Le bar... rayé du fleuve
Journaliste : Ginette Marceau
Réalisateur: Bernard Laroche
8 juin 2003

«On n'oubliera jamais le passé du bar. Lorsqu'il est passé par ici, c'était une mine d'or...» Joseph Lachance

Le bar rayé... à l'ancienne.

Joseph Lachance a vécu toute sa vie à Montmagny, sur le bord du fleuve. Le Saint-Laurent, c'était son terrain de jeu.

La pêche au bar, c'était une tradition dans la famille. D'aussi loin que remonte ses souvenirs, c'était l'activité du dimanche.

«C'était la sortie du monde la fin de semaine. Il y avait même des gens qui gardaient leur semaine de vacances pour venir pêcher le bar. Au lieu d'aller à l'extérieur, ils restaient ici et pêchaient». Joseph Lachance

C'était l'époque des pêches miraculeuses... l'époque où les pêcheurs de bar rayé affluaient. À chaque année, des tournois étaient organisés. Ce poisson était convoité non seulement pour sa chair blanche et presque dépourvue d'arêtes, mais aussi pour sa combativité.

Disparition du bar rayé

En 1967, M. Lachance a pêché ses trois derniers bars rayés. Il a dû se rendre à l'évidence : ce poisson, jadis abondant, avait complètement disparu du fleuve.

Le gouvernement du Québec a officiellement signé l'acte de décès du bar rayé en 1996. Bien que les causes de disparition n'ont jamais été clairement identifiées, certaines explications ont été avancées.

«Il y a eu un changement assez radical dans la distribution du bar dans les années qui ont suivi l'aménagement de la voie maritime. En même temps, il y a eu augmentation de la mortalité par la pêche.» Jean Robitaille, biologiste-conseil, Bureau d'écologie appliquée.

L'élargissement de ce qu'on appelle la traverse du nord (située entre l'île d'Orléans et Cap-Tourmente) a également entraîné un déplacement des bars vers la rive.

Le bar rayé est de couleur bleu acier à noir, mais ses flancs sont argentés et ont chacun sept ou huit rayures horizontales.

Les femelles atteignent leur maturité sexuelle entre quatre et six ans. Elles ne se reproduisent pas à tous les ans.


Effort de réintroduction

Depuis printemps 2002, la Fédération québécoise de la faune a multiplié les soirées d'information dans les communautés riveraines pour discuter du retour prochain du bar. Mais les spécialistes connaissent mal le comportement de ce poisson et les sites fréquentés, si bien que la réintroduction se fait par tâtonnement.

Ainsi, une course contre la montre s'est enclenchée pour les biologistes de la Société de la faune et des parcs du Québec cet été. Ils devaient capturer un grand nombre de juvéniles dans la rivière Miramichi au Nouveau-Brunswick.

Ces prises sont essentielles au programme de réintroduction du bar, puisqu'elles représentent bien des avantages.

«En allant chercher les bars rayés au Nouveau-Brunswick, on risque d'avoir une lignée sauvage. Ces bars rayés, qu'on ensemencerait dans le Saint-Laurent, auraient donc plus de chance à s'adapter dans notre système fluvial», Francis Bouchard, biologiste.

Taux de survie très faible...

Cependant, le taux de survie de ces juvéniles est très faible... moins de un pour cent. Voilà pourquoi les biologistes jouent sur deux fronts. La moitié des juvéniles est destinée au fleuve. L'autre moitié prend la route de l'Estrie.

Les biologistes croient au succès du programme de réintroduction du bar rayé. Si tout se déroule comme prévu, la pêche sportive au bar pourrait reprendre dans une quinzaine d'années. De quoi faire rêver les nostalgiques d'un passé révolu...

Un retour... attendu!

Le bar rayé est la seule espèce indigène qui a disparu du fleuve Saint-Laurent.

Au cours des dix prochaines années, cent mille bars rayés retourneront au fleuve.



HYPERLIENS

Répertoire des espèces disparues au Québec depuis 1800

Le bar rayé
Société de la faune et des parcs du Québec

Recherche sur la bar rayé

Rapport sur l'état des stocks de bar rayé (2001)




 



Saviez-vous que...

Le bar rayé était jadis appelé «l'achigan de mer.» Il était souvent servi aux repas des vendredis d'antan, dans les familles qui faisaient maigre;

Ce poisson a fait l'objet de pêches récréatives et commerciales importantes jusqu'au début des années 1960;

Les captures commerciales ont atteint un maximum de 53 tonnes métriques en 1943 avant de diminuer brusquement à partir de 1955 et disparaître en 1966;

Près de 200 captures accidentelles ont été signalées entre 1975 et 1994, dont la majorité (163) en 1981;

En 1982, les autorités de l'État du Maine ont réussi à réintroduire le bar rayé dans les rivières Kennebec et Androscogin.

En 1999, la Société de la faune et des parcs du Québec (FAPAQ) a élaboré un plan de réintroduction du bar rayé dans le fleuve;

En 2001, la Fondation héritage faune (FHF), fondation officielle de la Fédération québécoise de la faune (FQF), a investi 10 000$ dans le projet;

 

Visionnez notre reportage «Le bar... rayé du fleuve».