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La petite révolution musicale du Maestro Tony

La petite révolution musicale du Maestro Tony

Un texte de Nadia Gaudreau Photographies par Patrick Lacelle

Publié le 26 septembre 2023

Originaire de Caracas et établi à Moncton depuis plus d’une décennie, Antonio Delgado a une foi sans fin dans le potentiel et le talent musical des enfants. Le chef d’orchestre et directeur musical du programme Sistema au Nouveau-Brunswick, le plus important programme du genre au Canada, fait une promesse à ceux et celles qui s’engagent avec lui : si vous travaillez fort, vous deviendrez des musiciens et musiciennes de talent, mais vous y gagnerez beaucoup plus que cela.

Antonio Delgado accueille chaleureusement Brian Augustine dans un petit local sans fenêtre de l’école Soleil Levant à Richibucto, dans le sud-est du Nouveau-Brunswick.

Brian est costaud pour ses 12 ans - presque 13 - et a le regard méfiant et sérieux. Il est le dernier de son groupe à auditionner pour une place dans l’orchestre des enfants qui présentera le concert annuel Pops NB.

Les uns après les autres, les jeunes ont passé une audition devant celui qu’ils surnomment Maestro Tony, certains avec confiance, d’autres en tremblant.

Brian Augustine joue du violon.
Les jeunes musiciens et musiciennes des neuf centres de Sistema de la province participent aux auditions pour le concert estival Pops NB qui se déroule chaque année, depuis huit ans, à Moncton. Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

Brian laisse ses amis poursuivre leurs exercices, ferme la porte et se retrouve seul devant Antonio et l’autre juge, le professeur de musique Jim Tranquilla, tous deux prêts à écouter son audition.

Le chef d’orchestre tente quelques blagues, qui provoquent seulement un sourire nerveux chez Brian. Celui-ci lève son violon, ferme les yeux et, dès les premiers coups d’archet, un son clair et limpide emplit la salle. Antonio Delgado sourcille, il semble impressionné.

Toutefois, au troisième morceau, Brian trébuche sur un passage difficile.

- « Respire mon gars, recommence. Tu connais le morceau. Allez, vas-y ».

Il termine avec aisance l’extrait choisi, la Danse hongroise numéro 5.

L’adolescent de la communauté mi'kmaw d’Elsipogtog est soulagé. Il a bûché pour atteindre les rangs de l’orchestre et prendre part à son premier concert d’envergure.

Quand tu te prépares pendant un an pour une audition, ça te prépare à beaucoup de choses dans la vie. J’aime l’idée des buts à long terme, et c’est quelque chose qui est vraiment difficile de nos jours, dans une société qui aime la gratification immédiate, souligne Antonio Delgado.

Trois heures par jour, cinq jours par semaine, Brian et plus de 1100 élèves de 6 à 18 ans, dont la majorité proviennent de milieux à risque, s’exercent à leur instrument après l’école grâce à Sistema, un programme gratuit qui est devenu, en grande partie grâce à Antonio Delgado, une pépinière de jeunes musiciens et musiciennes qui rivalisent de talent.

Le maestro Antonio Delgado Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

La musique avant tout
La musique avant tout

Antonio Delgado se reconnaît en quelque sorte dans Brian et dans plusieurs des enfants qu’il côtoie. Il y a 40 ans, il était l’un d’eux.

Celui qui a grandi dans un quartier défavorisé de Caracas, au Venezuela, seul garçon d’une fratrie de cinq enfants, rêvait comme tous ses amis de devenir un joueur de baseball professionnel jusqu’à ce qu'un jour, ses parents l’emmènent voir un concert et que l’orchestre joue le thème de l’opéra Carmen.

C’était la même chose que le thème d’une émission pour enfant que j’écoutais, Los Osos Revoltosos, ou Bad news Bears!

Ce concert allume une étincelle chez lui et il supplie ses parents de le laisser apprendre la musique. Ils lui trouvent alors une place dans El Sistema, le programme créé dans les années 1970 au Venezuela et qui a pour but de faire de la musique un vecteur de changement social.

Un montage de photos de la jeunesse d'Antonio Delgado
1. Antonio Delgado s’est démarqué de ses camarades et a reçu plusieurs distinctions. 2. Antonio Delgado voulait jouer de la trompette, mais le violon était moins cher pour ses parents. 3. Avant de toucher à un instrument, les enfants qui suivent le programme El Sistema passent une année à apprendre sur des instruments de percussion. 4. C’est au cours de ses études qu’Antonio Delgado s’est découvert un intérêt pour la direction musicale.  Photo : Gracieuseté : Antonio Delgado

Tous les jours, le jeune Antonio effectue deux heures de transport en commun pour participer au programme, où il rencontre un autre joueur de violon de son âge, Pedro Moya, qui va devenir son complice et son collègue, et qui l’a même rejoint au Nouveau-Brunswick, il y a six ans.

« Tony, il était le génie de notre classe. »

— Une citation de   Pedro Moya, directeur du Centre Sistema de Hillsborough

D’un orchestre à l’autre, le jeune Antonio gravit les échelons, étudie la direction musicale au Royaume-Uni et décroche un contrat prestigieux comme directeur du Teatro Nacional Teresa Carreño de Caracas.

« Il [Antonio] a une compréhension profonde de la musique et c’est un travailleur acharné », insiste Pedro Moya.

Aurait-il pu poursuivre son ascension et diriger de grands orchestres de la scène internationale comme Gustavo Dudamel, de l’Orchestre philharmonique de Los Angeles, ou Rafael Payare, de l’Orchestre symphonique de Montréal, tous deux diplômés du programme El Sistema? Sans aucun doute, affirme le directeur de Sistema à Hillsborough.

En 2017, Pedro Moya a rejoint les rangs du programme Sistema au Nouveau-Brunswick. Le programme compte de nombreux professeurs et professeures de l’Amérique latine, qui ont pour la plupart fréquenté le programme dans leur pays d’origine. Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

Bien qu’Antonio Delgado aurait pu suivre de nombreux chemins, une combinaison d'éléments, dont une relation amoureuse, un climat politique instable et des occasions professionnelles, l'ont conduit à Moncton, en 2010.

Lorsqu’on le questionne sur la carrière internationale qu’il aurait pu avoir, l’homme aujourd’hui âgé de 48 ans semble partagé entre un deuil de ces grandes scènes et les réalisations accomplies au fil des hasards de sa vie.

« Tu prends une décision, tu changes tes buts…ça ne m’a pas empêché de faire de grandes choses. »

— Une citation de   Antonio Delgado
L’Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick (OJNB) est l’organisme qui chapeaute le programme Sistema au Nouveau-Brunswick. Il compte un orchestre provincial, trois orchestres régionaux et neuf orchestres locaux, en plus de l’orchestre des enfants qui présente le concert Pops NB et l’orchestre Tutta Musica, qui regroupe le personnel enseignant de Sistema. Photo : Gracieuseté/Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick

Un rayonnement international

Sous sa direction, l’Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick (OJNB), qui regroupe maintenant 80 % d’enfants du programme Sistema, a joué à New York, Prague et Munich.

L’OJNB a interprété une œuvre originale écrite pour lui par le fameux compositeur Howard Shore lors des célébrations du 150e anniversaire de la Confédération. C’est le compositeur de la musique du Seigneur des anneaux!, précise Antonio, qui assume entièrement son côté geek.

Au printemps 2022, une vidéo de l’OJNB mise sur YouTube est devenue virale. On voyait l’orchestre répliquer avec audace à une publicité du fabricant automobile Nissan, dans laquelle une mère profitait du silence de sa voiture alors qu’elle était entourée de jeunes musiciens et musiciennes qui faussent.

En répliquant au géant automobile Nissan dans une vidéo, l’Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick a attiré l’attention d’un festival à New York, qui l’a invité à jouer sur la scène du Carnegie Hall.  

On voulait leur montrer que tous les jeunes ont du talent et peuvent briller si on leur en donne la chance, explique le chef d’orchestre.

Ce clin d'œil humoristique a valu à maestro Tony et à son orchestre une invitation au Viennese Masters Orchestra Invitational, où la formation a joué sur la prestigieuse scène du Carnegie Hall, à New York, au printemps 2023.

Ce sont de telles occasions qui confirment à Ken MacLeod, le directeur général de l’Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick, qui chapeaute le programme Sistema, qu’il a fait le bon choix en recrutant Antonio Delgado en 2010.

Des gens de tout le pays viennent ici pour voir ce que nous faisons. Je fais des présentations lors de conférences internationales. Nous avons fait tout cela ici même, au Nouveau-Brunswick, ce qui est spectaculaire. Et donc oui, c'est tout un parcours, c'est certain, énonce avec fierté Ken MacLeod.

Des musiciens de Sistema en répétitions quelques jours avant leur grand concert.  Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

La force de la répétition
La force de la répétition

- Hey Tony!

- Maestro!

- Holà!

Quand Antonio arrive au centre de Moncton en ce jour ensoleillé de juin pour les répétitions du concert Pops NB, il est salué au détour de chaque corridor, souvent en espagnol. Le recrutement de professeures et de professeurs en Amérique latine est fructueux, notamment en raison de la réputation du directeur musical.

C’est le branle-bas de combat dans les locaux et corridors d’une ancienne école située dans un secteur industriel de Moncton, devenue le quartier général du programme. Fébriles, les enfants, venus d’un peu partout au Nouveau-Brunswick, ont seulement deux jours de répétitions.

Dans une grande salle de classe, les premiers violons répètent depuis déjà deux heures.

On y retrouve Brian Augustine, un mois après son audition. Il a chaud, il a mal au bras et est visiblement fatigué. Son enseignante Olive Bestvater, à ses côtés, hausse son coude et presse la main dans son dos pour qu’il se redresse.

On va prendre une petite pause maintenant, lui dit-elle quand elle nous voit.

Brian nous confie qu’il avait craint de ne pas avoir été sélectionné pour Pops NB. Votre photographe m’avait déconcentré, admet-il en précisant que l’année précédente, il avait été choisi pour le concert, mais je n’avais pas de moyen de transport pour me rendre. Cette fois-ci, un autobus est fourni par l’organisation pour le transport d’Elsipogtog à Moncton.

Brian pratique le violon.
Brian Augustine rêve de devenir musicien professionnel et de jouer sur les plus grandes scènes. Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

Olive Bestvater atteste que les parents de Brian sont très investis dans son parcours, mais que parfois, c’est compliqué.

Brian a commencé à jouer quand il avait huit ans, cependant il s’est désengagé pendant la pandémie. Depuis un an, il est de retour au programme.

Il est le premier de sa famille à jouer d’un instrument de musique classique. Il rêve de jouer un jour dans un grand orchestre, mais il ignore ce que l’avenir lui réserve. Pour l’instant, il trouve son bonheur dans l’odeur du bois de son violon et dans la sensation de l'archet qui glisse sur les cordes.

- Qu’est-ce que tu ressens quand tu joues du violon, Brian?

- Un grand calme.

En plus des quinze heures de répétition hebdomadaires, l’adolescent suit une classe de maître une fois par semaine et répète tous les jours chez lui. Il commence à avoir ses propres buts, et ma job, c’est de l’aider à réussir, explique son enseignante dévouée.

Maintenant, pas question de lâcher, insiste la dynamique violoniste originaire de la Saskatchewan.

L’excellence exigée

On enseigne aux enfants le processus de l’excellence. On les traite sur un pied d’égalité, mais parfois on les aide un peu. Peut-être que l’enfant a besoin d’une collation, d’un moyen de transport, d’un coup de main pour remplir un formulaire d’inscription. Mais on ne baisse pas la barre, on les aide à l’atteindre, explique Antonio Delgado.

Lui-même se demande parfois ce qu’il serait devenu sans la musique. De ses amis d’enfance, il y en a qui ont été entraînés dans des cartels de drogues. Certains sont morts.

Moi, j’étais trop occupé avec ma musique pour me mettre dans le trouble. Je pensais à Mozart et à Tchaïkovski, pas aux drogues ou aux gangs, raconte-t-il.

C’est justement l’impact du programme vénézuélien sur les jeunes qui a fasciné Ken MacLeod, directeur général de l’OJNB. Cet ancien politicien et philanthrope se demandait comment aider concrètement les enfants de sa province, qui affichait l’un des taux de pauvreté infantile les plus élevés au Canada.

« Un enfant qui est né dans la pauvreté [...] est plus susceptible d’être laissé pour compte pendant toute sa vie. Ce n’est pas acceptable, et c’est une des raisons pour lesquelles on a commencé le programme. »

— Une citation de   Ken MacLeod, directeur général de l’Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick (OJNB)

C’est en préparant une visite à un centre d’El Sistema, à Caracas, qu’il a été mis en contact pour la première fois avec Antonio Delgado.

Lorsqu’il est rentré à Moncton, c’était pour lui une évidence que sa région avait besoin d’un tel programme, surtout que les données provinciales n’ont presque pas bougé en trois décennies.

Un enfant sur cinq au Nouveau-Brunswick vit sous le seuil de la pauvreté. Un sur cinq!, se désole le directeur général de l’OJNB.

Le premier centre a été lancé avec les moyens du bord à l’école Beaverbrook, à Moncton, en 2010 et ne comptait que 50 enfants.

J’aurais voulu recruter tout de suite Tony, mais il avait des engagements professionnels, raconte Ken MacLeod.

Un an plus tard, il convainc le jeune chef de s’installer à Moncton, et ce dernier prend en charge la direction artistique du programme. Depuis, neuf centres ont ouvert leurs portes : Moncton, Saint-Jean, Fredericton, Tracadie, Edmundston, Miramichi, Elsipogtog, Hillsborough et Richibucto. Un dixième ouvrira cet automne, à Bathurst.

Antonio Delgado a vu les bienfaits des valeurs d’inclusion et d’accessibilité qui sont au cœur du programme, explique Ken MacLeod.

Dès l’âge de 6 ans, les enfants peuvent participer au programme. La sélection tient compte de plusieurs facteurs, dont leur situation socio-économique, mais l’expérience musicale n’en fait pas partie. L’enseignement, les instruments et même le transport entre l’école et les centres sont fournis.

Ça ne dérange pas d’où tu viens, que tu sois pauvre, que tu sois un immigrant, explique Antonio. Nous, on va t’aider à te rendre où tu veux aller. On ne va pas faire le travail pour le jeune, il doit travailler, mais on pave le chemin pour qu’il réussisse.

L’organisme a récemment entrepris une campagne de financement franchement ambitieuse : offrir le programme à 10 000 enfants par année, d’ici 15 ans.

Vous savez, dans une classe à l’école, vous avez peut-être 15 % d’enfants de milieux à risque, explique Ken MacLeod. Chez nous, on a parfois jusqu’à 80 % de ces enfants dans nos groupes. C’est un gros défi, mais c’est le but d’engager nos jeunes qui vivent des difficultés.

Helen Faucher a vécu une période difficile lorsqu'elle était enfant. Aujourd'hui âgée de 18 ans, elle est reconnaissante pour tout ce que la musique lui a apporté pendant sa jeunesse. Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

Surmonter les obstacles
Surmonter les obstacles

Quand elle a pris un violon dans ses mains pour la première fois, Helen Faucher traversait une période difficile, marquée par le divorce de ses parents.

Je ne voulais pas vraiment, mais mes parents m’ont forcé, se remémore-t-elle.

Elle n’avait jamais touché un instrument avant de joindre Sistema. Fragile, la fillette de six ans avait parfois de la difficulté à ne pas s’endormir avant la fin de la journée.

Ce n’était pas toujours amusant, c’était de longues heures, mais au moins j’avais une stabilité.

Un montage de trois photos.
1. Helen Faucher traversait une période difficile quand elle a été admise au programme. Elle affirme que la musique l’a beaucoup aidée à traverser ses difficultés. 2. En 2010, le projet-pilote Sistema a été lancé à Moncton à l’école Beaverbrook. Il n’y avait qu’une cinquantaine de participants, dont Helen Faucher. 3. Lorsque les élèves arrivent dans le programme Sistema à l'âge de 6 ans, on ne leur donne pas immédiatement un instrument. On leur demande d'abord d’en construire un en papier mâché Photo : Photos 1 et 2 : Gracieuseté : Helen Faucher | Photo 3 : Patrick Lacelle

Elle se rappelle sa première répétition avec Antonio Delgado. J'étais très nerveuse d’avoir une leçon avec lui, je n’étais pas préparée. À cette époque, je le trouvais même un peu méchant, dit-elle en riant.

Antonio est amusé lorsque nous lui rapportons l’anecdote. Oui, Helen, je me souviens!

Des personnes peuvent l’interpréter comme de la colère ou de la déception, mais il est très passionné. Je suis reconnaissante pour tout ce qu’il m’a appris et je l’admire beaucoup, dit la jeune femme.

Une amitié les unit maintenant, et Antonio Delgado n’aurait pas pu être plus fier de la voir poursuivre ses études au programme d’interprétation de l’Université Western, à London, en Ontario.

Helen, de son côté, ressent une gratitude éternelle pour son mentor et compte revenir tous les étés de ses études pour donner un coup de main et enseigner à son tour.

Le programme Sistema du Venezuela a fait l’objet d’allégations d’abus. Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

Protéger les enfants vulnérables

Si le programme El Sistema a souvent été cité en exemple comme modèle d’intégration sociale, il y a aussi une ombre au tableau.

Le programme vénézuélien a été éclaboussé en 2021 par des allégations d’abus et d’agressions sexuelles qui auraient été commis par des membres du personnel enseignant en position d’autorité. Une enquête est en cours.

L’affaire ébranle évidemment le mouvement, indique Antonio Delgado, qui affirme n’avoir jamais observé de cas d’abus pendant ses années dans le programme au Venezuela. Mais je ne dis pas que ce n’est pas arrivé, des gens ont dénoncé. C’est désolant, mais avec une organisation de cette ampleur, c’est possible.

Selon Ken MacLeod, il n’y a pas eu de cas en 14 ans, où une intervention a dû être faite en vertu de la politique sur la protection des enfants. Le directeur du programme précise que le programme néo-brunswickois est complètement indépendant et suit des directives provinciales strictes en ce qui a trait à la protection de l’enfance.

Pour Antonio Delgado, il n'y a pas de petits orchestres, et tous les musiciens et toutes les musiciennes, quel que soit leur niveau, méritent qu’il s’y intéresse. Photo : Radio-Canada / Patrick Lacelle

Place à la musique
Place à la musique

Le soir du concert Pops NB, Antonio Delgado est assis dans la salle. Il semble fatigué, mais fier des enfants et admiratif de son collègue César Suarez qui a pris le relais comme chef d’orchestre pour ce spectacle après une année exigeante.

Même les plus petits et les plus petites du groupe agissent avec professionnalisme. Tous entrent sur la scène en souriant, s'assoient, le dos bien droit, en silence. Le chef lève sa baguette et les premières notes de la pièce The Great Gates of Kiev envahissent la salle de spectacle. Le public est traversé d’un frisson. La glace est brisée.

L’une des spectatrices est Monique Boudreau, qui dirige le District scolaire francophone Sud.

C’est très touchant. Je viens depuis plusieurs années au spectacle et je vois une amélioration.

Cette amélioration, elle ne la remarque pas seulement sur le plan musical.

Au niveau scolaire, on observe une résilience, une discipline, une capacité de concentration de ces enfants-là. Ils sont engagés et motivés. On le voit ce soir, dès qu’on lève la baguette, ils sont tous prêts, à l’écoute et on voit ça aussi dans la salle de classe, observe la pédagogue ébahie.

Au troisième morceau, César Suarez se tourne vers Antonio. C’est votre tour Maestro Delgado!

Surpris, il accepte l’invitation, le sourire fendu d’une oreille à l’autre. Il serre la petite main de la première violoniste et entraîne avec une incroyable fougue les enfants avec lui.

Pour le chef, il n’y a pas de petits orchestres, et tous les musiciens et toutes les musiciennes méritent son intérêt.

« Je les pousse parce que je sais qu’ils sont capables d’excellence. J’espère que je peux leur transmettre un sens de résilience. Des fois, tu ne seras pas premier violon, tu seras second, mais tu dois continuer. L’aboutissement n’est pas le plus important, c’est le voyage qu’on fait pour s’y rendre.  »

— Une citation de   Antonio Delgado

Pour la suite, Antonio Delgado garde une idée un peu folle au fond de sa poche.

Cet automne, les enfants du programme Sistema Nouveau-Brunswick commenceront à apprendre la Symphonie No 1 de Gustav Mahler, une œuvre d’une durée d’une heure réservée habituellement à des orchestres professionnels.

Parmi les élèves qui réussiront une audition qui aura lieu en 2024, une sélection sera effectuée en vue d’une grande tournée canadienne de l’Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick prévue l’année suivante.

C’est un projet de longue haleine, mais Antonio Delgado y croit, parce que même les petits orchestres sont capables de grandes réalisations.

La dernière photographie du chapitre 1 est publiée avec l’autorisation de l’Orchestre des jeunes du Nouveau-Brunswick

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