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Renaître de ses cendres : la résilience de Lytton, trois ans après sa destruction

Il y a presque trois ans, des feux de forêt ont frappé de plein fouet les communautés de la Première Nation de Lytton, en Colombie-Britannique, et ont laissé derrière eux des amas de cendres et de poussières. Ce n’est que cette année qu'on va commencer à reconstruire des maisons.

Rues ravagées par les flammes durant l'incendie du 30 juin 2021 à Lytton.

Le 30 juin 2021, la ville de Lytton et la communauté autochtone du même nom ont été ravagées par les flammes en quelques heures. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Simon Gohier

Le 30 juin 2021, en quelques heures à peine, il ne restait plus rien de 18 Klickkumcheen, l’une des 56 communautés qui composent la Première Nation de Lytton, répartie le long du fleuve Fraser, hors des limites de la municipalité du même nom.

Sur les 33 résidences qui se trouvaient là autrefois, il n'en restait alors plus qu'une.

Kevin Sampson, gestionnaire du programme d’urgence aux Services de santé Nlaka'pamux, raconte que cette journée-là environ 200 logements de Lytton ont entièrement brûlé – la ville de Lytton comprise.

Dans les jours qui ont précédé l'incendie, le mercure avait grimpé à 49,6 °C.

Un automobiliste arrêté au bord de la route Transcanadienne observe un feu de forêt à flanc de montagne à Lytton, en Colombie-Britannique, le jeudi 1er juillet 2021.

Les feux de forêt ont eu un impact disproportionné sur les communautés autochtones. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Darryl Dyck

Au cours de l'été 2023, comme un mauvais rêve, des membres ont revécu ce traumatisme, devant évacuer leur maison à cause d’une nouvelle vague de feux de forêt dans la province.

Finalement, ce n’est qu’en 2024 que la reconstruction de 80 maisons débutera.

Plusieurs raisons expliquent ce long délai, selon M. Sampson : le manque de fonds, le manque de moyens et des travaux archéologiques qui ont été menés à la suite des feux de 2021.

À l’occasion du 2e Forum national sur la gestion des urgences, organisé à Gatineau par l’Assemblée des Premières Nations (APN), jusqu’au 7 mars, le directeur de la reconstruction de la Première Nation de Lytton, Patrick Michell, a livré un message fort d’espoir, de résilience et d’abnégation aux participants présents.

Patrick Michell porte une tuque, le 20 juin 2023.

Patrick Michell affirme que l’air de la Terre se réchauffe, ce qui produit des événements extrêmes tels que les dômes de chaleur, les rivières atmosphériques et de la pluie glacée en juin dans le désert. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Justine Beaulieu-Poudrier

Il espère que la triste expérience de sa communauté pourra en pousser d’autres à prendre les devants, car la question n'est pas de savoir si on va être un jour touchés, mais quand.

M. Michell a aussi souligné combien les Autochtones ont en eux la force de survivre aux conséquences des changements climatiques qui les touchent de plus en plus.

Nous avons survécu à la colonisation, aux pensionnats… Les membres de la Nation Nlaka’pamux avaient déjà envoyé une lettre en 1878 pour s’opposer à la Loi sur les Indiens. Une autre en 1910, rappelle-t-il, comme pour souligner que la force des Autochtones est ancrée en eux depuis longtemps.

Mais la guérison est longue. Trois ans plus tard, les feux nous font encore souffrir, a lâché celui qui a lui-même vu sa maison partir en fumée.

Des femmes portent des pancartes dans la rue.

Des dizaines de résidents de Lytton et de la région se sont rassemblés le 18 octobre 2023 pour dénoncer les délais de reconstruction. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Marissa Tiel

De nombreuses personnes vivent encore dans des abris de fortune, en attendant de récupérer un logement. M. Michell est revenu dans une caravane et compte reconstruire sa maison.

La réintégration des membres dans leur communauté est importante, puisqu’elle symbolise leur lien fort avec le territoire.

Alors la communauté se retrousse les manches et pense à long terme. Il n’est pas question de reconstruire les maisons à l'identique de celles qui ont brûlé. Ne construisez pas de la m**** [don’t build crap], c’est pour cela que Lytton a brûlé si vite, conseille M. Michell.

Les 80 nouvelles maisons seront donc construites cette année en utilisant des matériaux plus résistants au feu. Elles seront plus chaudes en hiver et plus fraîches en été, et leur consommation d’électricité sera moins élevée.

La communauté reste très proactive et souhaite que les entreprises détenues par des membres puissent bénéficier de la reconstruction de maisons.

Un feu de forêt qui brûle.

L'incendie de Nohomin Creek est à 1,7 km de la ville de Lytton, qui a été en grande partie détruite en 2021. (Photo d'archives)

Photo : Twitter/BC WILDFIRE

Lytton a aussi commencé à repenser la manière de stocker ses données. C’est important, parce que si tout brûle et si vous perdez les données, ce sera plus long et encore plus coûteux de tout reconstruire. Vous devez les rassembler, les stocker, dire aux gens où elles se trouvent, a détaillé M. Michell.

Celui-ci conseille par ailleurs aux autres communautés de se doter d’une véritable vision dans la gestion des urgences. Il est de notre responsabilité de nous impliquer, de contribuer et de prendre en main la prévention, la préparation, la réponse aux urgences et les efforts de reconstruction, a-t-il dit.

Un bâtiment ravagé par les flammes durant l'incendie du 30 juin 2021 à Lytton.

Patrick Michell relie les catastrophes naturelles au réchauffement climatique. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Simon Gohier

Depuis l'incendie de juin 2021, la Première Nation a mené à bien 62 projets pour reconstruire Lytton, et ce, malgré de nouvelles épreuves auxquelles elle a fait face : la rivière atmosphérique (un phénomène de pluies diluviennes) de novembre 2021, qui a entraîné la fermeture des routes; le froid extrême et la neige de décembre 2021, qui ont eu les mêmes conséquences et qui ont tenu les gens piégés dans leur logement, sans eau courante; la chaleur et la sécheresse de 2022; l'incendie de Nohomin Creek; et enfin la chaleur et la sécheresse de 2023, qui ont entraîné trois autres incendies de forêt.

Surtout, M. Michell dit ce que de nombreux membres ont déjà souligné, notamment à CBC : la tragédie de Lytton est un avertissement à tout le monde au sujet des changements climatiques.

Longuement, il est revenu sur la situation actuelle concernant les dérèglements météorologiques.

Malgré tout, la Première Nation de Lytton continue d’avancer.

Kevin Sampson, gestionnaire du programme d’urgence, croit même que sa communauté se remet mieux sur ses pieds que la ville voisine de Lytton.

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