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Une autre jeune femme allègue que Robert Miller a abusé d’elle à l’adolescence

Les allégations s’accumulent contre l’homme d’affaires déchu alors que plusieurs femmes s’ajoutent au projet de recours collectif et qu’une nouvelle victime alléguée témoigne des sévices vécus alors qu’elle n’était encore qu’une toute jeune adolescente, rapporte Enquête.

Portrait de Robert G. Miller.

Robert G. Miller

Photo : Forbes/Lumisculpt/Asbed

Une nouvelle présumée victime de Robert Miller réclame 11,4 millions de dollars à l’homme d’affaires, à l’entreprise Future Electronics ainsi qu’à l’ancien vice-président de la compagnie, Sam Joseph Abrams.

Dans une requête introductive d’instance déposée mardi au palais de justice de Montréal, la femme affirme être une des nombreuses victimes du milliardaire montréalais. Robert Miller aurait été pendant des dizaines d’années à la tête d’un réseau d’exploitation sexuelle de jeunes filles mineures ou à peine majeures, selon les informations recueillies par Enquête et diffusées en février 2023.

La présumée victime aurait immigré à l’âge de 13 ans à Montréal, où elle habitait avec sa mère monoparentale dans une situation économique qu’elle décrit comme précaire.

Selon son témoignage, en 2005, alors qu’elle est âgée d’à peine 14 ans, elle trouve un boulot de réceptionniste dans un salon de soins du corps de Verdun. Sauf que, rapidement, on l’aurait formée comme masseuse.

C’est à ce titre que l’adolescente aurait rencontré le milliardaire pour la première fois, en 2005. Selon la demanderesse, Miller l’attendait complètement nu dans la salle de massage. Soucieuse de conserver son emploi, elle lui aurait prodigué un massage, au terme duquel l’homme lui aurait remis une enveloppe de 500 $.

Robert Miller aurait été un client important du salon, avance la plaignante, qui affirme que l’homme d’affaires se serait fait appeler Mister Wonderful par les employées.

À noter que ce salon de massage a été au cœur d'une opération policière (Nouvelle fenêtre) en 2013, dans le cadre d’une enquête reliée au trafic humain.

Les semaines suivant son premier massage, les visites de Miller se seraient multipliées au salon, où il demandait exclusivement à voir la demanderesse. Elle allègue que, dès sa seconde visite, le milliardaire lui aurait réclamé des services sexuels, et dit aussi qu’après chacune de ces visites elle recevait un pourboire allant jusqu’à 1000 $ ainsi que des sacs de hockey remplis de cadeaux pour elle et ses collègues.

La plaignante avance avoir été victime pendant plus de 10 ans de ce qu’elle appelle le réseau Miller. Elle n’avait que 15 ans lorsqu’elle aurait eu une première relation sexuelle complète avec l’homme d’affaires, à sa résidence du 375, rue Olivier, à Westmount. À partir de 2005, elle s’y serait rendue régulièrement, toujours seule. Après chaque rencontre, il lui aurait remis 2000 $ en argent comptant.

Dans sa requête, la demanderesse avance que chaque rencontre avec le milliardaire était robotique et méticuleusement planifiée et que l’objectif était de développer chez ses présumées victimes des sentiments de confort, d’amour et de sécurité.

Selon la demanderesse, Robert Miller portait énormément d’intérêt à sa vie personnelle, ses études, ses rêves et ses ambitions et savait qu’elle allait à l’école secondaire, menant ainsi toute personne raisonnable à comprendre qu’elle était mineure.

La plaignante raconte qu’à l’âge de 15 ans, elle vivait une situation difficile à la maison et qu’elle souhaitait quitter la résidence familiale. Elle allègue que Robert Miller aurait profité de cette situation de vulnérabilité en l’encourageant à quitter sa famille et en lui promettant un soutien financier.

En 2009, pendant le divorce acrimonieux de Robert Miller, la demanderesse aurait été contactée par lui et par ses avocats, qui auraient fait pression pour éviter qu’elle parle aux enquêteurs s’intéressant au dossier.

Robert Miller aurait alors pris des mesures pour se protéger. Tous les rendez-vous devaient notamment passer par son associé Sam Joseph Abrams, alors vice-président à la direction de Future Electronics. Les rencontres, elles, se seraient déroulées au 2100, rue Saint-Marc, un imposant immeuble à logements au centre-ville de Montréal.

Le 2100, rue Saint-Marc, au centre-ville de Montréal.

Le 2100, rue Saint-Marc, au centre-ville de Montréal

Photo : Gracieuseté : Cogeim gestion immobilière

Pendant cette période, la plaignante s’est mise à soupçonner que Robert Miller espionnait ses réseaux sociaux, une peur qui l’habite encore à ce jour.

À l’âge de 24 ans, la demanderesse raconte avoir rencontré un homme qui est devenu son copain; elle a alors entamé ce qu’elle décrit comme une nouvelle vie loin du cercle vicieux du réseau Miller.

Robert Miller aurait alors cessé de l’aider financièrement, ce qui aurait été un coup dur pour la jeune femme. Dans sa requête, elle déclare que cette volte-face l’a replongée dans la précarité et lui a fait prendre conscience des années d’impacts négatifs sur son estime de soi.

Elle signale avoir revu Robert Miller en 2016 et en 2017, à la demande de Sam Abrams. À cette époque, elle aurait rencontré l’homme d'affaires dans un entrepôt du West Island, décrit comme étant aménagé parfaitement pour les besoins de Robert Miller, rempli de vêtements et de sacs à main de luxe, et doté d’une chambre à coucher et d’une salle de bain garnie d’articles de toilette pour femmes.

Elle aurait alors demandé à Miller de l’aider dans sa carrière d’artiste : La demanderesse souhaitait obtenir le soutien du milliardaire, après toutes ces années de loyauté envers lui. Ce dernier aurait répondu qu’elle n’aurait pas d’argent sans relation sexuelle.

La jeune femme affirme avoir dû quitter Montréal et avoir refusé toute invitation à revoir l’homme d’affaires, soucieuse de recommencer une nouvelle vie loin des horreurs qu’elle avait connues depuis l’âge de 14 ans aux mains de Robert Miller et de ses acolytes.

Actif pendant près de 25 ans, selon les témoignages

Sept femmes se sont par ailleurs ajoutées au recours collectif, qui n’a pas encore été autorisé. Leurs témoignages portent sur une période allant jusqu’en 2016, alors que les allégations jusqu’ici n’allaient pas au-delà de 2012.

Les femmes ne sont pas identifiées par leur nom.

Selon des affidavits déposés au dossier du recours collectif, la plupart disent avoir été recrutées par des amies ou des camarades de classe. Elles affirment qu’elles étaient mineures quand le milliardaire les aurait payées des milliers de dollars pour des services sexuels. Plusieurs précisent que l’homme d’affaires connaissait leur âge.

Les présumées victimes relatent que Robert Miller prétendait être un propriétaire de stations de radio à Chicago, ou encore qu’il leur promettait de les aider à devenir top-modèles. Elles soutiennent que leurs rencontres avec lui étaient facilitées par Sam Joseph Abrams, un haut cadre de Future Electronics, et par l'entremetteur Raymond Poulet. Helmut Lippman, lui aussi haut placé chez Future, aurait également joué un rôle.

Les femmes affirment avoir gardé d’importantes séquelles de leurs expériences avec Robert Miller, dont des problèmes de consommation, des conflits familiaux et des problèmes d’intimité. L’une d’elles évoque même une tentative de suicide.

Plusieurs femmes disent qu’elles se sentaient incapables de dénoncer le milliardaire avant la diffusion du reportage d’Enquête, car elles ne connaissaient pas sa vraie identité.

Nous avons maintenant 35 victimes alléguées qui ont signé des déclarations sous serment relatant leurs histoires personnelles sur ce qui s'est passé entre elles et M. Miller alors qu'elles étaient mineures, explique Jeff Orenstein, l’avocat des victimes.

Me Orenstein ajoute que son cabinet fait actuellement des démarches pour que Robert Miller témoigne aussitôt que possible, pour préserver la preuve.

Le clan Miller s’oppose à l’admissibilité de ces témoignages. Le 1er novembre, un juge devra décider si ces affidavits sont admis en preuve. Le cabinet qui représente les victimes, Consumer Law Group, se bat également pour préserver l’anonymat des victimes.

Les défendeurs nient tout

Robert Miller, son entreprise et son entourage font maintenant l'objet de quatre poursuites : trois poursuites individuelles ainsi que le recours collectif. Robert Miller et les autres défendeurs nient toutes les allégations. 

À la rédaction de ces lignes, les avocats des trois défendeurs n’avaient pas répondu aux questions de Radio-Canada.

Quelques heures après la diffusion du reportage d’Enquête en février 2023, Robert Miller a démissionné en tant que PDG de Future Electronics. En septembre dernier, Future annonçait la vente de l’entreprise à une firme taïwanaise pour plus de cinq milliards de dollars.

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