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Anéantir, de Michel Houellebecq : un orgasme littéraire?

Photo montrant un livre à la couverture blanche

La sortie du nouveau roman « Anéantir » est très attendue par les fans de Michel Houellebecq.

Photo : afp via getty images / THOMAS COEX

Chaque nouveau livre de Michel Houellebecq est un événement littéraire. Anéantir, en librairie ce jeudi, ne fait pas exception. Dans ce pavé de 736 pages, le lauréat du prix Goncourt en 2010 reprend les thèmes qui lui sont chers : l'illusion d'une vie réussie, la mort et la sexualité fantasmatique.

Huitième roman de Michel Houellebecq, Anéantir ne laissera personne indifférent. Ce livre est un appel à l'empathie face à notre déchéance et à celle des autres, inévitable, douloureuse et parfois solitaire.

Dès la toute première phrase, la table est mise pour une autre épopée houellebecquienne alors qu'il est question de la fin novembre, une période où on a la sensation d'être dans le couloir de la mort .

Ce nouveau roman est un drôle d'animal, à la fois farouche et bien docile. Il y a cette première partie qui prend la forme d’un thriller politique avec de mystérieux attentats technologiques anonymes et qui, au final, n'aboutit à rien. 

Sugar Sammy entame une tournée pancanadienne en s'arrêtant à Winnipeg.

Rapidement, le regard d'Anéantir se tourne vers les coulisses de l'élection du président français (on est ici en 2027) avec en toile de fond un ministre de l'Économie et des Finances nommé Bruno Juge, en référence à Bruno Le Maire qui occupe actuellement ce poste. L'écrivain glisse bien un mot sur Éric Zemmour et sur Marine Le Pen .  

De la crise de couple à celle de la cinquantaine

Au cœur de l'histoire se trouve Paul Raison, le principal conseiller du ministre, qui vit plusieurs crises : celle de son couple avec Prudence (en référence à la chanson des Beatles?), celle de sa famille – son père est malade – et enfin celle plus existentielle, la crise de la cinquantaine.

La mort n'étant jamais bien loin, Paul devra (sans jeu de mots) se faire une raison. Tous les thèmes chers à Michel Houellebecq y sont.

Alors que la France souhaite des jours meilleurs, le ministre de l'Économie veille au grain. Paul Raison incarne ce citoyen fortuné, mais tout de même aux prises avec les vicissitudes de l'Occident du 21e siècle. 

Commentateur exceptionnel de son époque, Michel Houellebecq se montre parfois acide. Si Paul et Prudence n'ont pas d'enfant, c’est en partie parce que les enfants aujourd'hui ne suffisent plus à sauver un couple, ils contribuent plutôt à le détruire, écrit-il dans son livre.

Ce roman est un éloge de la vieillesse et lance un appel à la compassion. Il n'y est pas question de confinement ni de pandémie, mais de la disparition d'une génération qui a bâti la France. Dans un des chapitres, Michel Houellebecq écrit : La vraie raison de l'euthanasie, en réalité, c'est que nous ne supportons plus les vieux, nous ne voulons même pas savoir qu'ils existent.  

L'écrivain parle également de l'amour perdu, mais aussi de celui qui dure, plus rarissime : Est-il vrai que la première image qu'on a laissée dans les yeux de l'aimée se superpose toujours éternellement à ce qu'on est devenu?  

Un homme croise les bras.

Michel Houellebecq lors du Festival international du film de Saint-Sébastien

Photo : Getty Images / Carlos Alvarez

Le sexe et les femmes, à la sauce Houellebecq

Au-delà de l'amour rose bonbon, Michel Houbellebecq écrit sans filtre sur le sexe et les femmes dans Anéantir. Plusieurs scènes de sexe mettent en scène des femmes dans un langage cru. Tonton Houellebecq serait-il misogyne? 

Nostalgique, il s'ennuie des personnes appartenant à la génération du baby-boom, carmortes également les baiseuses de légende des années 1970, avec leurs chattes velues

Il ne peut s'empêcher de noter ceci : Il y avait un vieux dicton de la sagesse populaire qui disait à peu près : "Si tu veux épouser la fille, regarde la mère"

Mais ne soyons pas surpris, Houellebecq l'avait mis en mots dans son précédent livre, Sérotonine : Il devait quand même y avoir eu autre chose que le sexe; ou bien non; c'était effrayant à penser, il n'y avait eu que le sexe.

Les hommes : erectio ergo sum

Houellebecq cite Emmanuel Kant et René Descartes dans son roman. Justement, dans son Discours de la méthode, le philosophe français écrivait la célèbre phrase Je pense donc je suis. Livre après livre, Michel Houellebecq reprend son mantra : Je bande donc je suis.  

Au fil des pages, il est beaucoup question de fellation. Une mince métaphore pour la finale d’Anéantir où la mort se passe par la bouche? [Paul] se souvenait de chacune de ses rencontres sexuelles, même des plus brèves, même d'une pipe dans les toilettes d'une boîte de nuit il s'en souvenait, écrit Houellebecq. Même sur son lit de mort, Paul a une longue pipe rêveuse de près de trois heures. 

La carte et le territoire (2010), Soumission (2015) et Sérotonine (2019) demeurent les œuvres phares de cet écrivain français encore encensé par la critique pour son Anéantir. Mais il y a dans ce nouveau roman une lourdeur ainsi qu’une vulgarité aussi redondante qu’épuisante.

Si leur écrin est magnifique – tout en blanc et cartonné –, ces 736 pages n'ont pas cette force et cette fluidité que pouvaient avoir ses précédents efforts.

L’écrivain que plusieurs considèrent comme un oracle précise : Dès qu'on commence à réfléchir, ça va toujours dans le même sens, pas seulement sur le plan sentimental d'ailleurs. La réflexion et la vie sont tout simplement incompatibles.

Alors peut-être faut-il lire avec ses tripes ce dernier Houellebecq plein de vie. Car le cœur a ses raisons.

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