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La Russie et l’Inde mènent des campagnes de désinformation contre le Canada

L’hommage à un ancien combattant d'une unité nazie et la divulgation d’informations concernant le meurtre de Hardeep Singh Nijjar propulsent les machines de propagande russe et indienne.

Volodymyr Zelensky, souriant et la main sur le coeur, applaudi par les députés et Justin Trudeau.

L’ovation du Parlement du Canada à Yaroslav Hunka propulse de la désinformation russe.

Photo : Reuters / Blair Gable

De récents incidents diplomatiques impliquant le gouvernement du Canada alimentent des campagnes de désinformation en Russie et en Inde, les deux pays cherchant à tirer profit de la situation pour servir leurs intérêts.

L’ovation du Parlement du Canada à Yaroslav Hunka, un ancien combattant ukrainien d’une unité nazie lors de la Seconde Guerre mondiale, était sur toutes les lèvres à l’international, cette semaine. Pour la Russie, il s’agissait d’une occasion en or pour pousser à nouveau la fausse idée selon laquelle l’invasion de l’Ukraine est en fait une opération contre le nazisme qui serait endémique dans ce pays, selon le président russe Vladimir Poutine.

Nous savons que de nombreux pays occidentaux, le Canada compris, ont une jeune génération qui ne sait pas qui a combattu qui et ce qui s’est passé pendant la Seconde Guerre mondiale. Ces jeunes ne savent rien de la menace du nazisme, a déclaré plus tôt cette semaine le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Cela peut aboutir à ce que le nazisme réapparaisse ici ou là. Nous voyons actuellement qu’il tente pratiquement de prendre corps dans le centre de l’Europe, en Ukraine, et nous luttons contre cela de manière implacable, a-t-il ajouté.

Dans les faits, l’extrême droite demeure marginale en Ukraine et l’importance du phénomène est surtout amplifiée par la propagande russe, comme l’expliquait cet article de Radio-Canada publié au début de la guerre. À titre d’exemple, le candidat présidentiel du parti d’extrême droite Svoboda n’a reçu que 1,62 % des voix lors de la dernière élection ukrainienne. Sans oublier que le président du pays, Volodymyr Zelensky, est lui-même juif et que des membres de sa famille ont été tués lors de l’Holocauste (Nouvelle fenêtre).

Un vieil homme assis au milieu d'autres personnes, les yeux fermés.

Yaroslav Hunka, à droite, est assis dans la galerie des invités à la Chambre des communes et attend l'arrivée du président ukrainien Volodymyr Zelensky, le 22 septembre 2023.

Photo : La Presse canadienne / Patrick Doyle

Le récit de la dénazification joue un rôle central en ce qui concerne les intentions de la Russie pour l’Ukraine dans la dernière décennie, estime Ian Garner, historien et spécialiste de la traduction de la propagande russe. Ce qui s’est produit au Parlement canadien, c’est le meilleur cadeau que l’on peut faire aux propagandistes russes, qui disent depuis des années que Zelensky est secrètement un nazi.

C'est profondément embarrassant pour le Canada et pour Zelensky. Le gouvernement a fait tellement de travail au cours des dernières années pour qu’il soit présenté comme un homme juif, qui est un locuteur natif russe, qui unit différents secteurs de la population ukrainienne… et cela se passe lorsqu’il visite un pays qui est un allié, se désole M. Garner.

La Russie a redoublé ses efforts propagandistes pour tirer profit de la situation ces derniers jours. Mercredi, le ministère russe des Affaires étrangères a, par exemple, partagé sur ses réseaux sociaux une caricature dans laquelle on voit Yaroslav Hunka, Volodymyr Zelensky, le premier ministre Justin Trudeau et la vice-première ministre Chrystia Freeland faire tous ensemble un salut nazi sous une salve d’applaudissements.

Mardi, des comptes X (anciennement Twitter) liés au gouvernement russe ont aussi affirmé que la société postale de l’Ukraine venait de lancer un timbre qui rendait hommage à Yaroslav Hunka avec le slogan : les héros ne meurent pas, photo à l’appui. Cette histoire inventée de toutes pièces a été reprise par plusieurs comptes occidentaux (Nouvelle fenêtre) très suivis sur la plateforme.

Une fausse photo promotionnelle pour un timbre mettant en vedette Yaroslav Hunka. Le mot "FAUX" est superposé sur l'image.

Ce timbre mettant en vedette Yaroslav Hunka a été créé de toute pièce et diffusé par des comptes gouvernementaux russes.

Photo : Twitter @RussianEmbassy

Selon Ian Garner, qui surveille de près les tendances sur les réseaux sociaux russes, la propagande liée à l’incident Yaroslav Hunka est très efficace dans le pays de Vladimir Poutine.

De la désinformation indienne qui voyage jusqu’au Canada

Les tensions entre le Canada et l’Inde sont à leur sommet depuis que Justin Trudeau a fait état d’allégations « crédibles » selon lesquelles l’Inde aurait commandité le meurtre du militant sikh Hardeep Singh Nijjar en sol canadien.

Depuis cette sortie du premier ministre, les médias indiens attaquent le Canada de front (Nouvelle fenêtre). The Hindustan Times a par exemple affirmé sans fondement (Nouvelle fenêtre) que le chef néo-démocrate Jagmeet Singh – qui est de confession sikhe – a tiré les ficelles de Justin Trudeau afin qu’il rende les allégations publiques.

Comme c’est souvent le cas avec les médias en Inde, on cherche à démoniser quiconque va à l’encontre du gouvernement ou s’inquiète par rapport à la justice ou aux valeurs démocratiques du pays, résume Rupinder Liddar, étudiante au doctorat au Département de science politique de l’Université McGill, qui rappelle que l’Inde se classe au 160e rang sur 180 (Nouvelle fenêtre) dans le plus récent classement mondial de la liberté de presse de Reporters sans frontières.

Mme Liddar observe que cette histoire est maintenant dépeinte comme une montée du sentiment anti-Inde dans les médias indiens, ce qui constitue une victoire pour le premier ministre Narendra Modi en vue des élections de 2024. On va probablement voir des gains pour lui dans les sondages, estime-t-elle.

La désinformation indienne a atteint son point culminant cette semaine quand l’ancien diplomate Deepak Vorha a déclaré dans une entrevue télévisuelle (Nouvelle fenêtre) que lorsque Justin Trudeau est venu en Inde pour le G20 ce mois-ci, son avion était plein de cocaïne, selon des rumeurs crédibles. Des chiens renifleurs auraient découvert la substance, selon M. Vorha.

Deepak Vorha en entrevue à une chaîne de télévision indienne.

L'ancien diplomate indien Deepak Vorha (à droite) a affirmé que l'avion de Justin Trudeau était «rempli de cocaïne» lorsqu'il a atterri en Inde pour le G20.

Photo : Capture d'écran

L’histoire a fait grand bruit en Inde, en plus d’être reprise au Canada par le quotidien The Toronto Sun. Le titre original de son article était : L'avion de Trudeau avait de la cocaïne pendant le G20, affirme un ancien diplomate indien, mais il a ensuite été mis à jour pour mettre l’accent sur le fait que le bureau du premier ministre avait démenti l’histoire, la qualifiant de désinformation.

Le journaliste de CBC Evan Dyer, qui était à bord du vol de Justin Trudeau dans le cadre de sa couverture du G20, a aussi démenti l’histoire sur son compte X (Nouvelle fenêtre), assurant qu’aucun chien renifleur n’avait été aperçu à bord. C’est gênant que cet article ait été publié, a-t-il ajouté.

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