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ChroniqueLe vaisseau interstellaire des Flaming Lips

Un chanteur dans une bulle entouré de deux batteurs, deux guitaristes et deux claviéristes sur une scène devant une foule.

La bulle du chanteur Wayne Coyne est devenue la marque de commerce du groupe.

Photo : Getty Images / Finnbarr Webster

« Une minute! » L’annonce a résonné dans le MTelus à 19 h 59. Soixante secondes plus tard, la même voix demandait : « Pouvez-vous éteindre les lumières, s.v.p.? » Visiblement, The Flaming Lips ne voulaient pas que les spectateurs ratent le départ.

Je dis départ comme si nous étions non pas sur un quai ou un tarmac, mais bien au pied d’un vaisseau interstellaire. La bande à Wayne Coyne me fait cet effet en concert depuis des années. On dit parfois qu’un groupe nous amène dans son univers musical. C’est le cas pour The Flaming Lips, mais avec cette notion indéfinissable d’espace-temps en surplus.

Bon, on pourrait aussi dire que le groupe nous amène dans sa bulle. Dès que les lumières se sont rallumées, la foule a hurlé sa satisfaction en voyant Coyne déjà installé au centre de sa sphère translucide qui est devenue la marque de commerce du groupe issu de l’Oklahoma depuis près de 20 ans.

Derrière lui, les deux batteurs arboraient des perruques aux cheveux longs de couleur verte. Derrière eux, le grand écran commençait déjà à briller de couleurs qui allaient nous titiller la rétine pendant plus de deux heures.

Je disais espace-temps? Le groupe qui a pourtant lancé un disque (American Head) durant la pandémie nous a fait faire un joli saut en arrière d’entrée de jeu avec un doublé (Sagittarius Silver Announcement, Silver Trembling Hands) tiré du disque Embryonic (2009). Le vaisseau spatial était peut-être une machine à voyager dans le temps, en définitive. Quoique les propos des chansons – dont les paroles défilaient sur l’écran – étaient diablement actuels.

Le We can be free (nous pouvons être libres) de la chanson d’ouverture avait gardé sa résonnance d’antan. Le message n’avait rien de subliminal en dépit des variantes de couleurs plus psychédéliques les unes que les autres.

Le rythme lent s’est fait plus rapide avec Silver Trembling Hands lorsque ce qui s’apparentait à des coulisses de peinture rouges et blanches semblait dégouliner sur l’écran pendant que des milliers de confettis s’abattaient sur les spectateurs au parterre. La joyeuse folie artistique s’est poursuivie avec l’une des chansons majeures du groupe, Do You Realize??, après qu’une arche multicolore ait été gonflée avec peine pour surplomber Coyne. Tout ça, uniquement lors de trois premières chansons…

Je vous assure qu’il n’y avait plus beaucoup de gens massés dans le MTelus qui se croyaient encore à Montréal en 2022. Musicalement, esthétiquement et on pourrait dire, socialement, à entendre certains commentaires de Coyne, nous aurions pu être dans presque n’importe laquelle des précédentes décennies.

Quiconque ayant déjà assisté à un concert des Flamings Lips sait à quel point chaque chanson peut être un tableau musical, une fresque visuelle. Mais parfois, l’action se passe dans la foule, surtout lorsque Coyne donne ses instructions.

Avant Euthusiasm For Life Defeats Existential Fear, le chanteur a pris soin de demander aux spectateurs de japper comme des chiens canadiens quand il le fallait, de sortir son cellulaire au moment qu’il le fallait… et de sourire tout le temps. À ce moment, Coyne, prévenant au possible, qui demande souvent à la foule si tout va bien, donne l’impression d’être un gourou que ses fidèles suivent allègrement.

Les chansons et les musiques concoctées par le groupe peuvent verser dans un large spectre de styles et d’émotions. Chansons tristes (Waitin’ For A Superman, superbe), fatalistes (Assassins of Youth et All We Have Is Now, toutes deux excellentes), et rassembleuses (Always There, in Our Hearts, frénétique).

Wonder Coyne

Wayne Coyne sur scène devant une vaste projection lumineuse.

Wayne Coyne sait comment divertir une foule, même si ses monologues entre les chansons sont parfois trop longs.

Photo : Invision/AP / Paul R. Giunta

Quand il n’est pas dans sa bulle, Coyne devient… Wonder Coyne. Concrètement, il se drape d’un ensemble qui reproduit le corps – sauf la tête – de Wonder Woman. Particulier, pour le moins. Disons que j’aime mieux la tête de Diana Prince…

Depuis les années 1980, Coyne est le visage des Flaming Lips. Il a de la prestance, du charme et du charisme… et il aime causer. Hier, dans un contexte bien plus intimiste qu’un passage à Osheaga, disons, il en a causé un coup. Trop, par moments.

On comprend parfaitement la nécessité de meubler le vide quand l’équipe technique gonfle tant bien que mal l’arche ou le très grand robot pour la merveilleuse Yoshimi Battles the Pink Robots, Part 1, mais six ou sept minutes d’intro pour Waiting For A Superman, où une anecdote aussi longue pour nous rappeler des emmerdes du passé à la frontière canadienne, tout simplement pour mettre la table de la reprise de Madonna, Bordeline? Non.

Les Flaming Lips jouent sur un scène sur laquelle est érigé un grand robot gonflable.

The Flaming Lips ne manquent pas d'éléments scéniques éclatés pour colorer leurs prestations.

Photo : Getty Images / Finnbarr Webster

Cela dit, absolument rien pour gâcher la sauce, surtout quand le groupe nous sort Your Bats (formidable) de sa caverne. Coyne a précisé qu’il ne s’agissait que de la deuxième interprétation sur scène de la chanson depuis sa création en 2009. On dit merci.

Si nous les spectateurs ont été bercés par Dinosaurs on the Mountains et enveloppés par le doublé Will You Return/When You Come Down, ils ont pu lâcher leur fou avec She Don’t Use Jelly, une chanson qui parle de cul sans prétention, mais sans artifices.

En revanche, le vaisseau spatial a fait planer sans partage durant My Cosmic Autumn Rebellion qui a été précédée d’une séance de vol plané… avec un avion-jouet. Oui, avec The Flaming Lips, tout peut arriver en spectacle. Une frénétique Race For the Prize a bouclé le concert de deux heures et quart avec confettis, serpentins, laser et tutti quanti lorsque Coyne a salué la foule avec des… remerciements sous forme de ballons gonflables.

Un groupe joue sur une scène devant une foule. Au-dessus d'eux, des ballons en forme de lettres qui épellent : Fuck Yeah Montreal.

Le groupe n'a pas manqué de saluer la foule montréalaise de manière colorée.

Photo : Radio-Canada / Philippe Rezzonico

Cela dit, le leader des Flaming Lips, qui a interprété la moitié des chansons dans sa sphère, n’a jamais été surfer (ou rouler) sur la foule comme dans le passé.

Curieusement, la bulle, qui était plus qu’un accessoire de scène, mais bien un effet spécial en soi depuis sa naissance, faisait plutôt office de symbole dans ce contexte. Coyne a peut-être raison. Dieu sait qu’on aurait tous aimé avoir notre sphère durant la pandémie.

Encore ébloui de la production et planant sur les ambiances, je suis ressorti du MTleus avec le sourire dans le visage avant d’arriver deux minutes plus tard au métro pour réaliser qu’une intervention allait paralyser les lignes orange et verte pendant près d’une heure.

Dis donc, Wayne, tu me prêtes ton vaisseau interstellaire pour rentrer chez moi?

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