L'occasion vache folle
Journaliste : Gilbert Bégin
Réalisateur : Bernard Laroche
8 février 2004

«Au mois de septembre, ce qu'on a décidé de faire, c'est de faire vraiment du détail. On a loué une boucherie pour faire notre propre mise en marché et faire notre détail de A à Z, pour avoir aucun intermédiaire et être les seuls à pouvoir manipuler notre produit.» Mario Pilon


La vache folle : la crise...

Mario Pilon élève des bovins à St-Majorique près de Drummondville. Avant la crise de la vache folle, ses 200 bêtes trouvent facilement preneur. La mise en marché du bœuf est alors une machine bien rodée. Mais le 20 mai, lorsque les États-Unis ferment leurs frontières, tout dérape !

D'un seul coup, Mario Pilon mesure toute sa dépendance aux marchés américains. Et il n'est pas seul : les trois quarts du bœuf produit au pays sont exportés aux États-Unis.La crise de la vache folle a plongé les producteurs dans une profonde réflexion. À l'heure actuelle, on cherche encore les moyens de diminuer cette dépendance. Mario Pilon lui n'a pas attendu. Il a fait de cette crise l'occasion de repenser sa production agricole.

«Là on a dit faut faire quelque chose…Les pertes étaient vraiment trop lourdes; on a payé des veaux 1000 dollars et à l'abattoir, on reçoit 400 à 500 dollars de la tête. Et y ont pas été nourris! On a dit on peut pas continuer comme ça…»

Mario Pilon

 

La production de boeuf de A à Z


- La boucherie...

Deux semaines seulement après le début de la crise, il passe à l'action. Dorénavant, il s'occupera lui-même de l'abattage et de la vente de sa viande. Son premier geste : un camion réfrigéré pour le transport de ses carcasses. Une aubaine qu'il déniche sur Internet.

Bien en selle, il aborde avec optimisme la route de la mise en marché.

Mais les distributeurs ont le gros bout du bâton. On lui suggère de retourner chez lui et d'attendre les compensations financières des gouvernements. Après 1 mois d'effort, Mario Pilon n'a toujours pas convaincu de grossistes. Loin de se décourager, le producteur prend un autre virage.

Il décide de faire affaire directement avec les boucheries mais l'essai n'est pas concluant parce qu'il n'a pas de contrôle sur son produit.

Enfin, il décide de faire l'acquisition d'une boucherie qui se situe à 15 minutes de sa ferme dans le village de St-Charles-de-Drummondville. C'est le dernier maillon qui le sépare du consommateur.

Avec cette boucherie, il saute à pieds joints dans le marché du détail.

- Le marché du détail...

Les débuts sont éprouvants. Le travail à la boucherie s'ajoute aux nombreuses heures à la ferme mais les efforts portent fruit et le commerce fait rapidement ses frais.

L'embauche d'un boucher apporte également un peu d'air frais. Après 5 mois, le bouche à oreille fait finalement son œuvre. Les Pilon écoulent aujourd'hui la moitié du bœuf produit sur leur ferme dans leur propre boucherie.

Récemment, ils ont également ajouté à leur clientèle locale les bonnes tables de la région. Les restaurateurs apprécient la qualité de la viande et le service personnalisé.

- L'abattage...

Afin de garantir cette qualité tant appréciée de ses clients, Mario Pilon se rend chaque semaine au petit village de Manceau, à une heure de route de sa ferme, pour l'abattage de ses bêtes.

C'est là qu'il a déniché un abattoir qui l'autorise à suivre son bœuf à la trace. Ça lui permet, ainsi, de s'assurer de la qualité de la coupe et de l'abattage. Il est présent à chacune des étapes.

 

Penser autrement...

Mario Pilon sait que la réouverture de la frontière américaine n'est pas pour demain. Surtout depuis la découverte d'un deuxième cas de vache folle.

Son passage dans la vente au détail lui a permis d'éviter le pire. Bien sûr, la taille modeste de son élevage a facilité son virage. Mais Mario Pilon est convaincu : la crise actuelle pourrait être une formidable occasion de repenser la mise en marché du bœuf.

 

 

HYPERLIENS

 




Nature le veau...

Mario Pilon n'est pas le seul à tirer parti de la crise de la vache folle. Jean-Frédéric Tschiember est éleveur de veau de grain. Il occupe une partie du congélateur à la boucherie des Pilon.

Ce producteur a fait le saut dans la mise en marché deux ans avant la crise. Les ventes piétinaient mais le premier cas de vache folle a tout relancé.

Kim Lefebvre est la conjointe de Jean-Frédéric Tschiember. Elle a développé un logo pour distinguer leur viande qui est élevée sans antibiotique et sans hormone de croissance.

Pour ces producteurs, la crise de la vache folle est responsable des récents succès des petits éleveurs comme eux.

Pourtant, malgré la demande croissante, Jean-Frédéric Tschiember a dû ralentir sa production. Cumuler les fonctions d'éleveur et de détaillant est devenu exigeant. Il est souvent à bout de souffle…

Mais il s'accroche. Il veut poursuivre dans la mise en marché et en dépit des difficultés, il demeure persuadé qu'il a fait le bon choix.

 

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