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Le Collège des médecins du Québec guette ceux qui prescrivent trop d’opioïdes

Un flacon de comprimés d'opioïdes est renversé à côté d'un stéthoscope.

Selon les circonstances, les médecins fautifs devront suivre une formation, seront placés sous tutorat ou verront leur pratique restreinte.

Photo : Getty Images

Le Collège des médecins du Québec met en place un programme pour mieux surveiller les prescriptions et ventes d'opioïdes, et pour détecter les médecins qui en prescrivent en trop grande quantité à certains de leurs patients. L’ordre professionnel espère ainsi contrer les surdoses d'opioïdes et les problèmes de dépendance à ces médicaments, et éviter que ceux-ci se retrouvent sur le marché noir.

Le nombre de décès par surdose d'opioïdes nous inquiète.

Une citation de Dr Mauril Gaudreault, président du Collège des médecins du Québec

Le Collège des médecins a planché un an et demi sur ce programme de contrôle de l’usage d’opioïdes et de benzodiazépines.

Dans un premier temps, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) tirera la sonnette d’alarme, à partir d’indicateurs établis par le Collège des médecins, si des ordonnances semblent douteuses, si la force des doses ou la quantité de comprimés sont trop élevées.

Les indicateurs vont permettre à la RAMQ de lever un drapeau rouge pour mieux identifier les médecins qui sont à risque, explique le Dr Gaudreault.

Dans les dossiers identifiés par la RAMQ, des inspecteurs du Collège analyseront ces ordonnances, à l'aide de sept indicateurs de risque établis dans le cadre du programme de surveillance, pour tenter de détecter les médecins qui prescrivent des opioïdes de façon inadéquate.

Un de nos critères, c’est les molécules, le dosage; c’est le nombre de comprimés qui sont prescrits pour une courte durée, explique le directeur responsable de l’inspection professionnelle au Collège des médecins, Anas Nseir. C’est parmi nos indicateurs qui mettent les médecins à risque quand ils prescrivent 200, 300 ou 400 comprimés. Alors, on va [déterminer si] le médecin est à risque faible, modéré, élevé.

Le Dr Gaudreault est dans un studio de radio.

Mauril Gaudreault, président du Collège des médecins du Québec (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Marie-Eve Cloutier

On sait bien que ce type de médicament là, certaines personnes peuvent en trouver sur le marché noir. Mais nous, ce n’est pas ça [que nous allons surveiller], ce sont les prescriptions faites en bonne et due forme par un médecin.

Une citation de Dr Mauril Gaudreault, président, Collège des médecins du Québec

Si les inspecteurs de l’ordre professionnel établissent que les prescriptions d'opioïdes et la pratique du médecin présentent un risque pour la population, ils entreront en communication avec lui afin de déterminer ce qui l’amène à prescrire de telles quantités de ce type de médicament, résume le Dr Nseir.

On va lui demander : "Pourquoi vous faites ces prescriptions-là?" dit-il. "Envoyez-nous des copies de vos dossiers. Expliquez-nous le pourquoi." Et si le moindrement on a des doutes, on va aller faire une visite d'inspection complète dans son bureau.

Des inspecteurs iront alors rencontrer le médecin dans sa clinique ou à l'hôpital et passeront au peigne fin les dossiers de chacun de ses patients. S’ils trouvent des fautes dans ses prescriptions d'opioïdes, le Collège pourrait lui imposer une formation, un tutorat ou encore restreindre ses activités, prévient Mauril Gaudreault.

On va voir ce qu'il est possible de faire pour ce médecin-la, soit améliorer ses compétences en la matière, soit limiter sa pratique. On peut faire en sorte qu’il ne voie plus de personnes qui nécessitent ce type de médicament, note le président du Collège. L’idée, c’est vraiment de faire ça pour deux raisons : protéger le public et s’assurer que les médecins prescrivent avec une médecine de qualité ces médicaments-là.

L’ordre professionnel espère ainsi contrer les surdoses d'opioïdes de même que les problèmes de dépendance, et éviter que ce type de médicaments se retrouvent sur le marché noir, insiste le Dr Gaudreault. Ça peut se retrouver dans la rue. Il faut faire attention à ça aussi, donc détecter ce type de personne là [...] Il ne faut pas se retrouver – et c'est ça, le but préventif – dans des situations où la prescription serait l’initiatrice d’un problème de dépendance chez le patient.

Le Dr Nseir abonde dans le même sens :

C’est ça qui nous fait peur. Qu’est-ce qu’ils vont faire avec les médicaments qui restent? Est-ce qu’ils peuvent les utiliser parce que ça leur donne une euphorie? Est-ce que leur adolescent peut les utiliser parce que c’est oublié dans la pharmacie? Est-ce que ça peut être détourné vers d'autres usages? Et cetera.

Une citation de Dr Anas Nseir, directeur de l’inspection professionnelle au Collège des médecins

Auparavant, le Collège des médecins n’avait pas d’outils précis pour identifier les médecins délinquants.

Au cours des dernières années, il en a d’ailleurs détecté bien peu dans le cadre de ses inspections. Seulement 2 à 3 % des 200 médecins investigués annuellement par l’ordre professionnel avaient une pratique inappropriée ou délinquante à l’égard des opioïdes. Le président du Collège croit qu’il pourrait y en avoir davantage. Avec le programme, on va en identifier plus, c’est sûr. Plus que 2 ou 3 %, assure-t-il.

En juin dernier, le Collège des médecins a produit un rappel des bonnes pratiques afin de limiter le nombre de décès liés à l’utilisation des opioïdes pour répondre aux recommandations faites par un coroner au terme d’une enquête sur un suicide par surdose d’opioïdes.

Selon l’Institut national de santé publique du Québec, il y a eu 508 décès reliés à une intoxication suspectée aux opioïdes ou à d’autres drogues d’octobre 2022 à septembre 2023.

En 2016, le secrétaire du Collège des médecins d'alors, Yves Robert, avait affirmé que certains membres avaient prescrit jusqu'à 3000 comprimés d'opioïdes par mois. On sait que certains patients ont accès à plusieurs centaines, sinon à des milliers, de comprimés par mois, avait-il reconnu.

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