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Edmonton, le nouveau refuge arc-en-ciel des Ougandais

Basel Abou Hamrah et d'autres membres du programme Arc-en-ciel du Centre d'Edmonton pour les nouveaux arrivants devant un drapeau arc-en-ciel.

Plus de 600 personnes sont aidées par le programme Arc-en-ciel du Centre d'Edmonton pour les nouveaux arrivants.

Photo : Radio-Canada / Camille Pauvarel

Basel Abou Hamrah et d'autres membres du programme Arc-en-ciel du Centre d'Edmonton pour les nouveaux arrivants devant un drapeau arc-en-ciel.

Plus de 600 personnes sont aidées par le programme Arc-en-ciel du Centre d'Edmonton pour les nouveaux arrivants.

Photo : Radio-Canada / Camille Pauvarel

Un programme de soutien aux réfugiés LGBTQ+ à Edmonton constate une forte augmentation du nombre de ses membres ougandais depuis que ce pays a renforcé ses lois anti-LGBTQ+ en mars 2023.

Ces derniers disent que, dans leur pays, ils ont été battus, pourchassés, humiliés ou encore séparés de leur partenaire, tout cela en raison de qui ils veulent être et de leur orientation sexuelle.

La situation de ces personnes homosexuelles, bisexuelles ou transgenres se dégrade depuis que le gouvernement ougandais a mis en place une nouvelle loi accompagnée de lourdes peines, pouvant aller jusqu’à la peine de mort, pour homosexualité aggravée.

Le programme Arc-en-ciel pour les demandeurs d’asile et réfugiés LGBTQ+, Rainbow Refuge, qui dépend du Centre d’Edmonton pour les nouveaux arrivants (anciennement connu sous le nom de EMCN), dit avoir connu une hausse sans précédent du nombre de ses membres au cours de la dernière année.

Depuis août 2023, plus de 600 personnes, dont 60 % sont issues d’Ouganda, ont passé les portes de son bureau. C'est beaucoup plus que les 200 à 300 personnes que le centre accueille en moyenne par année dans le cadre du programme Arc-en-ciel.

La justice populaire validée par la nouvelle loi

Nicholas Aryatwijuk est arrivé au Canada le 30 août 2023. Dans une salle du Centre d'Edmonton pour les nouveaux arrivants, il se confie sur les raisons de son départ.

C’était en novembre 2022, j’ai été surpris dans un hôtel avec mon partenaire et sauvagement battu. Nous avons réussi à nous échapper, chacun de notre côté. Je me suis caché dans un village et je n’ai jamais réussi à savoir où il était, témoigne-t-il.

Nicholas Aryatwijuk souriant.

Nicholas Aryatwijuk est d'abord passé par la Saskatchewan avant d'arriver en Alberta.

Photo : Radio-Canada / Trevor Wilson

Selon l'homme de 32 ans, la population est devenue encore plus dure envers les homosexuels depuis la promulgation de la loi anti-homosexualité.

Ils n'ont pas besoin de le signaler aux autorités parce que c'est maintenant la loi en Ouganda. Ils connaissent cette loi. Ils vous tueront tout simplement eux-mêmes, au nom de la justice populaire, affirme-t-il.

Nicholas Aryatwijuk dit avoir opté pour le Canada après avoir lu sur Internet que c’était un pays sécuritaire, peu importe la couleur de peau et l'orientation sexuelle. Le trentenaire est d’abord passé par la Saskatchewan, où on lui a conseillé d’aller à Edmonton.

Des personnes m’ont dit qu’il y avait plus de ressources à Edmonton, j’ai fini par tomber sur l'ENC et ils sont devenus ma famille, explique-t-il.

Allen Nansubuga fait aussi partie du programme Arc-en-ciel d’ENC, qu’il appelle sa nouvelle famille. Celui qui s’identifie comme un homme transgenre est arrivé à Edmonton en 2019. Battu avec sa partenaire, après avoir été dénoncé par des membres de sa communauté, il a également dû fuir.

Allen Nansubuga dans un bureau du centre pour les nouveaux arrivants d'Edmonton lors de son entrevue avec Radio-Canada.

Allen Nansubuga travaille dans un refuge et espère que ses enfants, adoptés en Ouganda, pourront le rejoindre pour avoir une « vie meilleure ».

Photo : Radio-Canada / Trevor Wilson

En 2020, Allen Nansubuga a entrepris de retrouver sa partenaire depuis Edmonton et a eu une terrible nouvelle.

J’ai investi beaucoup d'argent dans des recherches parce que je pensais pouvoir l'aider à venir au Canada, où nous pourrions commencer une nouvelle vie. Mais j’ai reçu l’information qu’elle était décédée, peu après l’attaque dont nous avons été victimes, relate-t-il.

C'est une famille que j’ai trouvée à Edmonton. Ils sont adorables, ils m'ont fait gagner en confiance en moi. Ils m'ont fait comprendre qu'il faut espérer au quotidien et je me sens aimé.

Une citation de Allen Nansubuga, réfugié ougandais transsexuel

Âgé d'une trentaine d'années, il a obtenu sa résidence permanente en juillet 2022. Depuis, il a trouvé un travail dans un refuge pour femmes qu’il dit occuper en hommage à sa conjointe tuée.

Elle fait partie de moi et c'est pour cela que je m'investis beaucoup pour aider les autres, afin qu'ils ne puissent pas ressentir la même chose que moi.

Se retrouver dans un système complexe avec des ressources limitées

Créé en 2017, le programme Arc-en-ciel d’ENC vient en aide aux ressortissants de plus de 60 pays. Son créateur, Basel Abou Hamrah, a lui-même été victime de discrimination dans son pays, la Syrie. Il sait donc dans quel état d’esprit arrivent ces personnes.

De nombreux nouveaux arrivants LGBTQ+ arrivent seuls à Edmonton. Ils n'ont pas de soutien familial. Ils ne connaissent personne dans la ville. Ils sont loin de leur communauté culturelle ethnique et ne se sentent pas non plus à leur place au sein de la communauté LGBTQ+ locale.

Une citation de Basel Abou Hamrah, conseiller du programme Arc-en-ciel, ENC

Avec seulement trois employés, les responsables du programme estiment que leurs ressources sont insuffisantes face à cette demande en croissance.

Nous faisons de notre mieux pour soutenir tout le monde, mais nous avons vraiment du mal à offrir l'aide nécessaire, dit Basel Abou Hamrah.

Leur financement vient principalement de la Ville d’Edmonton, de donateurs et des collectes de fonds menées par des organisations locales telles que la Fruit Loop Society of Alberta.

Les responsables du programme rappellent que le chemin peut être long pour ces demandeurs d’asile.

Cela leur prend au minimum deux à trois mois pour obtenir leur première entrevue d’admissibilité et jusqu'à 24 mois pour une réponse finale sur leur statut de réfugié, explique Basel Abou Hamrah.

Basel Abou Hamrah et Nicholas Aryatwijuk devant un ordinateur.

Nicholas Aryatwijuk (à droite) est arrivé au Canada en 2023, sa demande de statut de réfugié est en cours.

Photo : Radio-Canada / Camille Pauvarel

Selon les conseillers, c'est durant ces premiers mois que leur présence est la plus nécessaire, car le gouvernement de l’Alberta n'ouvre pas d'aide juridique aux demandeurs d'asile et ceux-ci ne peuvent pas travailler. Nous aimerions un soutien de la province dès le début, affirme Basel Abou Hamrah.

Le gouvernement de l’Alberta confirme qu'une aide juridique est proposée après validation du dossier auprès d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). Pour la question du logement, il précise dans un communiqué que ses refuges sont ouverts à tous.

Tous les refuges financés par le gouvernement de l'Alberta sont tenus d'offrir leurs services à toutes les personnes, indépendamment de leurs convictions politiques ou religieuses, de leur origine ethnoculturelle, de leur état de santé, de leur handicap, de leur identité de genre ou de leur orientation sexuelle.

Du côté fédéral, le gouvernement indique que, depuis le 15 mai 2023, ses règles pour les demandes de statut de réfugié par les ressortissants ougandais sont mises à jour. Les personnes ayant reçu une réponse défavorable pour un statut de réfugié entre le 13 mai 2022 et le 12 mai 2023 sont autorisées à soumettre une demande d’examen des risques avant renvoi.

Le programme Arc-en-ciel, un espoir pour pouvoir être soi-même

Le programme de l’ENC n’apporte pas qu’un soutien logistique et juridique aux demandeurs d’asile. Il propose aussi des événements festifs pour que les personnes LGBTQ+ puissent s’épanouir après un passé douloureux. Ainsi, lors d’une soirée, le 20 mars, plusieurs centaines de personnes ont pu danser et chanter dans un bar d’Edmonton.

Basel Abou Hamrah et Allen Nansubuga lors d'une soirée organisée dans un bar d'Edmonton.

Basel Abou Hamrah et Allen Nansubuga lors d'une soirée organisée dans un bar d'Edmonton.

Photo : Radio-Canada / Trevor Wilson

Ces événements nous permettent de nous définir clairement. Ils nous donnent l'impression d'être en sécurité. Il n'y a pas que des gens qui viennent d'Ouganda, il y a un mélange de tout le monde avec des histoires différentes, résume Allen Nansubuga.

Nicholas Aryatwijuk attend toujours son statut de réfugié, mais il a réussi à avoir un travail après son entrevue d'admissibilité. Il attend la décision finale afin de pouvoir avoir accès à des soins de santé.

Allen Nansubuga pense à ses enfants adoptés en Ouganda qui, selon lui, risquent leur vie en étant associés à un parent homosexuel. Il espère qu'ils pourront bientôt le rejoindre au Canada. Sa demande de réunification familiale a été rejetée une première fois, mais il dit ne pas vouloir renoncer.

Une situation qui s’aggrave

Le 3 avril, la Cour constitutionnelle de l’Ouganda a refusé d’abroger la loi anti-LGBTQ+. La demande avait été formulée par des militants des droits de la personne, des professeurs de droit et des parlementaires.

L’Afrique est le continent qui compte le plus grand nombre de pays ayant des lois punitives à l'égard des membres de communautés LGBTQ+.

En février dernier, le Ghana a adopté un projet de loi qui durcit les sanctions pour les relations homosexuelles et criminalise la défense des droits LGBTQ+.

En collaboration avec Andrea Huncar

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