Fromage des Îles
Journaliste : Errol Duchaine
Réalisateur : Michel du Montier
29 février 2004

On a créé aux Îles-de-la-Madeleine un vrai produit du terroir. Un aliment qui goûte le coin de pays d'où il vient.


L'agriculture aux Îles-de-la-Madeleine...

Aux Îles-de-la-Madeleine, en plein coeur du golfe St-Laurent, on vit de la pêche d'abord, puis du tourisme ensuite. L'agriculture vient loin derrière avec quelques dizaines de producteurs, des maraîchers surtout.

Pour ce qui est des vaches, plus souvent qu'autrement, il y en a deux ou trois, parfois juste une derrière la maison pour les besoins de la famille.

Mais il y a six ans, un agronome, Jonathan Portelance, a eu un rêve un peu fou de transporter des vaches laitières aux Îles et de faire du fromage. Un fromage au lait cru imprégné du goût des îles, du vent, de la mer et de la terre.

Un éleveur de boeufs d'Havre-aux-Maisons, Jérémie Arseneau, a décidé de croire et d'embarquer dans ce rêve. Il a eu une petite hésitation à l'époque mais comme les profits de son élevage diminuaient constamment il a décidé de faire le saut.

Finalement, un troisième joueur c'est joint au duo, Vincent Lalonde l'artisan-fromager. Sa part de l'aventure, c'est aussi le but ultime de tout le projet: faire du fromage.

«Avec la diversité qu'on a dans les pâturages, avec l'air marin, le sol, le grès rouge unique aux Îles on est sûr de pouvoir donner un fromage très unique en son genre. On cherche à lui donner un goût du terroir des îles.»

Vincent Lalonde, artisan-fromager


L'aventure commence...

Les vaches sont arrivées aux Îles il y a 6 ans, 60 belles vaches canadiennes. Elles sont parties de l'île Verte et de St-Cimon-de-Rimouski dans le Bas St-Laurent et elles ont fait un voyage de 22 heures par terre et par mer pour se rendre à bon port.

Le premier choc est venu plus tard. Rien de dramatique mais à cause du changement de menu, les bêtes ont donné moins de lait au début. Elles étaient habituées de se nourrir à l'ensilage, du bon foin vert fermenté, une nourriture riche en protéines. Sur l'île, on leur a donné du foin sec, plus fibreux et moins protéiné.


Troupeau de vaches canadiennes.

 

Le goût du fromage...

Le goût du fromage c'est la grande préoccupation au coeur de toute l'entreprise.

«En majorité tout ce que les vaches mangent vient des îles, mais il y a eu des ajouts pour compléter les manques, mais il y a des éléments qu'on ne peut ajouter comme l'ensilage qui va changer le goût du fromage.»


Petite vache canadienne.

Le choix des vaches canadiennes était lui aussi dicté par cet objectif. La vache canadienne est née sur nos terres. C'est le résultat du croisement de toutes ces vaches qui sont arrivées en Nouvelle-France il y a quelques siècles avec les premiers colons. C'est au 19e siècle qu'on l'a baptisée canadienne. Pas très grosse mais robuste, elle est capable de toutes les besognes. Elle ne sera, cependant, jamais une championne donneuse de lait. Quand les premières Holsteins sont arrivées au pays, avec leur très grande productivité laitière, la Canadienne est tombée dans l'oubli. Aujourd'hui, la race est presque morte, on a oublié qu'elle possédait de grandes qualités.

C'est une petite vache capable de monter sur les côtes. De plus, comme on dit dans le milieu, cette vache a un beau potentiel fromageable. En clair, la richesse du lait des canadiennes en protéines et en matières grasses a tout ce qu'il faut pour faire du bon fromage et en grande quantité.

C'est-à-dire qu'avec la même quantité de lait de l'une de ces vaches on fait plus de fromage qu'avec le lait de la plupart des autres races de vaches.

 

Les fromages...

En un an le projet était sur pied. Depuis ça n'a pas cessé, tous les jours, deux fois par jour, on achemine le lait de la ferme vers la fromagerie quelques mètres plus loin.

On y produit du fromage au lait cru. En six ans, on a créé quatre sortes de fromages différents : Le Jeune Coeur, le Brebis des Montants, le Tome des Demoiselles, mais surtout on a créé le Pied-de-Vent. Le succès de ce fromage a pris tout le monde par surprise.

À ce jour, on a vendu 200 000 meules de Pied-de-Vent. En fait, tout ce qui a été produit. Ce fromage prend 60 jours à produire. Le caillé est transféré dans des moules où, dès le départ, les bactéries et les champignons font leur travail. Puis, le fromage vieillit en salle où les meules sont brossées et retournées à tous les jours. Le temps fait le reste.

Aujourd'hui, l'histoire des vaches des îles ne se résume pas qu'à ce fromage. Les touristes ne se lassent pas de regarder cet étrange troupeau. Un troupeau qui a redonné un air de jeunesse à la race et qui a rappelé à d'autres éleveurs que ce lait a bien des vertus. Avec quelques travaux de génétique on a même réussi à rendre ces vaches plus productives.

Cette production a permis de créer une douzaine d'emplois aux Îles et elle a redonné une vigueur à l'agriculture dans tout l'archipel. De plus en plus de fermiers, des maraîchers surtout, souhaitent augmenter leur production et transformer sur place leurs produits.

 


HYPERLIENS

Fromages du Québec

Les Îles-de-la-Madeleine - site officiel



Pied-de-Vent

L’expression «pied-de-vent» est utilisée aux Îles pour désigner les rayons du soleil perçant à travers les nuages.

 

 

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