Mise à jour : La crise du crabe
Reporter : Aubert Tremblay
Réalisateur : Michel du Montier
25 mai 2003

À la fin des années 1960, la pêche au crabe était menée en fonction d'un quota global, sans contingent individuel. Ce quota était souvent fracassé ce qui amena un déclin de la population.


Petite histoire du crabe des neiges...

L'exploitation du crabe des neiges dans l'Atlantique canadien a débuté en 1960 par des prises accidentelles effectuées par des dragueurs de poissons de fond au large de Gaspé. Le crabe était alors vu comme un animal encombrant qu'il fallait dégager des filets.

Les Japonais, les plus friands consommateurs de crabe des neiges du monde, s'approvisionnaient surtout en Alaska, de même que les Américains. Mais en 1965, le crabe royal de l'Alaska a connu un important déclin ce qui a fait augmenter la valeur du crabe du golfe Saint-Laurent.

À cette époque, beaucoup de pêcheurs de la côte Est étaient dans une bien triste situation: leurs vieux chalutiers de bois ne faisaient plus le poids face aux bateaux modernes.

Plusieurs morutiers se sont alors lancés dans la pêche au crabe des neiges: pour eux, c'était un marché providentiel. Alors qu'ils n'étaient que 15 pêcheurs en 1967, on en comptait 70 en 1969.

Une surexploitation de l'espèce

En quelques années, les détenteurs de permis de crabe ont vu la valeur de leurs débarquements doubler, même tripler. À ce moment, la pêche au crabe était compétitive, c'est-à-dire menée en fonction d'un quota global, sans contingent individuel. Chaque équipage tentait donc de ramener la part maximale du quota global et la capture était fermée quand le ministère fédéral des Pêches statuait que le contingent était atteint.

Mais une fois le décompte des débarquements à jour, le quota global était souvent fracassé. Il s'est produit ce qui devait se produire: le crabe des neiges s'est mis à décliner. Le gouvernement a donc dû imposer des quotas individuels.

En 1986, il y avait 130 détenteurs de quotas dans la zone 12, celle qui est au coeur du conflit actuel. La zone 12 touche les pêcheurs de la Gaspésie, des Îles-de-la-Madeleine et du Nouveau-Brunswick.

Cette année, le ministre Thibault accorde 15% des quotas permanents aux autres pêcheurs, soit les morutiers, les homardiers et les autochtones. Il a également diminué les quotas de 22 000 à 17 000 tonnes métriques.


En 1995, les prises et les prix ont été exceptionnels. Les morutiers, dont la situation était beaucoup moins enviable depuis le moratoire de 1993 dans le nord du golfe, ont voulu profiter de la manne. Le gouvernement leur a donc accordé une part des prises. Ce fut le début d'une période de tension entre les différents pêcheurs.

En 1997, Ottawa signait avec les crabiers un plan de cogestion de cinq ans. Les crabiers acceptaient de laisser d'autres pêcheurs prendre du crabe, mais seulement les bonnes années, lorsque eux-mêmes en auraient suffisamment pour assurer un revenu dépassant le seuil de la rentabilité. Ces quotas temporaires furent effectifs trois années sur cinq.

En 1999, le jugement Marshall accordait le droit aux autochtones de pêcher le crabe. (voir capsule info) Le gouvernement leur a donc acheté des permis aux crabiers eux-mêmes.

Il y a quelques semaines, le ministre fédéral des Pêches a annoncé une baisse des quotas du crabe, juste après avoir interdit la pêche à la morue. Ce qui a surtout provoqué la colère des crabiers, c'est qu'il accorde 15% des quotas permanents à d'autres pêcheurs, soit les morutiers, les homardiers et les autochtones.

Il ne s'agit pas là de quotas temporaires, mais de vrais quotas qui seront effectifs aussi dans les années difficiles. Autrement dit, les crabiers n'ont plus l'assurance de rester rentables. Et le crabe est une espèce dont la population fluctue beaucoup. Les scientifiques prévoient une baisse d'ici 2005.

 



HYPERLIENS

Crabe des neiges
Pêches et Océans Canada

Crabe des neiges : distribution et écologie

Zone de pêche du crabe des neiges




Le jugement Marshall

À l'automne 1999, la Cour suprême du Canada a rendu son jugement en faveur d'un Micmac qui avait pêché sans permis, soutenant du même coup les dispositions d'un traité signé en 1760 par la Couronne britannique et la nation Micmac.

Cette décision faisait suite à l'appel concernant la condamnation, en 1996, de Donald Marshall fils pour avoir pêché et vendu 210 kilogrammes d'anguilles hors saison et sans permis.

Le jugement a libéré Marshall de toutes les accusations ayant été retenues contre lui.

Cette décision a également confirmé que les Micmacs et les autres groupes autochtones de la Nouvelle-Écosse mentionnés dans le traité de 1760 peuvent pêcher à l'année, et ce, sans permis.

Toutefois, le texte du jugement insiste pour dire que ces droits des autochtones sont limités à la satisfaction des besoins quotidiens, ce qui inclut l'alimentation, l'habillement, le logement et quelques agréments.

Source:
Un traité datant de 1760 est maintenu par la Cour suprême.

 

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