•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

ChroniqueGorillaz : animation virtuelle et ferveur organique

Trois musiciens sur scène.

Seye Adelekan (basse), Damon Albarn (melodica) et Jeff Wootton (guitare) en action.

Photo : Tim Snow/Evenko

Les enfants adorent les films d’animation et plusieurs vont en regarder avec leurs parents lors de la longue fin de semaine de l’Action de grâce. Quant aux adultes qui aiment l’animation et la musique, ma foi, certains d’entre eux étaient au Centre Bell, samedi soir, pour le concert de Gorillaz.

Je ne sais trop si Damon Albarn et Jamie Hewlett ont cru que leur création commune mêlant musique et personnages animés allait avoir une telle pérennité, mais il faut admettre que ça fonctionne encore, comme n’en ont pas douté une seconde les 9500 spectateurs complètement survoltés.

Pensez-y… Mettre sur pied un groupe virtuel avec des personnages animés nommés 2-D (chant), Murdoc (basse), Noodle (guitare), Russel (batterie) et faire des tournées avec de vrais musiciens qui jouent en synchro avec les personnages? Novateur au possible. Mais ça n’allait durer qu’un temps, n’est-ce pas?

Nenni. Ça fait plus de 20 ans et 7 albums studio que ça dure, le huitième, Cracker Island, étant attendu en février. En définitive, Gorillaz aura dans quelques mois autant de disques studio que Blur, le premier grand groupe de Albarn, né grosso modo 10 ans plus tôt. Pas banal.

Avec Gorillaz, la part d’éléments visuels est largement supérieure à celle utilisée par ses contemporains. Une télévision d’un autre âge apparaît sur l’écran géant dès l’extinction des feux et on voit alors défiler des images d’actualité de toutes les époques parmi lesquelles sont insérées celles des membres du groupe. On nous apprend que nous syntonisions The Static Channel, puis Albarn, ses musiciens et ses choristes (12 en tout) s’amènent sur scène quand un immense Bonjour apparaît. Des Britanniques qui nous saluent en français. La classe.

Un personnage animé est projeté derrière une scène où est installé un groupe de musique.

Damon Albarn et ses personnages de Gorillaz – 2-D, Murdoc, Noodle et Russel – étaient de retour au Centre Bell après quatre ans d’absence.

Photo : Tim Snow/Evenko

D’entrée de jeu, Albarn laisse tomber sa veste et se transforme en chanteur, guitariste et maître de cérémonie pour M1 A1 qui nous téléporte instantanément en 2001, lors de la parution de l’homonyme Gorillaz. En dépit d’un faux départ, Last Living Souls mettra immédiatement le feu à l’aréna.

Albarn, en regardant les spectateurs des premières rangées dans les yeux, chante Are we the last living souls? avec une ferveur que je n’ai jamais vue. En 2018, lors du dernier passage du collectif, cette phrase pouvait être prise au second degré. Après une pandémie qui a tué des millions de personnes et qui a bouleversé le monde comme jamais, ça prenait un tout autre sens et les spectateurs l’ont bien senti.

La première demi-heure du concert avait des allures de rappel, tellement Albarn a constamment mis la pédale au plancher. Bains de foule durant Tranz quand on a vu les personnages de Gorillaz sur l’écran pour la première fois – et pendant 19-2000, groovy et électro, tout à la fois. Complètement habité durant la pulsion irrésistible de White Light, Albarn a bouclé Rhinestone Eyes en l’interprétant à genoux.

Il y a des groupes qui ont une section de cuivres. Gorillaz mise sur les choristes. Pas deux ou trois, comme la plupart des artistes, mais rien de moins que cinq. Avec les spectateurs qui battaient la mesure, les choristes ont joliment coloré Every Planet We Reached Is Dead qui n’est pourtant pas une chanson jojo. N’empêche, ça préparait efficacement Glitter Freeze et sa puissante rythmique martelée sur fond de clavier au moment où un trois-mâts en animation tente de se maintenir sur les flots.

Tournée des grands succès

D’emblée, Albarn et Hewlett on fait preuve d’audace quand ils ont commencé à mettre sur pied ce qui allait être Gorillaz dès 1998. Près de 25 ans plus tard, avec un nouvel album à paraître dans quelques mois, s’il y avait une chose à laquelle je ne m’attendais pas, c’était à une tournée qui allait ressembler à un enchaînement de grands succès.

Plus de la moitié des chansons interprétées étaient tirées de Gorillaz (2001) et de Demon Days (2005), l’indiscutable disque-phare (pas moins de neuf titres…). Cela dit, entendons-nous, personne ne va se plaindre, moi le premier… Rayon nouveautés, nous avons eu droit à la chanson-titre de l’album à venir (Cracker Island) et le clip – déjà produit – qui met aussi en vedette Thundercat. Convaincant.

Si ce clip nous a permis de voir les plus récentes versions animées du quatuor, les spectateurs ont eu l’occasion de revoir de plus anciennes versions vu qu’une foule de vidéos d’antan ont été présentés. Le support visuel durant On Melancholly Hill (sur et sous la mer), El Mañana (la destruction de l’îlot flottant dans le ciel par des avions) et Stylo (la course poursuite avec Bruce Willis), notamment, était le même que lors des précédentes tournées.

Une foule s'excite devant la projection d'un personnage animé.

Les 9500 spectateurs au Centre Bell sont survoltés sous le regard de Murdoc.

Photo : Tim Snow/Evenko

Ça ne gâche pas une seconde le plaisir, mais à ce stade, la perception d’un spectateur qui voyait Gorillaz pour la première fois n’est pas la même que celui qui les a vus à plusieurs reprises. Lors de leur passage au Centre Bell en 2010, je me disais qu’il fallait que je cesse de regarder l’écran, tellement j’étais subjugué. C’était moins vrai en 2018 et encore moins hier soir. Néanmoins, à en juger par l’accueil délirant de cette foule qu’Albarn a désignée comme étant la meilleure qu’on a eue en Amérique du Nord – j’ai tendance à le croire –, il y avait vraisemblablement peu d’amateurs qui en étaient à leur premier tour de piste avec Gorillaz.

Les invités

Dans un concert de Gorillaz, on partage tout. Même le devant de la scène. Albarn ne se fait pas prier pour céder le plancher à l’une de ses choristes ou à un invité. Durant la toujours pertinente Kids With Guns, Michelle Ndegwa a pris l’avant-scène, ce que Rebecca Freckleton et Petra Luke on fait durant l’explosive Dare! Mais parfois, la cavalerie arrive d’ailleurs.

Les gars de EarthGang, qui a assuré la première partie, sont venus faire la fête pour Opium. Bootie Brown s’est déchaîné pendant Dirty Harry, New Gold et Stylo. Grosse réaction, mais peut-être quand même un cran en dessous de Feel Good Inc., qui a donné lieu à une collaboration de Posdnuos et Trogoy, de De La Soul. Du gros, gros calibre… Il est étonnant de voir l’aisance avec laquelle Albarn et sa bande fusionnent le rock alternatif, des éléments de trip-hop, un soupçon d’électro et du hip-hop.

Pour conclure cette soirée multimédia de plus de deux heures, quoi d’autre que la chanson que tout le monde connaît, comme dit une amie à moi, soit le succès de la première heure qui te reste gravé dans la tête durant des heures : Clint Eastwood, dans une version à rallonge dynamitée par la présence de Sweetie Irie.

Damon Albarn l’a dit dans les deux langues durant le concert : Thank you very much, je suis très touché.

C’était indiscutablement réciproque.

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Chargement en cours

Infolettre Radio-Canada et moi

Une infolettre qui vous ressemble, remplie de découvertes et de sujets choisis selon vos champs d’intérêt.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre Radio-Canada et moi.