Les fougères, c'est du spore
Reporter : André Bernard
Réalisatrice : Marie-Eve Thibault
1er juin 2003

«J'ai voulu rendre les plantes disponibles parce que je voyais qu'il y avait de la récolte en forêt qui se faisait. Je trouvais ça un peu dévastateur pour certaines espèces.» Adamo Senécal, producteur de fougères


Une passion : les fougères...

 


Adamo Senécal, producteur de fougères

Adamo Senécal est le seul horticulteur québécois spécialisé en production de fougères. «C'est comme une piqûre que j'ai attrapé. Un jour, je me suis assis dans le bois et je me suis aperçu qu'il existait plusieurs espèces.» Adamo Senécal, producteur de fougères

«Les fougères ne font pas partie du même règne végétal que les autres plantes. Ça ne se sème pas avec des graines, c'est des spores.» Adamo Senécal

Une fois détachées de la fronde, les minuscules spores sont versées dans une salière qui va servir de semoir. C'est dans son laboratoire qu'Adamo réalise la plus délicate des opérations : la reproduction des fougères...

Une plante pas comme les autres...

Ce qui différencie la fougère des autres plantes, c'est que les spores, contrairement aux graines, ne contiennent pas l'embryon de la plante.

«Chez la fougère, le spore tombe sur le sol alors qu'il n'y a pas eu fécondation. La fécondation va se produire sur le prothalle.» Adamo Senécal

Le prothalle est une petite lame verte produite par la germination de la spore. Les organes sexuels prennent forme sur les prothalles: les mâles, les femelles ou les deux à la fois. Du prothalle naîtra un oeuf qui à son tour va se transformer en fougère.

Une lente reproduction

«Les spermatozoïdes ont besoin de l'eau pour voyager. C'est pourquoi en forêt, on retrouve plus de fougères dans des milieux humides.» Adamo Senécal

Contrairement aux autres plantes, la fécondation de la fougère peut se produire sur plusieurs mois. «Elles passent huit mois dans le laboratoire sous lumière artificielle. Lorsque le système racinaire est complètement développé, les fougères sont transférées dans la serre pour un repiquage dans un format plus gros.» Adamo Senécal

Entre le semis en laboratoire et le centre jardin où les fougères sont vendues, il s'écoule au moins un an et demi. C'est trois fois plus long qu'une production de plantes annuelles, ce qui augmente d'autant les risques de pertes pour le producteur.

Des risques de perte élevés

«La perte se fait surtout quand on fait les semis : on peut avoir beaucoup de contamination par des maladies fongiques. Ensuite, la perte va surtout avoir lieu pendant la première dormance, à l'hiver. Au dégel du printemps, les fougères commencent à sortir et on peut avoir 10% de perte pour la première année.» Adamo Senécal

Adamo cultive une trentaine d'espèces de fougères. La majorité est indigène au Québec et certaines espèces sont très rares.

«J'ai voulu rendre les plantes disponibles parce que je voyais qu'il y avait de la récolte en forêt qui se faisait. Je trouvais ça un peu dévastateur pour certaines espèces, sans compter qu'il y a aussi des producteurs qui le font à grande échelle.» Adamo Senécal

Adamo Senécal s'est mérité le prix du producteur horticole innovateur décerné par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, dans le cadre de son concours annuel Fleurir le Québec.



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Le ministère de l'Environnement du Québec s'apprête à déposer, d'ici l'automne 2003, un nouveau règlement qui interdirait la cueillette des plantes «sensibles à la récolte» pour des fins commerciales.

La vente de ses plantes serait autorisée uniquement si elles font l'objet d'une culture.

Les centres jardins et les pépiniéristes pourraient devoir faire la démonstration que les plants qu'ils mettent en vente sont bel et bien cultivés et non prélevés à même la forêt.

Ce règlement fait partie intégrante de la loi sur les espèces menacées ou vulnérables.

Environ 25 plantes seraient sur cette liste. Ce ne sont pas nécessairement des plantes désignées menacées ou vulnérables au sens de la loi, mais ce sont des plantes qui pourraient le devenir à cause de leur sensibilité à la cueillette.

 

Visionnez notre reportage «Les fougères, c'est du spore».