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The Beatles, Let It Be et la magie de Giles Martin

Giles Martin est un magicien qui a plus d'un tour dans son sac si l'on se fie à ses remixages de Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band, d'Abbey Road et de l'album blanc des Beatles. Au tour de Let It Be d'être réédité par ses soins cette semaine. Entrevue avec le gardien de la mémoire d'un des plus grands groupes de la planète.

Un homme pose dans un studio d'enregistrement de musique.

Le producteur musical Giles Martin

Photo : Alex Lake / CA Management

À tour de rôle, les admirateurs des Beatles que sont Michel Rivard, Gilles Valiquette et Pierre Marchand me l'avaient bien dit : Giles Martin est la personne la plus gentille au monde, après bien sûr son père, le regretté George Martin, que plusieurs considéraient comme le cinquième Beatle.

Sur Zoom, Giles Martin est tout sourire pour nous parler de son remixage de l'album Let It Be (1970) : Je suis chanceux d'avoir reçu les clés du château. Je peux expérimenter des choses que les fans des Beatles ne peuvent que rêver de faire. Mon seul souhait est qu'on ait le sentiment d'être en studio avec les Beatles.

Let It Be est l'album le plus incompris des Beatles, sans doute parce qu'il a été enregistré dans le chaos et qu'il est sorti après la séparation du groupe. Conscient d'avoir le plus beau métier au monde, celui de remixer les bandes originales des chansons des Beatles, Giles Martin tient à être à la hauteur de la responsabilité qui lui incombe : Le défi avec l'album Let It Be a été de mettre ensemble des fragments d'enregistrements. [...] Il y a eu trois producteurs sur le projet, Phil Spector, Glyn Johns et mon père, George Martin. Le défi a été de créer une certaine unité.

Le reportage de Louis-Philippe Ouimet

Let It Be et le laisser-aller

L'enregistrement et la sortie de Let It Be ont été un véritable chemin de croix. Tout a commencé le 2 janvier 1969 lorsque les Beatles, dans un mélange de cinéma-vérité et de téléréalité, ont voulu réaliser un album sous l'œil des caméras du réalisateur Michael Lindsay-Hogg pendant trois semaines. Installés dans le froid du Twickenham Film Studio, situé près du cœur de Londres, les quatre Beatles voulaient retourner à un son plus rock et plus cru. Même s'ils étaient bien conscients d'être filmés, ils n'ont pu s'empêcher de se chamailler par moments. On peut d'ailleurs entendre Paul McCartney dire à la blague pendant ces enregistrements : Cinquante ans plus tard, ils diront que les Beatles se sont séparés parce que Yoko Ono s'est assise sur un amplificateur. Après un désaccord (aussi enregistré) sur sa façon de jouer de la guitare, George Harrison a quitté les Beatles le 10 janvier pour revenir quelques jours plus tard, à condition de changer de lieu d'enregistrement. Ce qui a été fait.

Après la tempête (du 2 au 16 janvier 1969 à Twickenham), il y a eu un retour au calme et c'est dans la joie que les Beatles se sont retrouvés, du 21 au 31 janvier, dans le sous-sol de leur siège social, situé au 3 Savile Row, pour d'autres séances d'enregistrement. Le mythique concert impromptu de 42 minutes le 30 janvier 1969 sur le toit du bâtiment sera le point culminant du projet. La presque totalité des chansons de Let It Be ont été enregistrées au 3 Savile Row. Insatisfaits du résultat, les Beatles ont finalement donné le mandat au producteur Phil Spector de faire un album avec les enregistrements. J'ai beaucoup de respect pour Phil Spector, mais je ne suis pas certain qu'il était le bon producteur pour les Beatles. Paul McCartney a déjà dit qu'il n'était pas le bon producteur pour le projet et qu'il n'était pas content des arrangements originaux. Nous avons donc revu la balance du son original. Je voulais que cet album sonne plus comme les Beatles que comme Phil Spector, raconte Giles Martin.

Let It Be, revu et corrigé

À l'origine, les séances en studio des Beatles pour Let It Be ont été immortalisées avec des enregistreuses Nagra, sur des rubans d'un quart de pouce. Près de 150 heures de matériel audio a été volé et piraté. S'il a été retourné à son propriétaire en 2003, ce matériel s'est entre-temps retrouvé sur des disques pirates et plus tard sur le web. La plupart des enregistrements pirates sonnent comme le matériel auquel j'ai eu accès pour remixer Let It Be, affirme Giles Martin. À un certain moment, il y a eu une volonté des Beatles de racheter les enregistrements pirates pour les coller au film Let It Be. C'était la seule source audio disponible. Mais la police a retrouvé les rubans. J'ai donc pu améliorer la qualité.

Les Beatles offrent un spectacle sur le toit d'un immeuble à Londres.

Le mythique concert impromptu du 30 janvier 1969 sur le toit du 3 Savile Row, à Londres

Photo : Getty Images / Evening Standard

Cinquante ans après sa sortie originale, l'album Let It Be revit sous un jour plus étincelant, avec un univers sonore réimaginé. Dès la première écoute, le résultat est spectaculaire.

Le remixage de la chanson qui ouvre le disque n'a pas été une mince affaire. La chanson Two of Us n'est pas un bon enregistrement multipiste, nous dit en riant Giles Martin. Man, je me suis débattu avec le mixage de cette chanson, ajoute-t-il. Il y avait de la distorsion et j'ai beaucoup travaillé pour enlever cette distorsion ainsi que le retour de son. J'ai fait le choix de séparer les voix de Paul McCartney et de John Lennon sur chaque haut-parleur parce qu'après tout la chanson s'intitule Two of Us. C'était tout un défi, cette piste, mais maintenant, je pense que le résultat est bon.

Dans la chambre forte des Beatles

La réédition et le remixage de l'album Let It Be sont un événement musical en soi, révélant des secrets trop longtemps gardés dans la chambre forte des Beatles. La version super deluxe contient 27 prises inédites et le mixage original de Glyn Johns. Pas question de sortir l'intégralité des 150 heures enregistrées en janvier 1969 ni d'endisquer l'intégralité du concert donné sur le toit du 3 Savile Row le 30 janvier 1969 : L'intégralité du concert sur le toit va se retrouver dans le film Get Back, de Peter Jackson (qui sortira le 25 novembre prochain sur Disney+). Je pense que ce concert doit être entendu avec de la vidéo. [...] Paul McCartney m'a dit : "Combien de versions de la chanson Get Back les gens veulent-ils entendre?"

Le mixage de Glyn Johns est différent de celui de Phil Spector. On peut enfin entendre la toute première version de Let It Be. Glyn Johns a fait exactement ce que les Beatles lui avaient demandé. Il est un des producteurs les plus instinctifs que je connaisse, dit Giles Martin.

Pour la suite, il n'ose pas trop s'avancer : Les fans veulent un remixage des albums Rubber Soul et Revolver. Mais je dois trouver une façon de bien les faire. Je ne le fais pas pour l'instant, mais on verra. La vraie réponse est que j'ai probablement besoin que vous veniez m'aider pour faire ce travail.

Giles Martin qui m'invite à travailler en studio sur le remixage des chansons des Beatles?

Je vous le disais au début de l'article, Giles Martin est une des personnes les plus gentilles sur la planète Beatles...

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