Pourrait-on manquer d’eau potable au Bas-Saint-Laurent?
« On tient pour acquis qu’on a de l’eau partout, mais on n’en prend pas bien soin. »
Les réseaux d'aqueduc de Rimouski et de Saint-Anaclet-de-Lessard sont alimentés par les sources souterraines du secteur de la chute Neigette et du barrage de la Neigette. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Shanelle Guérin
Les sécheresses répétées observées dans les dernières années forcent l’Organisme des bassins versants du nord-est du Bas-Saint-Laurent (OBVNEBSL) à revoir ses priorités. L’approvisionnement en eau potable fait maintenant partie des principales problématiques incluses au plan directeur de l’eau 2024-2034 de l’organisme.
Il s’agit d’un des six points prioritaires ciblés par ce nouveau plan, qui servira de guide pour la mise en place d’actions de protection pour les 10 années à venir.
La zone desservie par l’OBVNEBSL comprend 66 municipalités situées entre L’Isle-Verte et Les Méchins.
L’organisme note que la hausse des températures et les précipitations imprévisibles des dernières années ont entraîné une diminution des niveaux d’eau des rivières et des lacs du territoire, ainsi qu’une moins grande recharge des nappes d’eau souterraines.
Une prise d'eau dans la rivière des Trois Pistoles sert à alimenter les réseaux d'aqueduc de Trois-Pistoles et de Notre-Dame-des-Neiges. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Marie-Christine Rioux
Même si on peut avoir parfois plus de précipitations l’été, on peut avoir des sécheresses parce que ça va tomber d’un coup, très fort, donc on accentue le ruissellement. Tout d’un coup, on va avoir beaucoup d’eau dans les cours d’eau, mais ça ne permet pas l’infiltration ni la recharge de la nappe
, explique la coordonnatrice de projet et responsable du plan directeur pour l’OBVNEBSL, Raphaële Terrail.
Les problèmes d’approvisionnement en eau et de quantité d’eau dans les rivières et les lacs s'ajoutent à quatre priorités qui faisaient partie du plan de l’eau précédent.
Six priorités du plan directeur de l’eau 2024-2034 :
Approvisionnement en eau potable
Quantité d’eau (baisse des niveaux d’eau)
Mauvaise qualité de l’eau
Présence d’espèces exotiques envahissantes
Dégradation-destruction de milieux humides et hydriques
Conflits d’usage
Le contexte des changements climatiques est ultra-présent dans ce nouveau plan directeur de l’eau, souligne Raphaële Terrail. [Les priorités ciblées] sont toutes des conséquences des changements climatiques.
Municipalités et agriculteurs vulnérables
Dans la zone desservie par l’Organisme des bassins versants du nord-est du Bas-Saint-Laurent, 70 % de la population est approvisionnée en eau potable à partir de sources d’eau souterraines, qui sont moins vulnérables aux problèmes de quantité et de qualité de l’eau que les eaux de surface, soit les lacs et les rivières.
Ces sources servent de sources d’approvisionnement dans 12 municipalités du territoire de l'OBV, dont Trois-Pistoles et Mont-Joli. De nombreux citoyens et agriculteurs utilisent également des aquifères de surface pour leurs puits privés. Ceux-ci s’assèchent et le manque d’eau paraît survenir plus souvent
, selon l’organisme.
Dans nos rencontres de consultation, ça a été beaucoup mentionné par des agriculteurs qui ont été obligés de recreuser des puits
, indique la chargée de projet.
À lire aussi :
Ce qu’on voit aussi, souvent, c’est que les gens qui ont des puits privés n’ont aucune idée de la qualité de l’eau de leurs puits, ajoute Raphaële Terrail. Certains s’alimentent avec de l’eau potable contaminée.
Les municipalités de Mont-Joli, de Sainte-Flavie et de Saint-Joseph-de-Lepage s'approvisionnent dans la rivière Mitis. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Isabelle Damphousse
En ce qui concerne les réseaux d’aqueduc municipaux, l’Organisme des bassins versants du nord-est du Bas-Saint-Laurent souligne, dans son nouveau plan, que la disponibilité de l’eau est surtout préoccupante pour les municipalités qui puisent leur eau en rivière.
Mieux vaut prévenir
Même s’il ne semble pas y avoir de problème dans les municipalités qui s'approvisionnent dans des sources souterraines pour le moment, Raphaële Terrail rappelle que les besoins en eau sont appelés à croître, notamment à Rimouski, où la population augmente d’année en année.
La responsable du nouveau plan directeur de l’eau note que la région peut s’estimer chanceuse
d’avoir accès à de nombreuses sources d’eau souterraine, mais qu’il ne faut pas pour autant tenir l’eau potable pour acquise. Ça a un peu un effet sournois, parce qu’on ne voit pas d’où vient l’eau, croit-elle. Quand on ne voit pas d’où ça vient, on n’a pas tendance à protéger.
Il n’y a pas de problème pour le moment, mais ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas protéger la ressource. On tient pour acquis qu’au Québec on a de l’eau partout, mais on n’en prend pas bien soin.
Face aux préoccupations liées à l’accès à l’eau potable soulevées dans son plan directeur de l’eau 2024-2034, l’Organisme des bassins versants du nord-est du Bas-Saint-Laurent prévoit principalement miser sur des actions de sensibilisation auprès des municipalités et des citoyens.
On dit qu’on n’aura plus assez d’eau, et on ne peut pas en inventer. La meilleure manière de faire, c’est de sensibiliser les gens à la réduction de leur consommation
, conclut-elle.
D’ici les dix prochaines années, l’OBVNEBSL souhaite entre autres développer une stratégie pour améliorer la qualité de l'eau des puits privés, réaliser une campagne de sensibilisation sur les sources d’eau souterraines et leur vulnérabilité et diminuer la consommation d'eau quotidienne sur son territoire, avec une cible de 200 litres par personne par jour.
