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Keffieh : interdit à Queen’s Park, mais permis à la Knesset

Deux personnes portent des keffiehs.

Le keffieh est l'objet de bien des débats à l'Assemblée législative de l'Ontario cette semaine. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Armando Franca

Malgré des demandes répétées de l'opposition, le président de l’Assemblée législative de l'Ontario Ted Arnott refuse de revenir sur l’interdiction du keffieh. Si ce vêtement ne peut pas être porté par qui que ce soit à Queen's Park, la situation est tout autre ailleurs au Canada et à l'international, notamment à la Knesset, en Israël.

Il faut dire que le vêtement se trouve dans une zone grise des règlements des assemblées tant que le cas ne s'est pas présenté. Le vêtement est à la fois une écharpe traditionnelle, mais il est aussi devenu un symbole politique.

Le keffieh, coiffure traditionnelle des Bédouins, est devenu l'emblème des Palestiniens.

Les services de plusieurs assemblées politiques contactés par Radio-Canada renvoient prudemment vers leur règlement intérieur.

L’Ontario, exception canadienne

Au Canada, le cas de l’Ontario, où une interdiction explicite du port du vêtement est imposée par le président de l'assemblée, se distingue des autres provinces.

La plupart des assemblées législatives provinciales et territoriales se sont dotées de certaines directives ou règles concernant la tenue vestimentaire des parlementaires, à l’exception de celles de l’Ontario, de l’Alberta et de la Nouvelle-Écosse, notait Kate Korte dans un article publié en 2022 dans La Revue parlementaire canadienne. Et encore, les deux autres assemblées font en fait référence à d’autres textes.

Un portrait de Sarah Jama portant un keffieh.

La députée indépendante Sarah Jama a publié cette photo d'elle portant un keffieh à Queen's Park. Elle affirme qu'elle a été prise en février. (Photo d'archives)

Photo : X/@SarahJama_

Pour justifier sa décision, Ted Arnott a invoqué une pratique établie et le contexte actuel, qui fait selon lui du keffieh un symbole politique.

Le keffieh est un symbole culturel important qui devrait être accueilli dans toutes les institutions canadiennes, a réagi sur X (anciennement Twitter) Arif Virani, le ministre fédéral de la Justice après la décision ontarienne. L'expression de la fierté de son patrimoine devrait être célébrée, et non étouffée.

À la Chambre des communes à Ottawa, le keffieh est autorisé et a été porté en mars par des élus du NPD lors du vote d’une motion non contraignante pour promouvoir la paix au Proche-Orient.

Toutes les assemblées législatives autorisent les députés à porter des vêtements autochtones, traditionnels ou culturels, notait aussi Kate Korte dans son analyse comparée.

En avril, en Alberta, une députée provinciale néo-démocrate a porté le keffieh, ce que l’élue progressiste-conservatrice ontarienne Lisa MacLeod a considéré comme répréhensible et antiparlementaire.

Au Québec, rien n’interdit explicitement le keffieh, même si la question ne s’est jamais posée, indiquent à Radio-Canada les services de l’Assemblée nationale.

Aux États-Unis et en Israël, le keffieh a déjà été porté en Chambre.

En France et au Royaume-Uni, le règlement semble l’exclure, même s’il devrait là aussi passer par une interprétation si la question devait se poser.

En Israël, le keffieh a déjà été accepté

La question du keffieh s’est même posée en 2014 à la Knesset, l'Assemblée d'Israël. Un député arabe et chrétien avait arboré un keffieh pour dénoncer la rhétorique du ministre de l’Intérieur Yitzhak Aharonovich, qui selon lui menait à des agressions d’Arabes.

Malgré des protestations de membres de la Chambre, le président de l’assemblée Yuli Edelstein avait alors considéré que le député était autorisé à le garder. Il avait jadis justifié la situation en indiquant que d’autres députés, dont Yuli Edelstein lui-même, arborent une kippa.

Depuis, le règlement a été modifié, mais pour l’assouplir et autoriser certaines robes et jupes si elles ne sont pas trop courtes.

La question du keffieh ne s’est pas reposée récemment à la Knesset, ni après le 7 octobre.

Je n’ai vu aucun représentant avec un keffieh ces dernières années, mais à ma connaissance il n’y a pas de règle, indique Yaara Di Segni, une porte-parole de la Knesset en communication avec Radio-Canada.

Cela n’apparaît pas dans le code vestimentaire, ajoute-t-elle. Elle souligne qu’une députée arabe porte un hijab et plusieurs députés juifs portent des kippas.

Les représentantes Rashida Tlaib. Cori Bush et Summer Lee portent des keffiehs palestiniens lors du discours de l'état de l'Union du président américain Joe Biden, le 7 mars 2024.

Les représentantes Rashida Tlaib. Cori Bush et Summer Lee portent des keffiehs palestiniens lors du discours de l'état de l'Union du président américain Joe Biden, le 7 mars dernier. (Photo d'archives)

Photo : Reuters / Evelyn Hockstein

Aux États-Unis, des keffiehs face à Joe Biden

Aux États-Unis, à l’instar de l’Ontario, les chambres ont longtemps reposé sur des règles non écrites, et pas forcément appliquées. C’est seulement en 2023 que le Sénat s’est doté d’un règlement écrit pour exiger une veste et une cravate pour les hommes et sans préciser ce qu’est une tenue de bureau pour les femmes.

À la Chambre des représentants, la dernière passe d’arme vestimentaire remonte à 2017, lorsque des femmes ont demandé à pouvoir porter des robes sans manches et que le président de la Chambre a accepté le fait qu'il fallait moderniser la règle.

Lors du discours sur l’état de l’Union de Joe Biden en mars, trois représentantes démocrates ont porté un keffieh. Une manière de souligner, selon elle, l’action insuffisante du président pour la cause palestinienne.

Dans le camp adverse, un représentant républicain a porté un t-shirt Ne jamais se rendre, avec un portrait de Donald Trump, tandis que son homologue Marjorie Taylor Greene portait une casquette Trump 2020.

La représentante républicaine Marjorie Taylor Greene porte une casquette avec l'inscription « Trump 2020 » lors du discours de l'état de l'Union du président américain Joe Biden, le 7 mars 2024.

La représentante républicaine Marjorie Taylor Greene porte une casquette avec l'inscription « Trump 2020 » lors du discours de l'état de l'Union du président américain Joe Biden, le 7 mars 2024.

Photo : Reuters / Evelyn Hockstein

Le Royaume-Uni interdit les écharpes à messages

Au Royaume-Uni, la Chambre des communes renvoie vers son règlement qui demande une tenue de ville qui n’a pas besoin de comporter une cravate et interdit les insignes et uniformes militaires.

Le règlement interdit explicitement les badges ou les écharpes, si celles-ci font la promotion d’une cause commerciale ou non commerciale. Là encore, il faudrait déterminer si le keffieh correspond à cette définition.

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Les députés sont réunis à la Chambre des communes.

La Chambre des communes britanniques, qui a inspiré celle du Canada interdit les écharpes... si elles véhiculent un message.

Photo : Reuters / Reuters TV

En juillet 2023, des députés ont porté une fleur blanche à leur veste, un hommage au génocide de Srebrenica, qui a provoqué la mort de plus 8000 musulmans bosniens en cinq jours en 1995.

En France, un règlement durci et la veste obligatoire

En France, l’Assemblée nationale a durci son règlement après les élections de 2022. L’objectif était d’éviter des tenues trop décontractées à la suite de l'arrivée nombreuse de députés de la gauche radicale, aux tenues souvent plus désinvoltes. Le règlement exige désormais une tenue convenable et non détendue ni, a fortiori, négligée.

Le règlement indique aussi que le port du short ou du bermuda est prohibé. Pour les hommes, le port de la veste est obligatoire, celui de la cravate recommandé, indique le nouveau règlement après des débats sur le fait d’imposer ou non la cravate.

L'Assemblée nationale française de l'intérieur.

L'Assemblée nationale française a durci ses règles en 2022, mais n'a pas de règle spécifique sur les écharpes.

Photo : Reuters / Philippe Wojazer

En 2017, un député s’était vu sanctionné d’un quart de son indemnité pour un mois, après avoir porté un maillot de soccer d’un club amateur, pour défendre le monde sportif associatif et bénévole.

En raison de la laïcité, les signes religieux sont également interdits. Comme en Ontario, les vêtements ne doivent pas donner de slogans de nature politique. Ainsi, si un député ou une députée de l'Assemblée française venait avec un keffieh, cela dépendrait de la façon dont la présidente de l’Assemblée juge le vêtement.

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