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L’Ozempic, vraiment la panacée pour traiter l’épidémie d’obésité?

Des boîtes du médicaments.

L’Ozempic et le Mounjaro sont des agonistes du GLP-1, qui sont utilisés pour traiter le diabète de type 2. L’effet de perte de poids suscite énormément d’engouement.

Photo : Reuters / George Frey

L’Ozempic n’est pas autorisé pour la perte de poids au Canada. Et pourtant, ce médicament, développé pour traiter le diabète de type 2, crée une frénésie à cause de son effet coupe-faim. L’Ozempic fait partie d’une classe de médicaments qui change la façon dont on parle du traitement pharmacologique de l’obésité. Mais ces traitements sont-ils efficaces? Pour qui? Sont-ils sécuritaires à long terme? Voici 9 questions pour comprendre.

Plusieurs experts sont d’accord : ces traitements pharmacologiques sont une avancée significative dans la lutte contre l’obésité. Mais est-ce que ça va devenir l’outil principal dans la lutte contre l’obésité? Probablement pas, dit d’entrée de jeu le Dr David D’Alessio, chef du Département d’endocrinologie à l’Université Duke.

Le Dr David Lau, endocrinologue praticien et professeur émérite de médecine, de biochimie et de biologie moléculaire à l'École de médecine Cumming de l'Université de Calgary, abonde dans le même sens. Comme avec chaque avancée médicale ou scientifique, on dit que ça va changer la donne. Mais il faut être prudent quand on parle de point tournant, dit celui qui, par ailleurs, a fondé l’organisme Obésité Canada et a été rédacteur-chef de la Revue canadienne du diabète.

Avant de crier victoire dans la lutte contre l’obésité, il reste encore plusieurs questions auxquelles il faut répondre.


L'Ozempic et la perte de poids

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Des boîtes d'Ozempic.

1. C’est quoi un agoniste du GLP-1?

Le tournant, selon les experts, c'est la découverte de l’hormone humaine GLP-1, il y a maintenant 40 ans.

Cette dernière réduit la glycémie en stimulant la sécrétion d'insuline et en réduisant la sécrétion de glucagon lorsque la glycémie est élevée, quand on mange. Ce mécanisme retarde la vidange de l’estomac et augmente l'impression de satiété. Lors d'une hypoglycémie, le GLP-1 (ou les agonistes) diminue la sécrétion d'insuline sans altérer la sécrétion du glucagon.

Cette découverte a permis le développement des agonistes du GLP-1; de molécules qui miment l’action de l’hormone humaine GLP-1.

Utilisés en premier lieu pour le traitement du diabète de type 2, ils ont comme effet une perte de poids importante.

Divers agonistes du GLP-1 sont soit approuvés ou en attente d'approbation. Il faut rappeler que la plupart le sont pour contrôler le diabète de type 2.


2. Quels sont les effets bénéfiques?

Historiquement, il n’était pas possible de réduire le poids corporel d’une personne de plus de 10 % en toute sécurité grâce à des méthodes pharmacologiques. L’arrivée des agonistes du GLP-1 a poussé cette perte de poids au-delà de ce seuil.

Par exemple, les personnes utilisant du sémaglutide (Wegovy, Ozempic) pendant 16 mois perdent en moyenne (Nouvelle fenêtre) 15 % de leur poids initial.

D’autres agonistes du GLP-1 sont à l’étude. Le Dr D’Alessio croit que la science entourant les agonistes du GLP-1 n’en est qu'à ses débuts. J’ai espoir que de futurs médicaments pourraient faire perdre jusqu’à 30 % du poids initial.

Le rétatrutide, qui est en développement, a montré dans les premiers essais cliniques (Nouvelle fenêtre) qu’il serait possible de perdre entre 22 % et 24 % de son poids initial lorsque ce médicament est pris pendant 48 semaines. Le tirzépatide (Nouvelle fenêtre), développé pour traiter le diabète de type 2, pourrait être encore plus efficace.

Une autre surprise est le fait que le sémaglutide semble avoir un effet protecteur sur le cœur. Rappelons que, dans le passé, certains médicaments pour l’obésité ont été retirés du marché en raison des risques cardiovasculaires.

Des résultats préliminaires (Nouvelle fenêtre) annoncés par le fabricant Novo Nordisk montrent qu'une dose hebdomadaire de Wegovy réduit de 20 % le risque d'événements cardiovasculaires graves chez les adultes souffrant de maladies cardiaques et de surpoids ou d'obésité, mais sans antécédents de diabète.

Ces résultats, non révisés par les pairs, proviennent d’une étude nommée SELECT (Nouvelle fenêtre), qui a porté sur 17 604 participants qui ont reçu des injections de Wegovy ou d'un placébo. Ils ont été suivis pendant cinq ans. Les données complètes de cette étude seront publiées en novembre, lors du congrès de l’American Heart Association.

Mais, selon le Dr Lau, qui est l’un des chercheurs canadiens impliqués dans cette étude, les agonistes du GLP-1 pourraient changer la donne dans la prévention de maladies cardiovasculaires. L'obésité augmente le risque de maladies cardiovasculaires, rappelle-t-il.


3. Qui devrait en recevoir?

Ça a été une année dramatique, dit le Dr D’Alessio. Le nombre de patients lui demandant une prescription d’Ozempic a explosé. Tout le monde pense qu’il devrait prendre le médicament. Il y a beaucoup de médiatisation entourant ce médicament et il y a beaucoup de personnes qui sont désespérées de perdre du poids.

D’abord, il faut rappeler que l’Ozempic est autorisé pour traiter le diabète de type 2. Le Wegovy, qui est essentiellement une dose plus élevée que celle d’Ozempic, est approuvé pour la perte de poids.

De plus, les médicaments autorisés pour la perte de poids le sont pour les personnes ayant un IMC de 30 et plus ou pour les personnes ayant une comorbidité et un IMC de plus de 27.

Le Dr Lau prévient par ailleurs qu’il n’existe pas suffisamment de données sur les effets secondaires des agonistes du GLP sur les personnes non obèses qui cherchent à perdre un peu de poids. Il faut être prudent et nous devons étudier la sécurité pour cette classe de personnes.

Le problème n’est pas tant l’Ozempic, croit le Dr Lau, mais le fait que certaines personnes l’utilisent comme si c’était un médicament en vente libre et pour des raisons esthétiques, plutôt que de santé.

La perte de poids n’est pas en soi le but de ces médicaments. Le but est d’améliorer la santé des gens en réduisant le surplus de poids et de gras.

Une citation de Dr David Lau, endocrinologue

Et attention, ajoute le Dr D’Alessio : ce n’est pas parce que les gens perdent du poids qu’ils vont être nécessairement minces. Certaines personnes seront peut-être déçues lorsqu’elles se regarderont dans le miroir.

Le Dr D’Alessio se désole de voir autant de célébrités qui publient des photos avant et après avoir pris ces médicaments pour perdre du poids. Ces médicaments doivent être réservés aux personnes qui en ont vraiment besoin, dit-il.

Ces experts soulignent que pour bon nombre des 1,8 million d’adultes canadiens qui sont obèses, la perte de poids grâce à une meilleure alimentation et à l’activité physique n’est pas suffisante pour avoir un impact significatif sur leur santé. C’est à ce moment qu’une intervention pharmacologique doit être considérée.

Ça change la donne; ils perdent beaucoup de poids et peuvent reprendre certaines activités [physiques] qui n’étaient pas possibles. Ils sont transformés, dit le Dr Lau.

Il précise que ce ne sont pas toutes les personnes présentant un surpoids qui nécessitent une intervention médicale. Une étude a d'ailleurs révélé (Nouvelle fenêtre) que près de 30 % des personnes obèses sont en bonne santé métabolique et n'auraient pas nécessairement besoin de traitements médicaux.

De plus, les médicaments semblent moins efficaces pour la perte de poids chez les personnes atteintes de diabète de type 2. Les chercheurs ne savent pas encore pourquoi.

Les médecins doivent évaluer chaque patient individuellement, insiste le Dr Wharton. Pour certains, la meilleure option est la chirurgie; pour d’autres, les médicaments peuvent être une option.

Le Dr Lau abonde dans le même sens. Ce n’est pas éthique de dire que ce médicament va être donné à tout le monde [qui a un surpoids]. C’est complètement inapproprié et immoral.

Ces médicaments ne devraient pas être prescrits après une simple conversation téléphonique, ajoute l'endocrinologue canadien Daniel Drucker.

Par contre, le Dr Lau croit qu’il faudrait envisager d'utiliser davantage certains de ces médicaments pour les adolescents obèses. Pour la plupart de ces jeunes, les avantages pourraient l'emporter sur les risques. Plus un jeune est obèse tôt, plus il a de temps de développer des complications.

Si les agonistes du GLP-1 ne sont pas adéquats pour tous ceux qui souhaitent perdre du poids, le Dr Wharton croit que la population et la communauté médicale doivent se défaire de certains préjugés entourant la pharmacothérapie dans le traitement de l’obésité. Tout comme il y avait et il y a encore des préjugés concernant les antidépresseurs.


4. Quels sont les risques? Les effets secondaires en valent-ils la peine?

Les effets secondaires les plus couramment signalés chez les patients traités avec des agonistes du GLP-1 sont des problèmes gastro-intestinaux, notamment des nausées, de la diarrhée, des vomissements et de la constipation.

Selon des données publiées dans le New England Medical Journal (Nouvelle fenêtre), environ 10 % des personnes utilisant le sémaglutide ont rapporté des effets secondaires.

Parmi les participants avec des effets secondaires :

  • 40 % ont signalé des nausées;
  • 32 % ont signalé de la diarrhée;
  • 25 % ont signalé des vomissements;
  • 23 % ont signalé de la constipation;
  • 10 % ont signalé des effets secondaires sévères;
  • 7 % ont arrêté le traitement à cause des effets secondaires.

Le fait que 90 % des gens n’ont pas d’effets secondaires majeurs, c’est une avancée majeure, dit le Dr Habener, qui a codécouvert et caractérisé le GLP-1. Il est professeur de médecine à la Harvard Medical School et directeur du laboratoire d'endocrinologie moléculaire du Massachusetts General Hospital.

Auparavant, à chaque fois que les chercheurs augmentaient la dose dans l’espoir de provoquer une plus grande perte de poids, les effets secondaires gastriques devenaient insoutenables.

Cependant, il faut aussi noter que Santé Canada, l'Agence européenne des médicaments (Nouvelle fenêtre) (AEM) et l'Agence britannique de réglementation des médicaments et des produits (Nouvelle fenêtre) procèdent à une évaluation des données portant sur le risque de pensées suicidaires, d'automutilation et de suicide en lien avec l’utilisation d’agonistes du GLP-1.

Le Dr D’Alessio croit que les autorités sont peut-être trop prudentes, mais il comprend qu’il faut être attentifs aux problèmes mentaux et cognitifs potentiels.

Après tout, d’autres médicaments pour l’obésité ont, de par le passé, été retirés du marché pour cette même raison.

Puisque ces nouveaux médicaments parlent davantage au cerveau, nous devons étudier attentivement la sécurité de ces médicaments, ajoute le Dr Drucker, qui est professeur à l'Université de Toronto et scientifique principal à l'Institut de recherche Lunenfeld-Tanenbaum de Sinai Health.

De plus, une étude publiée la semaine dernière dans le JAMA Network (Nouvelle fenêtre) montre que, chez des personnes non diabétiques, le sémaglutide et le liraglutide augmentent les risques de pancréatite, de blocage intestinal et de paralysie de l'estomac.

Près de 5 utilisateurs du sémaglutide sur 1000 ont développé une pancréatite, comparativement à 1 utilisateur sur 1000 pour le bupropion-naltrexone (Contrave), un autre médicament utilisé pour la perte de poids, mais qui n’est pas un agoniste du GLP-1. Pour le liraglutide, il y a eu environ 8 cas de pancréatite parmi 1000 participants.

Environ 9 participants à l’étude sur 1000 prenant du sémaglutide et 7 sur 1000 chez les patients prenant du liraglutide ont rapporté une paralysie de l’estomac, comparativement à 3 sur 1000 pour ceux prenant du bupropion-naltrexone.

L’AEM enquête également sur les risques accrus de cancer de la thyroïde (Nouvelle fenêtre). Des études montrent que le sémaglutide provoque des tumeurs thyroïdiennes chez les rongeurs; les effets sur les humains sont inconnus. C’est pourquoi la FDA déconseille de prendre Wegovy si on a des antécédents familiaux de cancer de la thyroïde.

Par ailleurs, certains anesthésiologistes ont lancé une mise en garde dans le Canadian Journal of Anesthesia (Nouvelle fenêtre) après avoir constaté un nombre croissant de cas d’aspiration lors d’une chirurgie avec anesthésie chez des patients prenant des agonistes des récepteurs du GLP-1. Ils rapportent que les estomacs des patients étaient encore pleins, malgré le fait qu’ils avaient arrêté de manger presque 24 heures avant la chirurgie. Rappelons que ces médicaments ralentissent la digestion et la vidange gastrique.

Des chercheurs au Brésil (Nouvelle fenêtre) ont montré que l’estomac des personnes prenant du sémaglutide contenait des résidus alimentaires 10 jours après avoir arrêté le médicament.

Si les données sont préliminaires, ces anesthésiologistes recommandent l’arrêt des injections de sémaglutide trois semaines avant une chirurgie. L'American Society of Anesthesiologists conseille de traiter les patients qui n'ont pas interrompu le traitement comme s'ils avaient l'estomac plein, ce qui peut signifier utiliser différents protocoles de sédation ou un report de la procédure.

Malgré ces risques, le Dr Lau ne croit pas que ces médicaments sont mauvais. La question est si les effets secondaires sont acceptables en fonction des bénéfices.

Le Dr Wharton est du même avis.

Si vous avez seulement 5 livres à perdre, êtes-vous prêt à prendre les risques associés à ces médicaments, plutôt que d’aller au gym? Mais si vous avez 100 ou 200 livres à perdre et que vous avez un historique familial de diabète, les bénéfices de prendre un tel médicament sont probablement plus élevés que les risques.

Une citation de Dr Sean Wharton, spécialiste en obésité

C’est aux médecins de prescrire ces médicaments de façon responsable, dit le Dr Lau. Si je donne du sémaglutide à un patient, je vais augmenter la dose de façon graduelle pour éviter des effets secondaires importants.

Trois des membres de l’équipe de Rad ont tenté d’obtenir une prescription d’Ozempic même s'ils sont en parfaite santé et si leur poids est sous le seuil auquel on le prescrit habituellement.

Trois des membres de l’équipe de Rad ont tenté d’obtenir une prescription d’Ozempic même s'ils sont en parfaite santé et si leur poids est sous le seuil auquel on le prescrit habituellement.

Photo : Radio-Canada


5. Quels sont les effets à long terme?

Ils ne sont pas encore bien compris, surtout chez les personnes prenant ces médicaments pour traiter l’obésité.

On ne peut pas prédire l’avenir. À date, tout semble bien, mais ça fait juste quelques années, rappelle le Dr Habener.

Deux chercheurs américains écrivent d’ailleurs dans une récente lettre dans le journal Nature (Nouvelle fenêtre) que, même si les études publiées à ce jour démontrent que les bénéfices semblent surpasser les effets secondaires, celles-ci comptent moins de deux ans de suivi.

Des études à plus long terme sont nécessaires, écrivent-ils, pour comprendre comment ces personnes maintiendront leur nouveau poids à long terme et comment la perte de poids affecte les comorbidités associées à l'obésité (ex. : hypertension, hypercholestérolémie et diabète).

Selon l’un des auteurs de cette lettre, Shubham Agarwal, l’engouement pour les agonistes du GLP-1 ouvre la porte à de nombreuses questions, dont :

  • Une perte de poids rapide est-elle meilleure qu’une perte de poids plus lente? Devons-nous donc ajuster à la baisse ou à la hausse le dosage pour accélérer ou ralentir la perte de poids?

  • Est-ce que le dosage devrait être établi en fonction de chaque patient?

  • Quels sont les risques de carences nutritionnelles?

  • Est-ce qu’une perte de poids importante peut mener à un risque accru de sarcopénie (risque de fractures)?

Nous avons la responsabilité de poursuivre la recherche pour mieux comprendre les inconnues, dit le Dr Agarwal, qui est fellow au Département d’endocrinologie de l'University of Texas Southwestern Medical Center.


6. Est-ce que ça remplace l'exercice et la nutrition?

La popularité de ces médicaments vient surtout du fait que l’Ozempic a été très médiatisé et que la compagnie a fait énormément de marketing, dit le Dr Lau.

Cela renforce l'idée selon laquelle Ozempic est LA solution. Mais ce n’est en aucun cas une panacée. L’Ozempic est l’un des nombreux outils qui peuvent aider à lutter contre l’obésité en tant que maladie chronique.

Une citation de Dr David Lau, endocrinologue

Le Dr Lau et le Dr Wharton préviennent que, comme c’est le cas avec les chirurgies bariatriques, les traitements pharmacologiques doivent être accompagnés d’interventions en nutrition et en activité physique.

« Dans notre société, on essaie toujours de prendre le chemin le plus facile. Prendre une pilule ne réglera pas notre déséquilibre entre ce que l’on mange et l’activité que l’on fait », déplore le Dr Lau.

Santé Canada indique (Nouvelle fenêtre) d’ailleurs que ces traitements doivent être utilisés en complément d’un régime alimentaire hypocalorique et d'une augmentation du niveau d'activité physique.

Le Dr Wharton recommande fortement aux personnes prenant ces médicaments d’avoir recours à de la thérapie cognitivo-comportementale. Cela les place dans une bien meilleure position pour gérer leur poids à long terme.

Ce n'est qu'un outil dans la boîte à outils. Il faut rappeler que tous les essais cliniques [pour les agonistes du GLP-1] combinaient des médicaments avec des interventions sur le mode de vie, dit Shubham Agarwal.

Il insiste sur le rôle primordial de l’activité physique et de la saine alimentation dans la prévention de l’obésité. Nous ne pouvons pas éliminer certains facteurs prédisposants, comme la génétique. Mais mieux vaut prévenir que guérir.

L’introduction de médicaments ne devrait pas empêcher les chercheurs d’étudier les impacts de l’environnement sur l’obésité, ajoute le Dr Wharton.

C’est quelque chose que nous ignorons depuis longtemps, en partie à cause de l’influence de l’industrie alimentaire, déplore pour sa part le Dr D’Alessio.


7. Doit-on le prendre à vie?

Un homme prépare un auto-injecteur.

Les traitements comme Ozempic et Wegovy nécessitent des injections hebdomadaires.

Photo : Getty Images / imyskin

Ces traitements, qui nécessitent des injections hebdomadaires, devront-ils être pris toute la vie? La réponse n’est pas claire.

Il faut noter qu’il n’y a pas encore d’études cliniques qui visent à déterminer si et quand les personnes devraient cesser le médicament.

Toutefois, une étude montre (Nouvelle fenêtre) que les personnes qui arrêtent les injections de sémaglutide reprennent les deux tiers du poids perdu un an plus tard.

Le maintien du nouveau poids est le plus grand défi, que ce soit après une chirurgie bariatrique ou en prenant des médicaments, dit le Dr D’Alessio.

Il note les résultats d’une étude qui a montré que le métabolisme de personnes ayant perdu énormément de poids dans le cadre d’une émission de téléréalité avait considérablement ralenti (Nouvelle fenêtre). Le hic, c’est que leur métabolisme ne s’est jamais rétabli aux niveaux d'avant la perte de poids. Ainsi, afin de conserver leur nouveau poids, ces personnes auraient été obligées de manger moins de 1000 calories par jour. La majorité des participants ont plutôt repris tout leur poids, et parfois plus.

On ne comprend pas encore tous les effets sur le métabolisme après une perte de poids importante. Est-ce que les personnes qui arrêtent ces médicaments verront leur métabolisme changé? Reprendront-ils autant de poids que ces participants à l’émission de téléréalité? Il faut être vigilant, avertit le Dr D’Alessio.

Par contre, si les études montrent qu’il faudra possiblement utiliser ces médicaments à vie, le Dr D’Alessio ne pense pas que c’est catastrophique.

Les gens prennent des pilules à vie pour l’hypertension ou de l’insuline pour leur diabète. Comme pour plusieurs maladies chroniques, il faut un traitement chronique pour l’obésité.

Une citation de Dr David D'alessio, chef du Département d'endocrinologie, Université Duke

D’ailleurs, souligne le Dr Wharton, un médecin ne penserait jamais arrêter l’insuline d’un diabétique parce que son glucose est contrôlé. Pourquoi penser autrement pour l’obésité, demande-t-il?

Ce paradigme n’a pas encore été appliqué à l’obésité, ajoute le Dr Lau. On traite encore trop souvent l’obésité comme un problème à court terme. On pense qu’une fois que la personne a perdu du poids, le problème est réglé. On arrête le traitement, la personne reprend du poids et on blâme la personne.

Mais est-ce réaliste? Déjà, les effets secondaires poussent certaines personnes à abandonner le traitement.

Environ 12 % des participants à un essai clinique (Nouvelle fenêtre) sur le sémaglutide ont arrêté le traitement dans les 30 premières semaines en raison des effets secondaires.

Selon une analyse de Reuters des réclamations faites auprès de pharmacies américaines (Nouvelle fenêtre), seulement le tiers des patients à qui on avait prescrit un médicament comme Wegovy le prenaient encore un an plus tard.


8. Est-ce que les gens y auront accès?

Deux femmes sortent des médicaments d'une boîte.

Des employées d’une pharmacie en Grande-Bretagne sortent des boîtes de Wegovy.

Photo : Reuters / SIMPLE ONLINE PHARMACY

De plus, les prix exorbitants et la pénurie de certains produits pourraient décourager les gens à continuer ce traitement.

Le Canada est l'un des nombreux pays confrontés à des problèmes d'approvisionnement d’Ozempic. Wegovy, qui a été approuvé par Santé Canada pour le traitement de l'obésité, n'est pas encore disponible au pays.

Le Dr Habener espère que les problèmes d’approvisionnement pour le Wegovy et l’Ozempic – provoqués par le soudain engouement du public – seront bientôt réglés.

Mais le PDG de Novo Nordisk, Lars Fruergaard Jørgensen, a déclaré dans une entrevue à CNN (Nouvelle fenêtre) qu’il faudra peut-être plusieurs années avant que nous puissions réellement répondre à la demande.

Les quatre experts s’inquiètent surtout du coût exorbitant associé à ces médicaments. Nous plaçons des personnes qui ont désespérément besoin de ces médicaments dans une situation financière difficile. Ça me semble injuste, dit le Dr D’Alessio.

La Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) ne couvre pas ce médicament pour les patients qui ne souffrent pas de diabète.

Le Dr Drucker et le Dr Lau aimeraient que les traitements contre l’obésité soient couverts par les assureurs de la même manière que les médicaments contre le diabète et l’hypertension.

Mais voilà que certains gouvernements songent à restreindre le remboursement des médicaments pour la perte de poids. Le Danemark, par exemple, estime que cela coûterait près de 4 milliards de dollars par an pour rembourser ces médicaments s’ils sont prescrits aux 900 000 Danois qui ont un IMC de 30 et plus.

Une commission publique a par ailleurs recommandé au Danemark (Nouvelle fenêtre) de cesser de subventionner l'utilisation d'Ozempic et d'autres médicaments dits GLP-1.

Et pourtant, ce pays profite énormément du succès de la compagnie danoise Novo Nordisk, qui fabrique l’Ozempic et le Wegovy. Les actions de Novo Nordisk ont grimpé de 40 % depuis le début de l'année. De plus, le ministre des Finances du Danemark a récemment déclaré que le pays serait en récession si ce n’était pas le succès de cette compagnie pharmaceutique, qui fournit par ailleurs la moitié de l’insuline mondiale.


9. Est-ce que ça pourrait traiter d’autres maladies?

Le Dr Wharton et d’autres experts sont convaincus que la prochaine génération d’agonistes du GLP-1 améliorera les résultats en matière de perte de poids.

Outre la perte de poids et les effets bénéfiques sur le cœur, ces experts ont bon espoir qu’on pourra utiliser des agonistes du GLP-1 pour la maladie de Parkinson (Nouvelle fenêtre) et la maladie d’Alzheimer (Nouvelle fenêtre) puisqu’ils semblent réduire la neuro-inflammation, des facteurs bien reconnus dans ces deux maladies.

De plus, puisque ces mécanismes cérébraux qui régulent la suralimentation chevauchent celui de la dépendance, des chercheurs croient que ces médicaments pourraient être utiles dans le traitement de diverses dépendances.

À ce jour, il existe seulement une poignée de petites études (Nouvelle fenêtre) qui démontrent que chez les rats et les souris, la prise de ces agonistes du GLP-1 freine la consommation excessive d’alcool, de nicotine (Nouvelle fenêtre), d’opioïdes (Nouvelle fenêtre) et de psychostimulants.

Une seule petite étude contrôlée randomisée (Nouvelle fenêtre) chez des humains a montré que l'exénatide réduit la consommation d’alcool chez les personnes obèses. Toutefois, on a observé que l'exénatide augmente la consommation d’alcool chez les personnes non obèses. Les chercheurs ne savent pas encore pourquoi.

Il y a des gens qui rapportent qu’ils réussissent à arrêter certaines dépendances, dit le Dr Habener. Même lorsqu’on faisait des études [sur le diabète] il y a 20-30 ans, il y avait des gens qui ne voulaient pas arrêter le traitement parce qu’ils se sentaient mieux. Mais ce ne sont que des anecdotes. Et entre ces anecdotes et la vérité, il y a encore beaucoup de recherche à faire.

Ainsi, il faudra encore plusieurs années d'essais cliniques chez les humains avant de conclure si ces traitements seront utiles pour traiter la dépendance.

Je suis optimiste, dit le Dr Lau. Mais, ça peut prendre une génération avant que la recherche aboutisse. Je prédis que dans 10-20 ans, les choses auront beaucoup changé.

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