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Le crime organisé impliqué dans le passage de clandestins au Canada

Les autorités policières fédérales redoutent une expansion des réseaux de passeurs clandestins, selon un document confidentiel obtenu par Radio-Canada.

Une borne à la frontière canado-américaine.

Selon des informations obtenues par Enquête, des réseaux criminels organisent le transport de migrants jusqu'au Canada.

Photo : Radio-Canada / Romain Schué

Des « groupes criminels organisés » sont désormais bien implantés dans le passage et le transport de migrants, de manière clandestine, vers le Canada, a appris Enquête.

Ces réseaux peuvent aussi utiliser ces routes de migration irrégulière le long de la frontière Canada-États-Unis dans le but de passer des marchandises illicites comme des drogues, du tabac et des armes à feu.

Ces informations confidentielles ont été transmises à l’ancien ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino, à la fin du mois d’avril, pour préparer sa rencontre avec son homologue américain, Alejandro Mayorkas, dans le cadre d’un forum sur la criminalité transfrontalière.

Le document de cinq pages, obtenu par Radio-Canada et dont une partie a été caviardée, a notamment été préparé par la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Cette dernière n’a cependant pas détaillé, dans ce résumé, l'origine et les noms de ces groupes criminels.

Selon nos informations, il s'agit essentiellement d’organisations nord-américaines, comme les cartels mexicains, ou de réseaux criminels actifs plus au sud du continent et qui ont augmenté leur présence au Canada.

On voit une voiture des agents frontaliers américains circuler tout près de la palissade qui sépare les États-Unis du Mexique.

Les cartels mexicains sont de plus en plus impliqués dans le passage de migrants vers les États-Unis, mais également au Canada.

Photo : Getty Images / Scott Olson

Le gouvernement Trudeau mis en garde

La GRC a voulu présenter des renseignements contextuels, puisqu’elle bénéficie de renseignements criminels pertinents pour que les décisions opérationnelles soient fondées sur la meilleure information possible, explique une porte-parole, contactée par Radio-Canada.

Dans cette note, la GRC met fortement en garde le gouvernement Trudeau contre les dangers à la frontière canado-américaine. À l’époque de cette rencontre politique bilatérale, Ottawa et Washington venaient de modifier l’Entente sur les tiers pays sûrs, quelques semaines plus tôt.

Ces changements ont entraîné la fermeture du chemin Roxham, malgré les risques décrits dans cet avertissement.

Désormais, hormis de rares exceptions, ou encore s'ils parviennent à se cacher des autorités canadiennes durant deux semaines, les migrants provenant des États-Unis ne peuvent plus demander l’asile au Canada.

Les modifications apportées [à l’Entente] devraient modifier l'environnement de la menace criminelle et exacerber les menaces existantes à la frontière canado-américaine.

Une citation de Extrait d’une note de la GRC

D’après nos sources, cette prédiction s’est réalisée et cet environnement a bel et bien évolué.

Ce document vient contredire Ottawa, qui répète depuis quelques mois que ces modifications réglementaires à la frontière canado-américaine ont été faites pour la sécurité des migrants.

Les autorités fédérales policières évoquent quant à elles une autre réalité. Les individus peuvent être motivés à traverser la frontière par des itinéraires plus dangereux et éloignés afin d'éviter les forces de l'ordre et de contourner [la nouvelle entente], est-il indiqué.

Ces nouveaux itinéraires mettent également en danger la santé et la sécurité des membres de la GRC qui interviennent, précise la note.

Des hommes avec une valise.

De plus en plus de migrants tentent de rejoindre les États-Unis en passant par des chemins au Québec.

Photo : Radio-Canada / Romain Schué

Trafic humain, travail forcé et abus sexuels

Il est désormais fort probable de voir les réseaux de passeurs étendre leurs opérations, soutiennent les auteurs du document, tout en ajoutant que ces groupes peuvent fournir des refuges aux migrants, des moyens de transport, mais également des documents frauduleux pour entrer au Canada.

Ces passeurs et ces réseaux criminels peuvent aussi exploiter les migrants pendant leur transit vers le Canada et les soumettre à des abus physiques ou sexuels, à du travail forcé ou à du trafic humain.

Les risques de blessures et de décès sont également importants, mentionne la police fédérale, qui partage la responsabilité de la sécurité à la frontière avec l’Agence des services frontaliers.

Huit migrants tentant d’aller aux États-Unis sont d’ailleurs décédés, après un naufrage sur le fleuve Saint-Laurent, à la fin du mois de mars.

Malgré plusieurs relances, l’actuel ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, n’a pas répondu aux questions de Radio-Canada.

La GRC, quant à elle, maintient ses propos et parle d’une réalité mondiale. « La criminalité transnationale n’a pas de frontières; nous vivons dans un monde de plus en plus large et relié. Le passage de clandestins est un fléau mondial auquel il faut remédier à l’aide de mesures tant nationales qu’internationales », assure la porte-parole, Marie-Eve Breton.

Des groupes du crime organisé de différents pays exercent leurs activités à l’échelle internationale afin de réaliser des profits à toutes les occasions et par tous les moyens possibles.

Une citation de Marie-Eve Breton, porte-parole de la GRC

La GRC assure travailler avec ses partenaires canadiens et internationaux pour « repérer des groupes et des réseaux du crime organisé qui sont impliqués notamment dans le passage de clandestins, et à enquêter sur ces groupes et réseaux. »

Une photo floue de migrants dans la forêt.

Les autorités américaines ont arrêté un nombre record de migrants traversant la frontière avec le Québec au cours des derniers mois.

Photo : US CBP

Record de passages clandestins

Depuis la mise à jour de l’Entente sur les tiers pays sûrs, le nombre de migrants entrant au Canada par voie terrestre a fortement chuté. Les installations policières au chemin Roxham sont même en voie de démantèlement.

Cette décision politique n’a cependant pas freiné les demandeurs d’asile, puisqu’un nouveau record annuel se profile.

Comme l’a révélé récemment Radio-Canada, des milliers de personnes arrivent désormais par voie aérienne, principalement dans les aéroports de Montréal et Toronto.

Toutes ces personnes ne restent pas au Canada, et les passages clandestins se multiplient entre le Québec et l’État de New York. Le nombre de migrants utilisant cette voie pour entrer aux États-Unis a explosé au cours des derniers mois.

Selon des données de la police américaine des frontières, plus de 6100 personnes ont été appréhendées dans ce secteur dans les 11 derniers mois. Soit plus que les 10 années précédentes cumulées.

Avec la collaboration de Daniel Tremblay et Martin Movilla

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