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Le CHUM fait enfin son nid

Radio-Canada

Le 24 mars 2005 - Journaliste: Nicolas Duguay

Ce sont des années de débats et d'hésitations, marquées par des milliers de pages de rapports, d'analyses, de commissions et d'avis qui ont finalement trouvé leur conclusion. En effet, jeudi, le gouvernement Charest a annoncé que le Centre hospitalier de l'Université de Montréal sera situé au centre-ville de Montréal, au 1000 de la rue Saint-Denis, sur l'emplacement de l'actuel Hôpital Saint-Luc. 

Jeudi 24 mars 2005

La population québécoise était bien loin de se douter en février 1995, au moment où le ministre de la Santé de l'époque, Jean Rochon, lançait le bal, que dix longues années allaient suivre avant même que ne soit officiellement choisi l'emplacement du mégahôpital montréalais.

Ainsi, en dix ans, les Québécois ont pu observer toute une pléiade d'experts venir sur la tribune proposer soit le site de l'Hôtel-Dieu, soit celui de Notre-Dame, ou encore celui de la Brasserie Molson, ou bien un autre site, à l'angle des rues Saint-Denis et Rosemont celui-là. Jusqu'au Stade olympique, tout y a passé, du plus sérieux au plus inusité.

Tout y est passé, en fait, jusqu'à ce que les deux options du 1000, rue Saint-Denis et de la gare de triage d'Outremont finissent par ressortir du lot, et ce, malgré l'absence de consensus qui a illustré toute la question depuis les premiers balbutiements du projet.

Les partisans

Les principaux partisans du site de la gare de triage d'Outremont sont le recteur de l'Université de Montréal, Robert Lacroix, la famille Desmarais (propriétaire de Power Corporation), Jean Coutu, l'ancien premier ministre Lucien Bouchard, la députée péquiste de Taillon, Pauline Marois, le chef de l'Action démocratique du Québec, Mario Dumont, de nombreux hommes d'affaires, et 439 médecins et chercheurs du CHUM.

Du côté des tenants d'un CHUM au centre-ville, on retrouve le ministre de la Santé, Philippe Couillard, la présidente du Conseil du Trésor, Monique Jérôme-Forget, l'ex-ministre de la Sécurité publique Jacques Chagnon, le représentant de la population au CA du CHUM, Marc Laviolette, le directeur adjoint du CHUM, Sylvain Villiard, le président du Comité des usagers du CHUM, Jean-Marie Dumesnil et l'ancien premier ministre Daniel Johnson.

Des rapports, des études, des avis, des commissions...

De nombreuses commissions d'experts de tout acabit se sont penchées, l'une après l 'autre, sur l'emplacement du CHUM, faisant même craindre, chez des observateurs de la scène politique québécoise, ce que certains ont décrit comme une grave crise décisionnelle dans le gouvernement Charest.

Voici donc quelques-unes de ces contributions à un long et coûteux débat:

Commission d'analyse des projets d'implantation du CHUM et du CUSM

Cette commission, mieux connue sous le nom de commission Johnson-Mulroney, avait été chargée, en novembre 2003, d'analyser et d'évaluer les projets de mégahôpitaux universitaires anglophones et francophones et de faire des recommandations quant à leur poursuite ou non.

Au terme de l'exercice, les anciens premiers ministres Brian Mulroney et Daniel Johnson estimaient que si les deux projets méritaient d'être poursuivis, il importait que les deux centres hospitaliers universitaires doivent davantage concentrer leurs activités sur les soins ultraspécialisés et s'entendre formellement sur leur complémentarité.

C'est aussi dans ce rapport, déposé en avril 2004, que le site du 6000, rue Saint-Denis fut écarté au profit du 1000, rue Saint-Denis. La Commission a aussi recommandé dans son rapport que l'hôpital anglophone soit érigé, lui, sur le site de la cour de triage Glen.

Conclusion : le 1000, rue Saint-Denis

L'Avis concernant les projets du CHUM à Outremont et au 1000, Saint-Denis

Daniel Johson, après avoir coprésidé la Commission d'analyse des projets d'implantation du CHUM et du CUSM avec Brian Mulroney, revient activement dans le dossier à la fin de l'année 2004 en compagnie de Marcel Villeneuve, lui aussi de la précédente commission et ancien directeur de la Régie régionale de Montréal.

Ces deux spécialistes ne se sont penchés, pour la rédaction de leur avis, que sur la première phase du projet, soit le choix de l'emplacement du CHUM.

Leurs conclusions favorisent nettement le 1000, rue Saint-Denis et démolissent le choix d'Outremont, proposé par la communauté des affaires au cours de l'été 2004.

Selon l'avis Johnson-Villeneuve, alors que le 1000 Saint-Denis répond adéquatement aux besoins de la population montréalaise et qu'il donne au gouvernement plus d'assurance quant au respect de ses échéances et de ses coûts de construction, le site d'Outremont, lui, serait bien plus hasardeux.

Ainsi, les deux experts craignent qu'un CHUM à Outremont ne conduise à des dépassements de coûts majeurs. Il entraînerait aussi, toujours selon eux, une hausse des risques pour la sécurité en raison de la proximité avec des convois ferroviaires transportant des matières toxiques.

Son emplacement, à l'extérieur du centre-ville, s'il est perçu comme une plus-value pour les universitaires, est ici décrit comme problématique, puisque relativement éloigné des patients qu'il devra recevoir.

Conclusion : le 1000, rue Saint-Denis

Le Rapport Couture-St-Pierre

Les partisans du site d'Outremont, échaudés par les conclusions de l'avis Johnson-Villeneuve, reviennent à la charge au début de 2005 en présentant le rapport de deux experts des gros chantiers qui recommandent que le CHUM soit construit à... Outremont.

Pour Guy Saint-Pierre, président sortant de la firme d'ingénieurs SNC-Lavallin, et Armand Couture, ancien président et chef d'exploitation d'Hydro-Québec et ex-salarié de SNC-Lavallin, le site d'Outremont est le seul à pouvoir créer une réelle synergie entre le centre hospitalier en tant que tel et la faculté de médecine de l'Université de Montréal.

Toujours selon eux, le site de la gare de triage représente aussi un risque acceptable au niveau de la sécurité.

Conclusion: la gare de triage du Canadien Pacifique, à Outremont

Commission parlementaire spéciale

Cette commission spéciale a été créée par Québec le 21 février 2005 afin de débattre du choix de l'emplacement du CHUM et de faire débloquer un projet qui menaçait de conduire le gouvernement Charest vers un affrontement direct avec certains membres influents et respectés de son gouvernement, à commencer par son ministre de la Santé, Philippe Couillard.

C'est probablement lors de cette commission parlementaire qu'a été scellé, au début de mars 2005, le sort du controversé site de la gare de triage d'Outremont. Ce qui devait être, selon le premier ministre Jean Charest, un exercice d'écoute attentive et de dialogue s'est rapidement transformé, selon l'ancien premier ministre Lucien Bouchard, en « la mise en scène d'une exécution sommaire du projet d'Outremont ».

« Quand on veut noyer son chien, on dit qu'il a la rage », a écrit, ulcéré, Lucien Bouchard, dans une lettre au quotidien La Presse dans laquelle il prenait violemment à partie Philippe Couillard, l'accusant d'être « frileux » et de préférer « les petits pains » aux « grands projets ».

Qu'à cela ne tienne, au sortir de cette commission parlementaire, le premier ministre Charest admettait que « des doutes très très réels ont été exprimés » sur les questions de la sécurité et des coûts dans le projet d'Outremont. Il n'en fallait pas plus pour que l'ensemble du milieu de la santé et tous les observateurs qui suivaient le dossier de près n'estiment que Jean Charest venait alors de changer d'avis et de s'aligner sur son ministre de la Santé.

Conclusion : le 1000, rue Saint-Denis

Pendant ce temps, dans l'Ouest de l'Île...

Tandis que les pages d'études et de rapports s'accumulaient sur les bureaux du ministère de la Santé, la communauté anglophone de Montréal, elle, faisait progresser parallèlement son propre projet de mégahôpital universitaire.

Si le choix du site du futur CHUM a déclenché une vive polémique au sein de la population francophone du Québec, les anglophones, eux, ont discrètement réglé leurs différends pour rapidement statuer que le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) serait construit sur le site de la gare de triage Glen, à Notre-Dame-de-Grâce et Westmount.

Cet autre centre universitaire, qui sera construit au coût de 1,1 milliard de dollars, consistera en un nouvel hôpital de 500 lits qui englobera aussi l'hôpital pour enfants Shriners et probablement un centre d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).

L'Hôpital général de Montréal préservera ses 332 lits et les facultés des sciences de la santé de l'Université McGill resteront sur le campus actuel du centre-ville de Montréal.

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