COVID-19 : le gouvernement Higgs poursuivi pour son manque de communication en français
L’avocat Christian Michaud devant le palais de justice de Moncton
Photo : Radio-Canada / Nicolas Steinbach
Un citoyen qui considère que ses droits linguistiques ont été bafoués lors des points de presse sur la COVID-19 entame une action en justice contre la province du Nouveau-Brunswick, l'ancienne ministre de la Santé et le Cabinet du premier ministre Blaine Higgs.
Nelson Cyr, un résident de la communauté de Rogersville, déplore la prédominance de l'anglais lors des points de presse organisés par la province pendant la pandémie.
Ses avocats étaient en Cour du Banc du Roi à Moncton jeudi devant le juge Robert Dysart.
Dans leur requête du 22 août, ils allèguent que les conférences de presse organisées majoritairement en anglais par la province durant la crise sanitaire de 2020 à 2022 ont violé les droits linguistiques de leur client et par ricochet [les droits] de tous les citoyens ayant le français comme langue d'usage
.
Lors d’une mêlée de presse jeudi, Me Christian Michaud, l’un des avocats de Nelson Cyr, a indiqué que la province du Nouveau-Brunswick n’a pas fait un usage équilibré des deux langues officielles
lors de points de presse organisés pendant la pandémie.
Le message qu’on lance, c’est que la langue française, c’est une langue de seconde classe.
Nelson Cyr, qui n’était pas au tribunal jeudi, aurait notamment mal digéré que la province ait exigé qu’une journaliste francophone pose ses questions en anglais lors d’un point de presse sur la COVID-19 le 25 mars 2020.
Traduction de mauvaise qualité
Nelson Cyr et ses avocats déplorent également que les francophones aient trop souvent été obligés d'avoir recours à la traduction simultanée pendant les mises à jour hebdomadaires sur la COVID-19 et que cette traduction ait été de mauvaise qualité.
Le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, écoute la question d'une journaliste au téléphone lors d'un point de presse à Fredericton le 25 mars 2020.
Photo : Radio-Canada
On doit passer par une traduction simultanée, de vive voix, ce qui pose problème parce que le message véhiculé n’est pas le même. On manque de nuances, on manque certains propos
, précise Me Michaud.
Dans ce cas-ci, notre preuve montre que la qualité du message n’était pas la même pour les francophones et pour les anglophones
, ajoute l’avocat.
Un problème qui perdure
Les avocats de Nelson Cyr ont ajouté à leur poursuite une déclaration sous serment portant sur un événement plus récent afin de démontrer que le français continue à occuper trop peu de place dans les communications de la province.
Entre le 14 et le 15 septembre 2023, alors que le gouvernement diffusait des mises à jour entourant la trajectoire de l'ouragan Lee qui se dirigeait vers le Nouveau-Brunswick, l’anglais occupait trop de place au cours des conférences de presse organisées par le premier ministre, le ministre de la Sécurité publique et les autres intervenants des mesures d'urgence, allèguent-ils.
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Bien qu'une traduction simultanée ait été utilisée, Nelson Cyr estime qu'elle était difficile à suivre en raison de la rapidité des interventions, de la traduction saccadée, voire inaudible et incompréhensible.
Les avocats de Nelson Cyr demandent à la province de trouver un mécanisme pour qu'un porte-parole bilingue, soit un autre ministre, soit un membre du gouvernement, assure à l’avenir la traduction des propos du premier ministre ou de tout autre élu unilingue.
Bien qu'une traduction simultanée ait été utilisée lors des mises à jour sur l'ouragan Lee, Nelson Cyr estime qu'elle était difficile à suivre en raison de la rapidité des interventions.
Photo : Radio-Canada / Alix Villeneuve
Me Michaud rappelle par ailleurs que la commissaire aux langues officielles avait déjà fait état des mauvaises communications en langue française du gouvernement du Nouveau-Brunswick durant la pandémie.
Puisqu’ils estiment que la province continue de violer les droits linguistiques des francophones, les avocats de Nelson Cyr demandent la mise en place d’un mécanisme de justice réparatrice et des ordonnances déclaratoires afin de préciser les droits linguistiques dans les communications durant les conférences de presse
, dit Me Michaud.
De leur côté, les avocats de la province soutiennent que le gouvernement a pris des mesures concrètes afin de protéger et de respecter les droits linguistiques de la communauté francophone et demandent que la requête de Nelson Cyr soit rejetée.
Les arguments de la province seront entendus à une audience dont la date reste à déterminer.
Avec des informations de Nicolas Steinbach