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ChroniqueLes Cowboys de toutes les générations

Le groupe de Repentigny donnait, jeudi soir, le premier de quatre concerts au Centre Bell.

Les Cowboys Fringants, en concert.

Les Cowboys Fringants étaient en concert, jeudi soir, au Centre Bell, à Montréal.

Photo : Steve Caron / @lecaron

Les Cowboys Fringants se sont produits au Centre Bell en 2003, en 2006, en 2009 et en 2014. Cette année, en cette période de déconfinement culturel, ils ont décidé de faire les choses autrement… et de s’y produire quatre fois en un mois.

Karl Tremblay, Jean-François Pauzé, Marie-Annick Lépine et Jérôme Dupras étaient donc de retour au Centre Bell, jeudi, pour le premier de trois concerts consécutifs, auquel s’est ajouté une supplémentaire le 27 décembre.

Je n’ai pas souvenir qu’aucun groupe québécois francophone – un groupe, pas un ou une artiste solo – ait joué trois fois dans la même semaine dans l’amphithéâtre des Canadiens depuis les quatre concerts de Beau Dommage au Forum en 1995. Populaires, Les Cowboys Fringants? La réponse facile serait : Comme toujours. La réalité est : Plus que jamais.

Karl Tremblay l’a évoqué par la bande durant l’introduction de L’Amérique pleure qui a propulsé le groupe à des niveaux jamais atteints en termes de diffusion radiophonique.

Quand on a écrit cette chanson-là, beaucoup de monde pensait qu’on n'existait plus.

Jamais les Cowboys Fringants n’ont disparu du radar, bien sûr, mais il est normal qu’en 25 ans de carrière on ne retienne pas l’attention tous les jours comme au moment de la consécration avec Break Syndical (2002) qui, justement, avait mené à cette première présence désormais légendaire au Centre Bell, le 30 décembre 2003.

Ce qui était intéressant à constater, c’est comment ce vieux groupe de la relève, dixit Tremblay, a attiré une nouvelle génération d’adeptes. Beaucoup de quadragénaires étaient sur place, mais tout autant de trentenaires et de jeunes hommes et femmes à peine arrivés dans la vingtaine. Et on a vu tellement d’enfants âgés de 5 à 10 ans avec leurs parents que je me pensais à un concert des Spice Girls en 1998 ou de Marie Mai il y a dix ans.

D’habitude, je suis là, m’a dit Benjamin, assis dans la rangée derrière moi, après la première partie d’Émile Bilodeau, en pointant l’avant de la scène où étaient déjà agglutinés des milliers d’amateurs sur le parterre sans sièges et sans distanciation. Mais ce soir, je suis là avec mon garçon Nicolas.

Les amateurs de la première heure des Cowboys Fringants ont donc vieilli avec le groupe dont les membres ont désormais tous franchi le cap de la quarantaine. Mais vieux? Il ne faut pas charrier. Tremblay a toujours sa voix puissante, Lépine enchaîne les solos fiévreux de violon, d’accordéon et de guitalélé comme naguère, Pauzé gratte sa guitare et sautille comme jamais, tandis que Dupras demeure l’amuseur public par excellence entre deux moments à la basse, surtout quand il s’improvise chef d’orchestre avec la foule lors d’une version effrénée de La reine.

Un quart de siècle sur les planches, c’est du métier. Et on pouvait le mesurer durant le concert, notamment lors de la séquence d’ouverture, bâtie en crescendo. Départ clin d’œil avec la nouvelle En business et sa phrase clé : Les Cowboys fringants sont de retour en business, enchaînement avec Les maisons toutes pareilles et suivi avec Bye Bye Lou qui a profité des premiers chants fédérateurs de la foule de 11 500 spectateurs. Pas l’amorce de spectacle la plus explosive jamais vue par les Cowboys, mais une expertise évidente de la scène.

En fait, on a un peu eu l’impression qu’une partie de la foule a mis plus de temps à retrouver ses repères que le groupe qui a repris le chemin des salles au cours de l’année. Car avec Sébastien Chouinard (guitare), Daniel Lacoste (guitare), Pierre Fortin (batterie), Jérôme Dupuis-Cloutier (trompette) et Renaud Gratton (trombone) avec le quatuor, les compositions de Jean-François Pauzé, souvent arrangées par Marie-Annick Lépine, étaient magnifiquement enrobées.

Mais, tranquillement, le passé à rejoint le présent. Durant Droit devant, on a vu une fille juchée sur les épaules de son ami au parterre. La traversée (de l’Atlantique en 1774) a ramené l’alcool (whisky) dans les préoccupations du groupe et de la foule, tandis que Pauzé a bouclé une version galopante de Paris-Montréal à genoux devant Lépine qui s’évertuait à casser les cordes de son violon.

Magnifiques nuances

Karl Tremblay, sur scène, chante.

« À tous les déconfinés, nous allons sortir de l’ombre! », s'est exclamé Karl Tremblay, chanteur des Cowboys Fringants.

Photo : Steve Caron / @lecaron

Là où les jeunes Cowboys déchiraient tout sur le passage il y a 20 ans, leurs versions contemporaines maîtrisent l’art d’intercaler les climats, parfois même durant une chanson. L’hiver approche demeure un modèle du genre et, jeudi, elle était drôlement appropriée.

Mais il y a eu aussi un doublé homérique. Plus rien, calmement amorcée, sous les faisceaux des cellulaires, a grossi, vrombi et s’est terminée dans un déluge de décibels avec Marie-Annick, Jérôme et Jean-François martyrisant leurs instruments au-devant de la scène comme Metallica.

Puis, aussitôt, retour à l’émotion pure avec Mon chum Rémi, que Karl a présenté en faisait une référence aux effets néfastes de la pandémie sur notre santé mentale. La chanson, bien sûr, avec ce refrain interprété comme toujours par des milliers de voix. La magie ne se dément pas avec les années.

L’Amérique pleure ayant uni dans le moment et dans le geste – tout le monde s’est levé – les amateurs de tout âge des Cowboys, le groupe s’est offert un doublé coup de poing avec Ti-cul et La manifestation. Cette dernière a eu droit à une jolie animation sur fond vert avec la petite bagnole de la pochette de Break Syndical et un « MANIFESTONS » en lettres majuscules sur l’écran rectangulaire.

Parmi les moments forts, comment ne pas craquer pour la récente et fort touchante Sur mon épaule, tirée de l’album Les Antipodes (2019) qui n’avait jamais été interprétée au Centre Bell. Osmose? Unisson? Parfaite complémentarité? Au choix.

Mais ces Cowboys bien actuels dans leur répertoire peuvent aussi replonger à tout moment dans leur passé fringant. Nous avons eu droit à une version de cinq secondes de Su’ mon Big Wheel (c’tait l’fun) – deux secondes plus courte que la version sur disque de Motel Capri – et à une claque monumentale qui a rappelé aux plus anciens admirateurs les concerts du tournant du siècle au Petit Campus ou au Spectrum.

Comme d’habitude Joyeux calvaire! a allumé la mèche du baril de poudre et Awikatchikaën l’a fait sauter avec la contribution la plus incendiaire au violon de Marie-Annick Lépine. Là, nous avions l’impression d’être de retour au Centre Bell en 2003 avec un parterre en folie et quelques spectateurs portés à bout de bras par les autres. Ça a fait boum!

Au rappel, après l’habituelle distribution de gazous aux spectateurs durant Le Shack à Hector, le groupe a bouclé la soirée avec de solides interprétations de Marine marchande et du classique Les étoiles filantes, où Émile Bilodeau et son groupe sont venus rejoindre les Cowboys sur scène.

À tous les déconfinés, nous allons sortir de l’ombre! a lancé Tremblay qui n’a cessé de dire à quel point les retrouvailles avec la scène lui ont fait du bien. Les spectateurs croyaient bien que c’était terminé – Les étoiles filantes étant souvent le point final d’un concert des Cowboys –, mais Pauzé a vendu la mèche en signalant à la foule de crier plus fort en sortant de la scène.

Les Cowboys sont revenus illico sans leurs musiciens pour entonner Un p’tit tour, la chanson de clôture de Motel Capri (2000), histoire de mesurer le chemin parcouru, a noté le chanteur.

Il sera fort intéressant de voir les variations qu'apporteront les Cowboys à leur sélection des chansons lors des prochains concerts au Centre Bell, eux qui n’aiment pas faire dans la redite. Jeudi soir, ils ont fait impasse sur rien de moins que des hymnes comme En berne, Toune d’automne et Heavy Metal.

C’est à la fois l’heureux et le déchirant problème qui se pose quand on a 11 albums studio et assez de chansons rassembleuses et fédératrices pour remplir deux disques de grands succès.

Mais le groupe plus populaire que jamais a trois autres concerts au Centre Bell pour faire le tour de son répertoire s’il le désire. Et maintenant deux générations d’amateurs pour les apprécier.

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