•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Accusé de ne pas être autochtone, le chanteur d’un groupe canadien se repent

Accusé de ne pas être mi'kmaw comme il le prétendait, le chanteur-batteur du groupe canadien Crown Lands, lauréat d’un Juno, a indiqué avoir mené des recherches généalogiques. Verdict : rien ne semble prouver qu’il soit effectivement mi'kmaw.

Un homme jouant de la batterie lors d'un concert.

Cody Bowles est le chanteur et le batteur du groupe Crown Lands. (Photo d'archives)

Photo : Crown Lands

Espaces autochtones a été alerté par la situation voici quelques semaines. L’ancienne députée inuk Mumilaaq Qaqqaq a fourni bon nombre de documents tendant à prouver que Cody Bowles, le chanteur et batteur de Crown Lands, n’était pas ce qu’il prétendait être.

Sur les réseaux sociaux, plusieurs personnes aussi le questionnaient en commentaires sur ses prétentions. Elles n’ont jamais reçu de réponse.

Mumilaaq Qaqqaq ajoute même qu’après ces messages publics, le groupe a notamment fermé ses commentaires sous ses publications, ce qu’a pu constater Espaces autochtones.

[Ils] ont fait des pieds et des mains pour me bloquer et bloquer mes commentaires en particulier, dit-elle.

Espaces autochtones a aussi tenté de joindre le groupe par ses pages Instagram et Facebook, ainsi que par son agence, mais n’a pas eu de réponse. Sa tante, Danielle Weisbrod, que nous avons contactée sur les réseaux sociaux, a indiqué de son côté que nous devions continuer nos investigations et qu’elle ne commenterait pas l'ascendance de son neveu.

L’identité autochtone, une question complexe

Consulter le dossier complet

Une exemple de carte de statut d'Indien inscrit.

Mumilaaq Qaqqaq a d’abord été marquée par ce qu’elle estime être des incohérences quant au degré de connaissance de Cody Bowles concernant les Mi’kmaq.

Une image de la nouvelle députée de la circonscription de Nunavut. En arrière-plan, Iqaluit, la capitale territoriale.

Mumilaaq Qaqqaq a été députée NPD et dénonce les gens qui se prétendent faussement autochtones. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Marc Godbout

Elle estime qu’il y a toujours eu une tendance au prétendianisme [la prétention d'être d'ascendance autochtone] et il y aura toujours des gens qui essaieront d'avoir accès à des espaces, à de l'argent et à des ressources qu'ils ne devraient pas avoir.

Elle ajoute : N'importe qui peut s'auto-identifier, ce qui est en fait extrêmement préjudiciable à la communauté, car c'est le gouvernement fédéral qui, en fin de compte, décide qui reçoit quoi et combien. Les peuples autochtones souffrent de façon alarmante dans le pays où ils étaient autrefois majoritaires.

Sur la page de présentation du groupe, il est notamment écrit que Cody Bowles est un Mi'kmaw bispirituel en voie de reconnexion, qui a grandi en apprenant auprès des anciens de la Première Nation d'Alderville.

Il est important de noter qu’Alderville, en Ontario, n’est pas une communauté mi’kmaw, mais ojibwée.

Lors d’une entrevue radio, l’animateur Jeremy White, un Mohawk, a demandé à Cody Bowles s’il avait grandi dans une réserve ou en ville. Cody Bowles a répondu qu’il avait grandi en milieu urbain essentiellement, à Riverdale, à Toronto.

Un homme qui joue de la batterie.

Cody Bowles disait être mi'kmaw. (Photo d'archives)

Photo : Crown Lands

Il explique ensuite que ses parents avaient une maison proche d’Alderville et que la famille avait des amis aînés dans cette communauté.

Cody Bowles dit avoir de la famille en Nouvelle-Écosse, notamment autour d’Amherst, comme à Millbrook. Millbrook est une communauté mi’kmaw de Nouvelle-Écosse.

Crown Lands

Crown Lands est un duo de musique rock canadien originaire d'Oshawa, en Ontario. Le groupe est formé du chanteur-batteur Cody Bowles et du guitariste-bassiste-claviériste Kevin Comeau. Il compose des chansons qui évoquent souvent la résistance autochtone au colonialisme. En 2021, le groupe a remporté le prix Juno du groupe de l'année et a été nommé pour l'album rock de l'année.

Concernant les ancêtres de Cody Bowles, la généalogiste Dominique Ritchot a indiqué ce qui suit à Espaces autochtones : C’est clair que [Cody Bowles] n’est ni mi’kmaw ni ojibwé.

Elle explique que les ancêtres de Cody Bowles ne sont pas mi’kmaw, mais plutôt afro-canadiens [côté paternel] et marocains [côté maternel].

Mea-culpa

Mardi, Cody Bowles est finalement sorti du silence et a publié un long message sur les réseaux sociaux.

Récemment, quelques personnes m’ont questionné en ligne sur mon identité autochtone et sur la nation dont nous nous revendiquons, ma famille et moi, dit-il.

Cody Bowles explique avoir posé des questions à son père, un processus qu’il a trouvé difficile. J’étais hésitant, car son père l’a abandonné quand il était jeune et il a passé toute sa vie à croire qu’il était mi’kmaw, ajoute-t-il.

Le groupe durant une prestation.

Le groupe a reçu un prix Juno en 2021. (Photo d'archives)

Photo : Crown Lands

Le chanteur-batteur raconte avoir décidé de contacter un généalogiste pour faire la lumière sur ses origines. Il a ainsi découvert que ses ancêtres étaient presque tous des descendants d'Africains, notamment parmi ceux qui se sont évadés des plantations de Georgie (États-Unis) vers la Nouvelle-Écosse dans les années 1700.

J’ai aussi appris qu’un ancêtre était l’un des premiers esclaves à avoir été amené à l’Île-du-Prince-Édouard. Il s’est ensuite installé à Amherst, écrit-il.

Il reconnaît que ses recherches le poussent à penser qu’il n’a aucun lien avec une communauté autochtone.

Pourtant, il rappelle qu’il a été élevé dans les valeurs autochtones et qu’il a participé à des cérémonies.

Cody Bowles admet qu’il aurait dû faire ce travail avant. Il termine en disant : Je m’excuse de m’être dit mi’kmaw sans avoir été déclaré comme tel par la communauté et sans être sûr d’où venait ma famille tout en croyant avoir un lien avec la communauté de Millbrook.

Il reconnaît aussi avoir pu blesser des gens de la communauté et explique que cela n’a jamais été son intention, tout en soulignant que ses chansons engagées venaient de son cœur et de sa volonté de faire entendre les Autochtones.

Mais cela ne va pas assez loin pour Mumilaaq Qaqqaq, qui suggère que tous ceux qui ont signé un contrat avec le groupe, publicisé leur musique ou qui les ont mis de l'avant, devraient eux aussi s'excuser.

Elle ajoute : [Suivre] des cérémonies ne fait pas de vous un Autochtone. Vous pourriez aussi commencer par changer le nom de votre groupe et votre site Internet.

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Chargement en cours

Infolettre Espaces autochtones

Chaque semaine, suivez l’essentiel de l’actualité autochtone au Canada.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre Espaces autochtones.

Espaces autochtones

Un travail journalistique sérieux, constant et curieux est le meilleur moyen de dévoiler et expliquer des réalités que beaucoup ne soupçonnent peut-être pas. Et donc de comprendre. C'est ce que nous nous proposons de faire. Découvrir, informer, comprendre, expliquer.

— Soleïman Mellali, rédacteur en chef