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Trois ans après le suicide d’un policier gatinois, est-ce que les choses ont changé?

Le quartier général de la police de Gatineau.

Le suicide du policier Francis Desrochers en mai 2021 a secoué le Service de police de la Ville de Gatineau. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada

21 mai 2021 : le policier gatinois Francis Desrochers met fin à ses jours. 7 avril 2022 : la coroner, Francine Danais, émet neuf recommandations à trois organisations différentes. Deux ans plus tard, Radio-Canada a pu constater que beaucoup de mesures ont été mises en place pour veiller à la santé mentale des policiers de Gatineau.

Au cours de ses démarches qui ont mené à l’élaboration de son rapport, la coroner a constaté que Francis Desrochers, 28 ans, cachait une profonde détresse due à des épreuves dans sa vie personnelle et dans sa vie professionnelle.

Il visait une performance financière, car il voulait se ramasser beaucoup d’argent afin de quitter son emploi. Cela l’amenait à faire plusieurs heures supplémentaires d’un travail qu’il n’aimait plus, avait écrit Me Danais.

Francis Desrochers était loin d’être le seul policier à vivre dans une telle situation. Ces dernières années, une aggravation de la détresse psychologique des policiers a été constatée, notamment par l’Association des policiers et policières.

Dans son rapport, Francine Danais avait soulevé qu’il y a davantage de policiers qui se suicident que de policiers qui meurent en service.

La crainte et la stigmatisation font en sorte que le policier ne demandera pas d’aide ou tardera à le faire. Lorsqu’il le fait, les ressources sont minimes et l’aide est peu spécialisée, [car] les professionnels ne connaissent pas la réalité policière.

Un programme de pairs-aidants

La coroner Francine Danais a émis trois recommandations à l'endroit du Service de police de la Ville de Gatineau (SPVG). La première étant de mettre sur pied rapidement un programme de pairs-aidants.

Avant même la publication du rapport de la coroner, le SPVG confirme qu'il avait sollicité l'ensemble des ressources nécessaires pour entreprendre des démarches visant la santé psychologique des employés.

Le corps policier a également mis sur pied, en avril 2021, un Comité directeur — Volet santé psychologique qui a pour mission d’évaluer les ressources existantes et disponibles et d’en faire l’implantation et la promotion auprès de l’ensemble des employés.

La porte-parole du SPVG Andrée East confirme qu'une entente a aussi été conclue avec l’Université du Québec en Outaouais, en juin 2022, pour le développement et la prestation d’une formation continue en santé mentale. D’une durée de sept heures, cette formation est donnée à des groupes de policiers sur une base volontaire.

La Fraternité des policiers de Gatineau avait été visée par une recommandation de la coroner, soit de contribuer à la mise en place du programme de pairs-aidants en s’assurant qu’au moins un membre du syndicat reçoive la formation de pairs-aidants en plus de ceux qui seront désignés par le SPVG.

Par courriel, le président de la Fraternité des policiers et des policières de Gatineau, Steve Spooner, a confirmé qu’il y a eu une formation de pairs-aidants et que les cinq membres de l’exécutif furent inclus dans celle-ci.

Portrait de Steve Spooner.

Le président de la Fraternité des policiers et policières de Gatineau, Steve Spooner (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Simon Lasalle

Embaucher un intervenant au poste de police

La coroner avait également suggéré à la police de Gatineau d’embaucher un psychologue ou un travailleur social qui travaillerait à partir du poste de police et qui serait disponible dans l’immédiat lors d’un événement potentiellement tragique.

À cet effet, une psychologue est entrée en poste vers la fin du mois d’août 2023, a confirmé le corps policier.

Cette nouvelle ressource a un bureau à même les locaux du SPVG et siège sur le Comité directeur. Elle a pour rôle d’agir à titre d’experte-conseil auprès du SPVG.

Portrait d'Andrée East.

Andrée East, agente relationniste au Service de police de la Ville de Gatineau (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada

Confier l’enquête à un autre corps de police

Lorsqu’un policier meurt tragiquement, Francine Danais souhaite que ’on considère la possibilité de mandater un autre corps de police de l’enquête dans le but d’éviter tout potentiel de conflit d’intérêts et de ne pas placer l’enquêteur attitré dans une mauvaise position.

Une fois de plus, le SPVG a été à l’écoute de la recommandation. La porte-parole du SPVG Andrée East a confirmé que si un autre policier gatinois perdait la vie de façon tragique, l’enquête serait confiée à un autre corps policier, et ce, même si les policiers du SPVG indiquaient se sentir en mesure de le faire.

En revanche, si un agent de la paix d’un autre corps policier décédait dans des circonstances tragiques, le SPVG pourrait lui aussi être appelé à enquêter ailleurs dans la province comme le veut l’entente établie.

Mise au parfum du suivi fait par la police de Gatineau, la famille de Francis Desrochers s’est dite rassurée.

Nous sommes satisfaits des modifications apportées. Nous souhaitons que tous les corps policiers s’inspirent du SPVG pour faire de la santé mentale de leurs agents une priorité.

Une citation de Déclaration de la famille de Francis Desrochers

La vaste majorité des gens qui pensent au suicide ne passent pas à l’acte, il est possible de surmonter la détresse avec de l’aide.

TAO Tel-Aide : 819-775-3223 (Gatineau) ou 613-741-6433 (Ottawa)

Ligne de crise en santé mentale d'Ottawa : 613-722-6914

Ligne québécoise de prévention du suicide : 1 866-APPELLE (277-3553)

Ligne d'aide en cas de crise de suicide : 988

Sur le web : Comment parler du suicide (Nouvelle fenêtre)

Mieux outiller le personnel et les gestionnaires

La coroner Francine Danais avait aussi émis cinq recommandations au ministère de la Sécurité publique (MSP), leur suggérant essentiellement de mieux soutenir les policiers, de mieux outiller les gestionnaires et de faire en sorte que le personnel de soutien psychologique soit adapté à la réalité policière.

Les cinq recommandations de la coroner au MSP :

  • Mettre sur pied un programme national et centralisé de soutien aux policiers en matière de santé mentale, incluant la prévention du suicide;
  • Exiger la mise en place de programmes de soutien par les pairs dans l’ensemble des services de police;

À ces deux recommandations, le ministère de la Sécurité publique a misé sur un continuum de services pour le soutien psychologique des policiers, a expliqué un relationniste par courriel.

Le MSP dit aussi avoir obtenu près de 3 millions de dollars, sur cinq ans, lors du budget 2022-2023 pour déployer les trois grandes mesures phares du continuum de services, soit de développer un programme de formation pour les psychologues et les professionnels de la relation d’aide œuvrant auprès des policiers, un réseau provincial de pairs aidants et une ligne d’écoute 24/7 destinée, entre autres, aux policiers.

  • Faire en sorte que toutes les organisations policières offrent un soutien psychologique systématique à tous les membres du personnel ayant subi un trauma potentiel;

En ce qui concerne la troisième recommandation, le ministère soutient que le soutien psychologique au personnel est de la responsabilité des municipalités, mais qu’il a néanmoins octroyé une subvention de 750 000 $ sur trois ans afin de permettre l’accessibilité des services d’aide spécialisés pour tous les policiers du Québec.

  • Former l’ensemble des gestionnaires des services de police en matière de détection et d’orientation des policiers aux prises avec des problèmes psychologiques;

Cette recommandation sera appliquée par l’entremise du programme provincial de pairs-aidants, qui prévoit le développement d’un volet de formation destiné aux gestionnaires pour clarifier les rôles de chacun et les informer des outils disponibles et des interventions à prioriser pour bien accompagner un policier ayant besoin de soutien psychologique, a détaillé le MSP.

  • Établir un processus de qualification et de certification à l’intention des psychologues désirant intervenir auprès des policiers et des premiers répondants.

La cinquième et dernière recommandation de la coroner a mené à un travail de partenariat entre le ministère de la Sécurité publique et l’École nationale de police du Québec afin de mettre sur pied un programme de formation pour les psychologues et psychothérapeutes œuvrant auprès des policiers.

Déjà 70 professionnels ont débuté le programme et d’autres seront à venir en 2024.

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