Décriminalisation des drogues dures : la C.-B. va-t-elle suivre l'Oregon?
Depuis le début de l’année, 1198 personnes ont succombé à une surdose en Colombie-Britannique.
Photo : Radio-Canada / Ben Nelms
Prenez note que cet article publié en 2020 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Si l’Oregon entre dans l’histoire en devenant le premier État à dépénaliser la possession de drogues dures, la Colombie-Britannique, épicentre canadien de la crise des opioïdes, peine encore à faire entendre son message à Ottawa.
Parmi les questions sur le bulletin des électeurs de l'Oregon, mardi, figurait une question référendaire sur la décriminalisation de la possession en petite quantité d'un certain nombre de drogues dites dures, comme l'héroïne ou la méthamphétamine, pour usage personnel (Initiative 110 (Nouvelle fenêtre)). En fin d'après-midi, mercredi, une majorité des électeurs dont les votes avaient été comptés s'était prononcé pour cette mesure.
Entre-temps, la crise des opioïdes continue d’étendre son emprise en Colombie-Britannique. En juillet dernier, le premier ministre de la province, John Horgan, a demandé au gouvernement fédéral de décriminaliser la possession simple de drogues pour contrer la crise sanitaire.
Malgré le soutien de plusieurs experts et des autorités sanitaires de la province, Ottawa campe sur ses positions. C'est un sujet politique brûlant
, selon Ryan McNeil, directeur de la recherche sur la réduction des méfaits, programme de médecine de la toxicomanie à l’Université de Yale, et ancien résident de Vancouver.
La crise des surdoses est un échec politique.
Nous savons, grâce à des décennies de recherche, que traiter la consommation de substances comme un problème de justice pénale est contre-productif
, continue M. McNeil.
Le quartier Downtown Eastside de Vancouver est connu pour sa population itinérante et son épidémie de surdoses.
Photo : Radio-Canada / Ben Nelms
Si l’expert approuve la décision prise par l’Oregon, il affirme être aujourd’hui préoccupé
par le manque de décision claire de la part du gouvernement canadien sur ce sujet.
Le statu quo ne peut pas continuer. Et cela signifie qu'il faut utiliser tous les outils dont nous disposons, qui comprennent des réformes de justice pénale sensées et du bon sens comme la décriminalisation des drogues en garantissant son accessibilité aux personnes dans le besoin
, explique M. McNeil.
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Décriminaliser, mais pas seulement
Même opinion du côté du criminaliste et professeur à l'Université de la Vallée du Fraser Yvon Dandurand, qui qualifie de traditionnels
et de complètement désuets
les contrôles d'accès aux drogues en Colombie-Britannique.
On commence à comprendre que nos méthodes de contrôle des problèmes de toxicomanie n'ont probablement jamais fonctionné
, dit le professeur.
En 2003, Vancouver a ouvert le tout premier centre d'injection supervisée en Amérique du Nord.
Photo : Shutterstock / ndede
Il explique toutefois que la décriminalisation des drogues doit également être accompagnée d’investissements plus poussés dans différents secteurs.
Décriminaliser aura peu d'impact sur les problèmes graves de santé mentale et de dépendance profonde à long terme.
Selon Yvon Dandurand, l'amélioration de l'accès à des services de santé pour toutes les personnes qui souffrent de dépendance ou qui ont des problèmes de santé mentale est primordiale dans la lutte contre cette crise sanitaire.
Une question de temps?
Médecin dans le tristement célèbre quartier Downtown Eastside de Vancouver, Derek Chang affirme que la province doit redoubler d'efforts en ce sens. Il raconte que plusieurs de ses patients ont peur de se faire aider
par crainte de jugement ou de représailles des autorités.
Si Yvon Dandurand est persuadé que la décriminalisation des drogues au Canada n’est qu’une question de temps
, le Dr Chang, quant à lui, espère que la province deviendra très bientôt un modèle pour la lutte contre les surdoses.