ArchivesLes Rohingyas : un peuple martyr oublié du monde
Les Rohingyas sont une des minorités ethniques les plus persécutées de la planète.
Photo : Radio-Canada
Prenez note que cet article publié en 2018 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
En 2018, les Nations unies publient un rapport exceptionnellement accablant. Elles déclarent les autorités du Myanmar coupables du crime de génocide contre les Rohingyas. Nos journalistes ont dévoilé dans plusieurs reportages la tragédie que vit ce peuple qui constitue une minorité ethnique parmi les plus persécutées de la planète.
Condamnation internationale
Le rapport publié par les Nations unies utilise clairement le mot génocide pour décrire la situation des Rohingyas.
Le rapport de 444 pages recommande également l’établissement d’un tribunal ad hoc sous la supervision de la Cour pénale internationale pour punir les crimes perpétrés par des membres de l'armée birmane.
La Chambre des communes du Canada adopte une résolution condamnant le génocide des Rohingyas.
Le 20 septembre 2018, comme le montre cet extrait du Téléjournal, animé par Céline Galipeau ce jour-là, la Chambre des communes adopte à l'unanimité une résolution reconnaissant comme un génocide les crimes commis contre les Rohingyas au Myanmar.
En 2020, les Nations unies et le gouvernement du Bangladesh, qui a accueilli les Rohingyas sur son sol, ont demandé à la communauté internationale un milliard de dollars américains pour atténuer les répercussions de leur déportation.
L’objectif mondial a été atteint à 60 %.
À lire :
Destruction délibérée
On est en train de mourir. Notre nation est éliminée.
Reportage de la journaliste Sophie Langlois sur la situation d'une famille de réfugiés rohingyas qui vit à Québec.
Ce cri d'alarme, Shafi Mohamed en a fait part à notre journaliste Sophie Langlois dans un reportage qu’elle a présenté au Téléjournal du 15 juin 2015 et qu’anime Céline Galipeau.
Shafi Mohamed et sa famille vivent à Québec depuis novembre 2014. Le jeune père a dû fuir son Myanmar natal – que l'on connaît aussi sous le nom de Birmanie – car sa vie y était menacée.
Son père, fonctionnaire, est licencié sans aucune raison. Sa maison et son village sont brûlés par l’armée birmane. Il assiste à des massacres.
Il n'en revient pas du chaleureux accueil qu’il a reçu dans la ville de Québec. Après tout, on l’a toujours bafoué au Myanmar.
Tout cela parce que Shafi Mohamed appartient à une minorité ethnique musulmane, les Rohingyas, dont les autorités birmanes veulent se débarrasser à tout prix.
Un peuple ballotté par l’histoire
Les Rohingyas sont depuis longtemps ballottés par l’histoire.
Au 18e siècle, ils vivaient dans un royaume indépendant, Arakan. En 1742, les Britanniques s’emparent des royaumes d’Arakan et de Birmanie et les annexent à leur possession des Indes.
À la fin des années 1940, les Britanniques commencent à démanteler leur empire colonial en Asie.
Ils concèdent l’indépendance à la Birmanie en 1948 en intégrant au nouvel État le royaume d’Arakan. Dans cet état d’Arakan – rebaptisé Rakhine – vivent côte à côte les Birmans bouddhistes et les Rohingyas musulmans.
À sa naissance, la jeune démocratie birmane accorde tous les droits civiques aux Rohingyas comme aux autres minorités ethniques qui habitent le pays.
Mais en 1962, une junte militaire s'empare du pouvoir. Les nouveaux maîtres appartiennent tous à la majorité birmane bouddhiste. Ils tolèrent mal la présence des minorités ethniques et religieuses.
Ils commencent à malmener plusieurs d’entre elles, dont les Rohingyas.
En 1982, la dictature birmane enlève aux Rohingyas la citoyenneté birmane. L’imposition de la condition apatride est un premier pas vers l’expulsion des Rohingyas de la Birmanie.
Expulsion vers le Bangladesh
Le gouvernement birman veut que les Rohingyas retournent vers leur supposé pays natal, le Bangladesh.
Pour les convaincre de fuir, l’armée birmane expulse les Rohingyas de leurs villages.
Les Nations unies estiment que 700 000 Rohingyas se sont réfugiés au Bangladesh. Ils vivent désormais dans des camps de fortune.
Notre camp est à peine mieux qu’une prison. Nous n’avons aucune liberté. On contrôle nos allées et venues, et on suffoque dans nos abris.
Notre correspondant en Chine Yvan Côté s’est rendu dans un de ces camps lors d’une rare incursion d’un journaliste occidental dans l’État de Rakhine.
Reportage du correspondant Yvan Côté sur la situation des Rohingyas dans les camps de réfugiés au Bangladesh
Il nous rapporte de ce séjour un reportage émouvant qu’il présente au Téléjournal le 5 janvier 2016 qu’anime Geneviève Asselin.
Dans le camp de Sittwe, situé près de la frontière avec le Bangladesh, Yvan Côté rencontre Naba et sa famille.
Le journaliste dit que Naba a l’impression de pourrir sur place.
Il ne peut pas étudier, car il n’y a pas d’école. Il n’y a presque pas de soins médicaux. Le frère de Naba a manqué perdre la vie à cause d’une attaque de malaria.
Une situation pas très étonnante quand on sait que les médecins bouddhistes refusent d’aller au chevet des patients.
Plusieurs jeunes fuient le camp par la mer. Beaucoup périssent noyés. D’autres sont capturés par des trafiquants et finissent comme marchandise humaine.
Tout cela, comme le souligne Yvan Côté, se déroule dans le silence presque complet de la communauté internationale.
Un retour à la démocratie qui aggrave la persécution
C’est la plus grande crise humanitaire dans le monde et elle fait encore des ravages à l’abri des regards au Myanmar. Épuration ethnique, famines organisées, viols à grande échelle, l’ONU sonne de nouveau l’alarme sur l’horreur que vit quotidiennement la minorité rohingya.
Le 6 mars 2018, comme le constate l’animatrice du Téléjournal Céline Galipeau, près d’un million de Rohingyas s’entassent dans les camps au Bangladesh.
Reportage de la journaliste Sophie Langlois sur la situation des Rohingyas dans les camps de réfugiés au Bangladesh
Cette statistique effrayante fait partie de l'introduction à un reportage que présente ce soir-là notre collègue Sophie Langlois.
Elle a eu accès à de rares images qui proviennent du Myanmar.
La journaliste décrit l’horreur. L’armée détruit les villages et camoufle probablement des cadavres dans des fosses communes.
La cruelle ironie, c’est que ces crimes se déroulent alors que la démocratie vient d'être restaurée au Myanmar.
L'arrivée de l’opposition démocrate, dirigée par l’icône internationale Aung San Suu Kyi, devait sceller une grande réconciliation nationale.
Au lieu de ça, celle qu’on appelle la Dame de Rangoon a laissé se déchaîner sans rien dire la passion et la violence xénophobes.
Céline Galipeau et le correspondant en Asie Philippe Leblanc analysent la situation des réfugiés rohingyas dans les camps au Bangladesh et la possibilité d'une solution politique à cette crise.
Le 26 juin 2021, un peu plus de trois ans après le reportage de Sophie Langlois, l'animatrice de l'émission Personne n'en parle, Céline Galipeau, analyse avec le correspondant en Asie Philippe Leblanc, la situation qui semble toujours inextricable pour les Rohingyas.
Des condamnations retentissent dans la communauté internationale.
Mais cela ne va guère émouvoir la junte militaire qui dirige le Myanmar depuis le 1er février 2021.
