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Commandites: Jean Lafleur a des trous de mémoire

Radio-Canada

Devant la commission Gomery, l'ancien président de Lafleur Communication Marketing peine à décrire le travail effectué pour justifier la commission de 15 % prélevée par sa compagnie pour la production de la série sur Maurice Richard.

Aux audiences de la commission Gomery mercredi, l'ancien président de Lafleur Communication, Jean Lafleur, n'a pu expliquer à la commission le travail que sa firme avait effectué en retour de la commission de 112 500 $ reçue pour le contrat de la série télévisée sur Maurice Richard.

M. Lafleur a répondu aux questions en parlant, de façon générale, du rôle de Lafleur Communication dans les séries télévisées de 1998 à 2000. « Notre rôle consistait à s'assurer que notre client (Via Rail) obtenait la plus grande visibilité possible, a-t-il dit. J'ai aussi mis en contact Marc LeFrançois, à l'époque président de Via Rail, avec Charles Guité, qui dirigeait alors le programme de commandites ».

Pressé de questions par le procureur associé de la commission, Guy Cournoyer, et le juge Gomery, M. Lafleur a ajouté que son seul souvenir était que son fils Éric et plusieurs autres employés de son agence avaient reçu les invités lors d'un gala donné pour faire valoir les séries. Il a déclaré qu'il ne pouvait fournir davantage d'informations sans documentation additionnelle.

Les questions renvoient au chapitre du rapport de la vérificatrice générale Sheila Fraser sur la série Maurice Richard.

Mme Fraser s'y interroge sur la transaction complexe par laquelle Via a avancé 910 000 $ à la firme L'Information essentielle pour la production de la série, avec Lafleur comme intermédiaire, sans qu'aucun contrat n'ait jamais été signé.

Travaux public a remboursé plus tard Via par l'intermédiaire de Lafleur, qui a prélevé au passage une commission de 15 %.

Jean Lafleur défend son fils

Mercredi matin, l'ancien président de Lafleur Communication a dû s'expliquer sur les sous-contrats de commandites accordés à la firme Publicité Dézert de son fils Éric.

Le procureur de la commission, Guy Cournoyer, l'a interrogé entre autres sur l'octroi de contrats à Publicité Dézert pour l'achat d'articles promotionnels, comme des boules de Noël ou des drapeaux canadiens.

Dézert acquérait les articles, puis les vendait à Lafleur en doublant le montant de la facture. Lafleur les livrait ensuite au ministère des Travaux publics en ajoutant sa propre commission de 12 %.

Ces contrats étaient toujours accordés à Publicité Dézert, sans appels d'offres, parce qu'il y avait urgence, a témoigné M. Lafleur.

Les questions du procureur ont aussi porté sur les relations d'affaires de M. Lafleur avec l'ancien ministre libéral des Travaux publics David Dingwall, qui a reçu d'une entreprise de M. Lafleur (Gescom) 133 549 dollars en contrats de lobbying en faveur de Via Rail, d'août 1998 à mars 1999.

L'arrivée de Gescom dans le dossier aurait servi à masquer l'implication de David Dingwall dans le contrat.

M. Dingwall, qui a été défait aux élections de 1997, dirige actuellement la Monnaie royale canadienne.

Mémoire défaillante

'M. Lafleur affirme par ailleurs ne pas se souvenir d'avoir discuté des commandites avec l'ancien chef de cabinet de Jean Chrétien, Jean Pelletier, au cours de trois ou quatre repas pris ensemble.

M. Lafleur a indiqué que c'est lui-même qui avait invité Jean Pelletier, pour se faire connaître, et qu'il avait assumé le coût des invitations.

Le 11 juin 1998, M. Lafleur a adressé un message par télécopieur à M. Pelletier, pour lui faire savoir que son volume d'affaires reliées aux commandites avait reculé de quelque 5,5 millions de dollars. L'ancien président de Lafleur Communication affirme avoir envoyé ce message après avoir rencontré M. Pelletier de façon fortuite, et qu'il n'a jamais reçu de réponse.

M. Lafleur a témoigné qu'il savait que Jean Pelletier n'était pas le décideur du programme de commandites mais ignorait qu'il était consulté sur les commandites par Charles Guité.

Il a répondu: « Je pense que oui », lorsque le procureur de la commission lui a demandé si c'était la seule fois qu'il avait évoqué les commandites avec le chef de cabinet de Jean Chrétien.

Mardi, à la deuxième journée du témoignage de Jean Lafleur devant la commission Gomery, les avocats ont tenté de savoir comment l'ex-président de Lafleur Communication Marketing a obtenu ses contrats du gouvernement.

Mais ils ont buté sur la mémoire défaillante du témoin. Le juge John Gomery a même dû lui ordonner de fournir des réponses satisfaisantes.

La commission Gomery a tracé le portrait des nombreux liens entretenus par M. Lafleur avec des dirigeants de sociétés d'État et des ministres.

Alors que sous le gouvernement Mulroney, il était perçu comme un conservateur, dès l'arrivée de Jean Chrétien au pouvoir, il a gravité avec succès autour du Parti libéral du Canada.

Des parties de pêche au saumon avec le ministre Martin Cauchon, aux soupers aux cigares dans de chics restaurants avec André Ouellet et Alfonso Gagliano, M. Lafleur était avant tout un homme d'affaires, qui avait tout intérêt à connaître le plus de gens possibles dans son milieu.

Des contrats lucratifs

Mais c'est grâce au programme de commandites que les liens de M. Lafleur avec le PLC ont porté fruit.

L'homme d'affaires a d'abord développé une relation importante avec Charles Guité, le grand responsable des commandites, qu'il a rencontré pour la première fois en 1994. Au fil des parties de pêche et des soupers, il lui a présenté son entreprise, et a obtenu les premiers contrats.

Après le référendum sur la souveraineté de 1995, les choses se sont précipitées, avec de nombreux et lucratifs contrats accordés sans appels d'offres.

« Nous étions une bouée de sauvetage au Québec », a affirmé Jean Lafleur devant la commission Gomery. Il a rappelé le sentiment d'urgence qui régnait à Ottawa à la suite du résultat serré du référendum. Résultat: de 1994 à 1995, le volume des contrats alloués à Lafleur Communication est passé de 52 000 $ à 9 millions de dollars.

Cependant, M. Lafleur n'arrive pas à se souvenir des circonstances exactes qui l'ont amené à recevoir les premiers millions de contrats de commandites. Sur ce point, il a renvoyé le procureur de la commission, Guy Cournoyer, à Charles Guité.

La commission s'est aussi intéressée à l'achat par la firme de Jean Lafleur de diverses marchandises, comme 3,2 millions de dollars de drapeaux canadiens, auprès de l'entreprise de son fils Éric, Publicité Dézert. De plus, Lafleur Communication obtenait une commission supplémentaire de 12 % pour examiner la qualité de marchandises achetées par la firme de son fils.

Enfin, une dizaine d'employés de M. Lafleur ont contribué chacun pour 1000 $ à la caisse du PLC, mais le principal intéressé a affirmé qu'il n'en savait rien. La commission entend revenir sur ce sujet mercredi.

65 millions de dollars en commandites

Lundi, au premier jour de son témoignage, M. Lafleur a reconnu que son agence de publicité avait reçu pour 65 millions de dollars de contrats de commandites de ministères fédéraux et de sociétés d'État, entre 1994 et 2000, année où il a vendu sa société à Jean Brault, de Groupaction.

Il a aussi admis que lui-même, sa femme, sa fille et son fils Éric avaient reçu plus de 12 millions de dollars en salaires et primes, de 1994 à 2000.

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