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Des Autochtones à la reconquête de hauts lieux touristiques

Des Aborigènes sont assis devant une montagne rouge et des inscriptions qui indiquent que la randonnée est interdite.

À la demande des Aborigènes, l'ascension du mont Uluru est interdite aux touristes depuis 2019.

Photo : Getty Images / SAEED KHAN

Radio-Canada

À travers le monde, des peuples autochtones luttent pour se réapproprier des territoires ancestraux dont ils ont été chassés ou sur lesquels ils ont été dépossédés de leurs droits. Certains de ces lieux sont très touristiques, ce qui rend leurs batailles – et parfois leurs victoires – encore plus symboliques. Petit tour d’horizon de lieux emblématiques au cœur du mouvement Land Back.

Australie – Mont Uluru / Ayers Rock

Un massif rocheux dans une plaine aride.

Ayers Rock, en Australie

Photo : Getty Images / simonbradfield

Depuis 2019, l’ascension du mont Uluru, une activité qui était très prisée des touristes, est interdite. L’année suivante, le gouvernement australien a même demandé à Google de retirer les images prises à son sommet.

Longtemps connu sous le nom d’Ayers Rock, cet endroit revêt un caractère sacré pour les Aborigènes puisqu’il constituait un des arrêts du chemin que parcouraient les ancêtres au Temps du rêve, qui correspond à la période de la formation du monde.

Depuis que le territoire leur a été rendu, en 1985, les Aṉangu assurent la cogestion du parc national Uluru-Kata Tjuta avec le gouvernement australien. La forte présence des touristes, qui contribuaient à l'érosion de la surface du mont Uluru et à la pollution des nappes d’eau environnantes, a convaincu les Aborigènes de demander que le sommet soit interdit d’accès.

Le mont Uluru se trouve sur un territoire de cinq millions d’hectares qui constitue, depuis 2015, une aire protégée autochtone (Indigenous protected area). Ce titre permet aux propriétaires traditionnels de terres en Australie de contribuer à la préservation de certains sites et à leur signification culturelle. Aujourd’hui, dans ce pays, on compte 82 aires protégées autochtones, ce qui représente 50 % des aires nationales protégées.

Hawaï – Mauna Kea

Un des nombreux télescopes au sommet du Mauna Kea.

Un des nombreux télescopes au sommet du Mauna Kea.

Photo : Associated Press / Caleb Jones

S’élevant à 4207 mètres au-dessus du niveau de la mer, Mauna Kea est le plus haut sommet d'Hawaï. C’est également une montagne sacrée pour le peuple autochtone Kanaka Maoli. Pour lui, Mauna Kea et Mauna Lao, le plus imposant ensemble montagneux de l’État, constituent la source de la vie à Hawaï.

Dans les années 1960, la gestion du site a été confiée à l’Université d'Hawaï et un groupe de chercheurs indépendants en astronomie s’y est installé. Avec l’émergence du tourisme, Mauna Kea s’est également mis à attirer beaucoup de visiteurs qui souhaitent observer les étoiles. Au fil des ans, 13 télescopes y ont été établis. En plus de transformer le paysage, ces constructions ont aussi eu un impact sur la faune, la flore et l'écosystème environnant.

Les Autochtones y voient ni plus ni moins la profanation d’un lieu sacré. Il y a quelques années, ils ont entrepris une bataille juridique pour empêcher de nouveaux projets de construction à Mauna Kea. Depuis juillet 2022, à la suite de l'adoption d’une nouvelle loi, la gestion du site a été transférée à la Maunakea Stewardship and Oversight Authority, un groupe qui milite pour la protection de la montagne.

Dakota du Sud – Mont Rushmore

Deux motocyclistes prennent des égoportraits devant le mont Rushmore.

Des touristes prennent des égoportraits devant le mont Rushmore, dans le Dakota du Sud.

Photo : Getty Images / Scott Olson

Dans le Dakota du Sud, les Black Hills représentent le centre de l’univers du peuple lakota. C’est au cœur de ce territoire, le He Sapa, qu’aurait débuté leur histoire et que serait née leur culture. Parmi ces montagnes sacrées se dresse le mont Rushmore, où ont été sculptées les têtes des présidents américains George Washington, Thomas Jefferson, Theodore Roosevelt et Abraham Lincoln.

Ce lieu se trouve au centre d’une des plus grandes batailles du mouvement Land Back, qui appelle à la reconnaissance et au rétablissement de la souveraineté autochtone sur les territoires ancestraux. Les Black Hills avaient été promises au peuple lakota dans un accord conclu avec le gouvernement des États-Unis en 1868, qui reconnaissait que ce territoire faisait partie de la réserve des Grands Sioux.

Pour les Lakotas, les Black Hills sont devenues le symbole de la suprématie blanche et des injustices commises aux dépens des Autochtones, y compris le vol de terres. Elles font l’objet de la plus longue lutte foncière entre le gouvernement américain et les Premières Nations des États-Unis.

Nouvelle-Calédonie – Célébrations du peuple Kanak

Des Kanak font une danse traditionnelle.

Des Kanak font une danse traditionnelle.

Photo : Getty Images / THEO ROUBY

En Nouvelle-Calédonie, les Kanak ont choisi d’utiliser le tourisme comme un outil d’affirmation, de sauvegarde et de transmission de leur culture. En effet, l’Agence de développement de la culture kanak y a trouvé une façon de renforcer la présence de ce peuple dans ce territoire français tout en contrant la perte de savoir inhérente à la vie moderne.

Le peuple kanak comprend qu’il suscite de l’intérêt et de la curiosité : il a élaboré toute une gamme d’activités pour faire découvrir sa culture, ses traditions et ses savoir-faire aux nombreux touristes qui visitent la Nouvelle-Calédonie.

Dans cet archipel du Pacifique, plusieurs tribus kanak accueillent des voyageurs et leur présentent leurs coutumes. Les fêtes locales constituent une manière privilégiée d’exposer leur culture au moyen de la nourriture, de l’artisanat, des chants et des danses traditionnelles. Ces célébrations marquent surtout les périodes des récoltes et de la pêche, qui sont au cœur de la vie tribale. Les fêtes de l’avocat, du lago ou du Taro, par exemple, sont autant d’événements auxquels sont conviés les touristes.

Des balades en pirogue dans la nature avec un guide local pour visiter des sites sacrés comme les falaises de Lékiny, les roches de Hienghène ou la grotte de la Reine-Hortense font également partie de l’offre touristique kanak. Des galeries et des musées, dont le Centre culturel Tjibaou, permettent aussi aux visiteurs d’apprendre à connaître ce peuple autochtone.


Canada – Parcs nationaux

Rentrée de Batoche, lieu historique national de Parcs Canada, en Saskatchewan.

Rentrée de Batoche, lieu historique national de Parcs Canada, en Saskatchewan.

Photo : Radio-Canada / Trevor A Bothorel

Chaque année, des millions de personnes visitent les 47 parcs nationaux et les 171 sites historiques gérés par Parcs Canada. La création de ce vaste réseau est toutefois étroitement liée au déplacement de communautés autochtones.

En effet, plusieurs de ces parcs ont été aménagés sur des territoires qui ont été occupés pendant des siècles par les Premières Nations. C’est le cas notamment du site historique national Batoche, en Saskatchewan, d’où la Nation métisse a été chassée à la fin du 19e siècle.

La dernière grande bataille qu’y ont livrée les Métis contre les autorités canadiennes a eu lieu en 1885 sous la gouverne de Louis Riel. Celui-ci a été pendu peu après et les Métis ont abandonné cet endroit sous la menace. En 1923, le gouvernement fédéral a fait de Batoche un site historique national.

Un siècle plus tard, en 2022, à la suite d’un accord historique conclu avec Ottawa, le site a été restitué aux Métis. Il est maintenant codirigé par la Nation métisse de la Saskatchewan et par Parcs Canada. Des projets semblables sont en voie de réalisation partout au Canada pour établir la cogestion des territoires traditionnellement occupés par les Autochtones, a récemment indiqué Parcs Canada à CBC News (Nouvelle fenêtre).

L’organisme fédéral aurait commencé à intégrer les savoir-faire autochtones dans la conservation de la faune et de la flore et travaille à la création de nouvelles possibilités pour favoriser le tourisme autochtone dans son réseau.

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