustlerien. À mon avis, ce qui fait la différence entre musique concrète et bruitiste, sur le plan philosophique, est là. La charnière théorique se trouve sur ce point-là. Et j'insiste beaucoup, quitte à désarçonner les auditeurs de mes conférences qui s'attendent plutôt à des explications théoriques concernant l'art des bruits en tant que tel et qui se retrouvent parfois, comme on a pu le sentir hier soir, face à des explications d'ordre philosophique. Mais je crois que, sans examen des théories philosophiques qui sous-tendent les formes de créations dans ce qu'elles ont de premier, on ne comprend pas finalement ce qui peut avoir donné la musique concrète et puis avoir passé sous silence l'art des bruits on va dire pendant quarante ans! Puisque de 1940-45, jusqu'en 1980, on ne peut pas dire qu'il y ait eu de véritables revendications du travail de l'Art des bruits. Pierre Henry a évidemment créé une pièce qui s'appelle Futuristie en hommage à Luigi Russelo mais avec les a priori philosophiques et théoriques de la musique concrète. Moi j'ai voulu ... J'ai appris aussi les méthodes de la musique concrète. C'est pourquoi j'ai un immense respect pour la musique concrète mais je dis que son baggage, son outil philosophique n'est pas apte à permettre une véritable incarnation de l'Art des bruits tels que le rêvaient ou le proposaient les futuristes italiens. Voilà un peu le sens de mon jugement ou de ma critique concernant la musique concrète! (rires)
HP : Merci !  
Viv : Je vous en prie... Mais je crois que cette approche philosophique. que j'ai effectué était nécessaire sous peine de méconnaître et de passer peut-être à côté des véritables problèmes qui se sont posés à l'intérieur de l'histoire de la musique dite concrète ou électroacoustique. On a vécu quand même en France un retournement extrêmement spectaculaire quand Shaeffer, qui était considéré quand même comme le "deus ex machina" de toute la musique contemporaine, a annoncé que tout son travail était une véritable impasse. Plusieurs ont ressenti plus qu'un simple malaise. Il se sont dit : "Il y a quelque chose."
HP : Ils se sont sentis trahis... Viv : Presque trahis! Parce que dans son traité des objets musicaux, il définit quand même une pratique de la manipulation sonore, de l'objet musical en tant qu'objet. et il est revenu à la nécessaire relativisation de cette notion d'objet. Alors il y est revenu en revenant à la gamme. Et on va dire au chromatisme classique, ce qui est un peu dommage. Et ce que j'ai dis hier soir de manière peut-être un peu provocante mais aussi ironique, il aurait pu peut-être éviter cette impasse et ce retour trop catégorique au chromatisme classique en se laissant instruire par les intentions philisophiques des avant-garde du début du siècle. C'est ce pont qui a été raté, c'est ce pont qui n'a pas été compris. C'est celui que modestement j'essaie de combler en montrant qu'une pratique de l'art des bruits aujourd'hui reste valide, cohérente et efficace aussi. Et qu'elle est même nécessaire, qu'elle est vitale.  
Hél : Vous considérez-vous comme un artiste avant toute chose, avant d'être un philosophe, un théoricien, un historien à la limite... ou un anthropologue? Ou un ethnologue? Viv : Il y a de tout ca en réalité. C'est vrai parce qu'il y a finalement dans mon travail une véritable mémoire d'une période du développement industriel.  
Hél : Où situez-vous l'artiste? Est-ce que vous être d'abord un artiste? Viv : Oui évidemment parce que l'art en tant que tel c'est la possibilité d'un développement créatif donc indéniablement par de-là l'aspect théorique, philosophique, il y a d'abord un immense besoin ou de sentiment - je ne sais pas comment on pourrait l'appeler - de modification et de contact avec la matière et en ce qui me concerne avec la matière sonore. Et visuelle aussi d'un certaine manière parce que le spectacle, le concert est extrêmement imbriqué voulant redonner corps à la scène futuriste, au tableau futuriste tels que le rêvaient les futuristes, de la lumière et du son finalement quand on écoute Prompolini. Quand on fait attention à ce qu'il en est du théâtre futuriste, Bucconi, Prompolini, c'est ce qu'ils désiraient faire. Ils utilisaient du feu, Balave réalisait par exemple les décours pour Diagilev, Malevitch travaillait avec Mayakovsky par exemple, pour le Gifto* public ou " Le triomphe de la négation du Soleil ", des choses comme ça. Je crois qu'avec les moyens actuels, on essaie de redonner ce que les artistes du début du siècle voulaient transmettre et il y a là comme une sorte de filiation artistique dont je ne peux m'échapper. donc, je me dis oui évidemment artiste en premier et puis comme mon art est extrêmement lié à ma réflexion, à ma pensée, je dirais artiste mais aussi penseur, mais aussi philosophe, mais aussi historien . J'ai souvent dit en me citant que "il ne saurait y avoir de conscience créatrice réelle sans conscience historique profonde". On ne peut pas intervenir comme ça en oubliant ou en ne connaissant pas ce qui nous a précédé. Évidemment on peut faire des choses spontanées qui ont d'ailleurs toutes leurs qualités et toute leur cohérence mais à l'heure actuelle on ne peut pas faire l'économie de la mémoire. On ne peut pas faire l'économie de la connaissance des préalables et des expériences antérieures qui nous ont précédé. Enfin c'est mon avis. Je crois que c'est quelque chose dont on ne peut faire l'économie.  
Hél : Parce que le rapport de l'homme au vivant sous toutes ses formes est peut-être dans une accélération ? Viv : Oui, oui. Je crois que tout le monde en est conscient : ca va de plus en plus vite. On passe un cap très très net sur le plan du développement technique et technologique où on est en train de franchir des étapes et à une vitesse qui s'accroît par un phénomène d'entropie si on peut dire. Ça va de plus en plus vite et plus ca va vite je crois et plus il est nécessaire d'avoir de la mémoire. C'est ce que j'essaie, à mon niveau, de vouloir dire et de vouloir exprimer, en tant qu'artiste et en tant que penseur, j'insiste beaucoup sur ce lien entre création et mémoire. Création et conscience. Conscience historique, conscience créatrice. On ne peut pas faire un passage de l'un à l'autre sans qu'elle ne soit, de manière interdépendante, extrêmement liée et extrêmement fusionnée. Donc je crois d'une certaine manière que la pertinence de mon travail vient aussi de cette jonction que j'ai essayé de réaliser avec d'ailleurs les derniers futuristes vivants en Italie auprès desquels j'ai recu, en tant qu'élève, si je peut dire, des considérations théoriques, des considérations historiques concernant ce qu'ils avaient vécu*, ce qu'ils avaient voulu dire. Et ça ma été très très important. Au tout début de ma création en 80-83, je me suis rendu en Italie auprès de ces artistes, de ces anciens futuristes qui avaient à l'époque soixante-dix, quatre-vingt ans et qui m'ont dit "le futurisme n'apparaît pas sur la scène de l'histoire contrairement aux autres avant-gardes à partir de nouvelles méthodes techniques. Il apparaît à partir d'une intention philosophique. Et c'est vrai. Quand on reprend les manifestes et quand on y pense, i n'y a pas d'indications techniques concernant la peinture, concernant la musique. On est là sur des invitations philosophiques. Et à y penser un peu plus, on s'aperçoit que cette invitation de l'art futuriste en réalité n'est pas quelque chose qui apparaît avec MArinetti en 1909 et disparaît avec lui en 1945. Elle a été bien antérieure à Marinetti et qu'on peut retrouver facilement chez les pressocratiques de Héraclite en passant par Parminide jusqu'à aujourd'hui sans être limité à une période historique donnée. Le futurisme est une idée lancée dans l'histoire et qui n'est pas limitée à une période historique. Je crois qu'Héraclite est un parfait futuriste, comprend la dialectique du mouvement dans le monde et dans la vie : c'est quelque chose qui peut être parfaitement contre-signé par les artistes futuristes, par Marinetti, Balla, Bucconi, Prompolini si l'on est conscient de cela alors on ne se fixe pas en tant que moment de l'histoire ou moment précis dans l'histoire de l'art mais en tant que champ universel de la pensée. C'est un peu comme ça que j'essaie de situer mon travail.
Hél : Merci infiniment! (rires) Vous être intarissable! transcription : Carole Legault, André Éric Létourneau


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